Industrie : Le pari pas si fou du chinois Das Solar

Le pari pas si fou du chinois Das Solar

Tout un symbole : c’est une jeune start-up chinoise, Das Solar, qui va reprendre pour 1,2 million d’€ la friche industrielle historique des Peugeot dans le pays de Montbéliard (Doubs) pour la transformer en usine de panneaux solaires. Le lieu est emblématique puisque c’est ici que furent fabriqués les premiers vélos Peugeot puis, plus tard, des systèmes d’échappement de l’équipementier automobile Faurecia (devenu Forvia) jusqu’en 2021.

Le groupe chinois qui compte 14 usines et 8 900 salariés en Chine, prévoit d’investir 109 millions d’€ pour sa future usine d’une production totale annuelle de 3 gigawatts, soit 3 % du marché européen. Depuis sa base en France, Das Solar viserait non seulement l’Europe mais aussi l’Afrique francophone. Le calendrier est ambitieux puisque la production pourrait être lancée en juin 2025 avec 400 à 450 salariés et 600 à terme.

Née en 2018 dans la région de Shanghai et positionné sur une technologie de deuxième génération, Das Solar, a prospecté également en Allemagne et en Espagne avant de choisir ce territoire disposant de foncier industriel et d’une main-d’œuvre compatible avec l’assemblage de ses panneaux.

Des pourparlers seraient en cours avec de gros acteurs industriels locaux pour accueillir sur trois autres sites des sous-traitants de Das Solar autour de la future gigafactory : fabricants de câbles, connecteurs, boîtes de jonction, cadres aluminium, films adhésifs, lingots et autres wafers (tranches de silicium)…

En ligne de mire, la mise en place d’une filière complète qui pourrait employer à terme 3 500 salariés, ainsi que le transfert de technologie. C’était les deux conditions posées par l’Etat français à Das Solar, qui pourra éventuellement bénéficier de subventions européennes et se met à l’abri d’éventuelles taxes de Bruxelles. Ces exigences d’implantation ne sont pas sans rappeler celles des Chinois dans les années 1990, quand les Européens ou les Américains cherchaient à installer leurs usines dans l’Empire du Milieu.

La situation est d’autant plus ironique que c’est la concurrence chinoise qui a décimé la filière solaire française au début des années 2000. A l’époque, les différentes mesures adoptées par la Commission Européenne (taxes antidumping puis accords sur les prix…) n’avaient pas suffi à empêcher la déferlante des panneaux solaires chinois sur le Vieux Continent à des prix imbattables.

Cependant, la donne a changé. Le secteur européen est en pleine expansion : rien qu’en France, il faudra disposer de 100 à 200 gigawatts (GW) de capacités photovoltaïques à l’horizon 2050 pour atteindre la neutralité carbone, contre environ 17 GW aujourd’hui, selon RTE (l’organisme responsable de l’équilibre entre l’offre et la demande d’électricité dans l’Hexagone). Cela équivaut environ à 6 GW supplémentaires par an d’ici 2050.

C’est la raison pour laquelle Bruxelles cherche à favoriser les producteurs locaux et à réduire sa dépendance à la Chine, en passant ses appels d’offres au peigne fin. En avril dernier, elle a lancé une enquête à l’encontre de deux géants chinois de l’industrie du photovoltaïque qu’elle suspectait d’avoir bénéficié de subventions excessives de la part du gouvernement chinois. Les deux consortiums étaient candidats pour construire et exploiter un parc photovoltaïque en Roumanie, partiellement financé par des fonds européens, mais se sont retirés depuis…

Ainsi, en s’implantant à Montbéliard, Das Solar fait preuve de pragmatisme en se rapprochant de ses clients français et européens et en s’attirant les bonnes grâces des autorités. Le pari sera-t-il gagnant, face à ses concurrents chinois ? L’avenir le dira…

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