A la loupe : Investissements opportunistes…

Le monastère de Shaolin (Henan), est peut-être un des sites au monde les plus riches en atouts, tout à la fois siège historique de l’ordre bouddhiste combattant, créateur du Wushu (kungfu) et lieu putatif du serment du jardin des pêchers à l’origine de la  confrérie des trois harmonies (三合会 san he hui), autrement connue sous le nom de Triades -mafia locale qui, précisons le, n’a aucun lien, depuis des siècles, avec le monastère.

Visités et admirés par le monde entier, quoi de plus normal que ces moines athlètes s’initient vite aux arcanes des affaires?

Dès 2002, l’ordre entamait le grand nettoyage de tous les produits et marques se réclamant de lui à travers les 5 continents, faisant interdire l’un, prélevant sa dîme sur l’autre. Il ouvrait filiales et succursales, lançait ses tournées entre festivals et salons, et militait pour l’inclusion de son art martial parmi les disciplines olympiques. Au printemps, à temps pour les JO de Pékin, il lançait sa galerie virtuelle de produits dérivés, manuel de kungfu à 9999¥ pièce (le chiffre « jiu », 9, étant homophone du terme de salut), ou savon bouddhiste vous laissant en odeur de sainteté.

Et puis voilà que le bouillant abbé Shi Yongxin annonce un nouveau business : la reprise en gérance, pour 20 ans, de 4 temples à Gudu (Yunnan, 2000km plus à l’Ouest), histoire d’y développer le wushu. Il y place à demeure 10 moines instructeurs, prépare des stages pour étrangers et des shows pour le tourisme, dans cette ambiance plus montagnarde et grandiose. Sans compter les retombées de films à jouer en multiplex entre San Francisco et Taipei, pour le public de la diaspora. Le monastère yunnannais n’y perd rien. Pauvre comme Job, il voit reprendre en main ses aumônes et sa restauration (même celle des moines). Les seuls à se plaindre, sont les fidèles, sur internet. Par respect de leur sensibilité, Shaolin n’a pas osé suivre le gouvernement provincial qui parlait d’ouvrir une société touristique en bourse, dont Shaolin-Gudu eût été le principal actif : «ce serait contraire à l’esprit de Bouddha», a fermement reconnu l’abbé! Pourtant, c’est bien connu, la foi ne marche jamais mieux qu’en temps de crise !

Autre affaire qui roule, et pour des raisons identiques : Shanda, le n°1 national du jeu en ligne, dont les profits fusent de +41% au 3ème trimestre, et les ventes de 43% à 936M¥. La firme attribue ce bond en avant à l’addition dans ses jeux de quelques formules et démons supplémentaires. Mais l’effet crise est aussi reconnaissable: le jeune Chinois veut noyer dans le jeu ses angoisses sur l’avenir, et étant au chômage, il a plus de temps pour cela. Par contre, c’est évident, il veut payer moins cher -finis, ciné, karaoké! Le jeu en ligne est donc sa dernière « ligne de défense », où il dépense quand même 30 à 60¥ /mois : toujours bons à prendre!

 

 

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