Immobilier : Avis de démolition pour Evergrande à Hainan

Avis de démolition pour Evergrande à Hainan

Coup de semonce pour le promoteur immobilier Evergrande : il devra démolir 39 tours résidentielles construites sur l’une de ses trois îles artificielles prénommées « Ocean Flower Island » (海花岛) à Hainan. La construction de ces immeubles couvrant 435 000 m² serait en infraction des règles environnementales et menacerait les récifs coralliens de la région. Le groupe, qui a fait appel de cette décision, a seulement 10 jours pour s’exécuter. Cette décision a été prise en parallèle à une injonction d’interrompre toute construction sur ces îles.

C’est un nouveau revers pour le promoteur qui croule sous un passif estimé à 300 milliards de $ et dont le processus de restructuration a déjà débuté sous la houlette des autorités du Guangdong, sa province d’origine. 

Inquiet de l’impact de l’avis de démolition sur le cours de son action qui a déjà perdu 90 % de sa valeur en 2021, Evergrande a suspendu sa cotation en bourse de Hong Kong le 3 janvier tout en s’empressant de préciser que cette injonction ne concerne qu’une partie des logements censés pouvoir accueillir plus de 110 000 habitants cette année. Quelques jours plus tôt, le groupe tentait de rassurer les 1,5 million d’acheteurs en attente de leur logement en annonçant que 91,7% de ses chantiers à travers la Chine avaient repris, après plusieurs mois d’interruption…

Cependant, l’intransigeance des autorités de la ville Danzhou, dont dépend « Ocean Flower Island », vis-à-vis d’Evergrande risque d’écorner un peu plus la confiance que les investisseurs pouvaient encore avoir dans la capacité du groupe à rembourser ses dettes. En effet, cette démolition le prive de biens qu’il aurait pu revendre et risque de faire chuter la valeur globale de ce projet pharaonique. D’une superficie de 800 hectares, soit 1,5 fois la taille des « Palm Islands » de Dubaï, le chantier avait été estimé à 160 milliards de yuans (22 milliards d’euros).

Initié il y a dix ans, « Ocean Flower Island » est l’un des projets les plus emblématiques du promoteur. Cet ensemble de trois îles artificielles en forme de fleur symbolise plus que n’importe quel autre projet la folie des grandeurs des années fastes d’Evergrande. Sur l’immense île centrale, dédiée aux loisirs et au tourisme, tout est démesuré : centre commercial géant, centre de conférence de 90 000 m², hôtels de luxe, parcs à thème, jardin botanique… Inauguré en décembre 2020, le complexe aurait déjà reçu 5,5 millions de visiteurs en 2021. C’est ce débouché touristique qui avait convaincu la ville de Danzhou de donner son feu vert au « Ocean Flower Island » en 2012, malgré le risque qu’il représentait pour les écosystèmes marins. 

Étrangement, à l’annonce de la démolition des 39 immeubles, de nombreux internautes ont déploré ce gaspillage de ressources et pris d’une certaine manière la défense d’Evergrande, victime d’un revirement politique. « Cela coûte de l’argent pour les construire, cela coûte de l’argent pour les détruire », s’est lamenté l’un d’entre eux. Un autre s’interroge : « qui a approuvé ce projet illégal en premier lieu » ? Et c’est bien là que le bât blesse…

Chez le maire de l’époque Zhang Qi, 13 tonnes de lingots d’or ont été retrouvées dans une cave secrète fin 2019 et plus de 268 milliards de yuans (37 milliards d’euros) ont été saisis sur ses comptes en banque. Au total, sa fortune mal acquise aurait fait de lui l’homme le plus riche de Chine, devant Jack Ma et ses 37 milliards de $. Elle aurait également pu sauver deux fois la Grèce de la faillite, selon certaines estimations. Zhang Qi a été arrêté et condamné en 2020 à la prison à vie pour avoir accepté des pots-de-vin de plus de 107 millions de yuans (seulement), les autorités estimant que les véritables montants étaient trop embarrassants pour être révélés. D’ailleurs, la vidéo de la découverte de la caverne d’Alibaba de l’ancien maire a été censurée…

Cet épisode démontre à quel point l’arrivée du Président Xi Jinping au pouvoir a changé la donne. Désormais, la protection de l’environnement est censée primer sur le développement économique, tandis que la campagne anticorruption dévoile au grand jour les connivences de certains cadres avec les promoteurs immobiliers qui ne sont plus en odeur de sainteté. Et dire que la débâcle d’Evergrande ne fait que commencer…

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