Diplomatie : Pékin – Ankara, une synergie pour tout le Levant

Pour la première fois en 27 ans, un 1er ministre turc s’est rendu à Pékin.

À Ankara, RT. Erdogan avait déjà reçu en février le vice-Président Xi Jinping. Les 8-11/04, il rencontra son alter ego Wen Jiabao puis le chef de l’Etat Hu Jintao, signe d’une embellie – bien nécessaire à vrai dire depuis trois ans.

En 2009, Erdogan avait surgelé les rapports, en qualifiant de « génocide » la répression des Ouïghours du Xinjiang. Cette fois, il s’abstint de critiques, et se rendit sur le territoire autonome visiter  Goldwind, un des leaders nationaux de l’éolienne.

Mais c’est du n°1 Sinovel qu’il obtint une « ferme à vent » de 600MW, pour un investissement de 1milliard de US$ à charge de la CDB (la banque de développement), à installer en Turquie d’ici 2015. Avic aussi signait une JV  d’1,5milliards de US$ pour une centrale thermique (1320MW), assortie d’une mine au nord du pays.

Réconciliation pragmatique donc, au nom d’une prometteuse synergie géo-stratégique – les échanges ont déjà bondi en 2011 (malgré la récession) à 18,7milliards de $ (+24%) et devraient quintupler sous 8 ans.

Il s’agit d’attirer les groupes chinois de l’énergie et d’autres secteurs pour employer la main d’oeuvre turque à bas coût et équiper ce pays de 70millions d’habitants, les Balkans, le Moyen-Orient, l’Afrique du Nord.

En télécoms, ZTE et Huawei sont déjà sur place, ce dernier avec son centre R&D.

Pauvre en énergies fossiles, la Turquie a lancé un appel pour deux centrales nucléaires à livrer d’ici 2023. CNNC ( China National Nuclear Corporation) et CGNPC ( China Guangdong Nuclear Power Corp) sont en lice, face à de redoutables rivaux, tels le Sud-coréen Kepco (en tête), le Russe Atomstroyexport (qui a emporté en 2011 la 1ère centrale turque, quatre réacteurs de 1200MW), et le Japonais Mitsubishi (peut-être allié au français Areva ). Lors de la visite, faisant miroiter ses imparables capacités de financement, Pékin pressa les palabres, mais sans résultat autre que de vagues déclarations d’intention : malgré des progrès rapides, sa technologie nucléaire reste encore en retard, handicap lourd, après la catastrophe de Fukushima.

Autre volet de la visite d’Etat, le dialogue politique, socle indispensable pour toute coopération novatrice et à long terme, comme celle à la portée de ces deux grands pays. Mais là, force est de constater que le fruit n’est pas à la hauteur des ambitions – le courant ne passe pas ! Le conflit ouïghour (sujet très sensible à Ankara car concernant le sort d’une peuplade d’origine turque, perdue aux confins chinois) tout juste réglé – à grand peine – apparaît une autre pomme de discorde, sur la Syrie.

Avec ce pays en guerre civile, Ankara a une frontière commune, par laquelle elle a vu arriver 25.000 réfugiés. De sensibilité atlantiste, elle croit que le problème se réglera par la chute de B. el-Assad.

Hélas, la Syrie est vassale de Téhéran, alliée (pétrole oblige) de Chine et Russie, soudées pour sauver la sanglante dictature – à ce jour, elles ont bloqué à l’ONU tout soutien militaire aux insurgés. Mais cela va-t-il durer ?

De plus, que l’armée syrienne ait abattu des réfugiés sur sol turc, irrite fort Erdogan, qui parle de solliciter l’aide de l’OTAN « pour sa défense »… En tout cas, ce dossier bloque probablement toute alliance de fond entre Ankara et Pékin. Cela dit, sur cette guerre en cours, où se joue en partie le sort de la région, les événements fluctuent—rien n’est joué.

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