Aviation : Hua-Ou, le centre de formation d’Airbus à la pointe de l’innovation

Hua-Ou, le centre de formation d’Airbus à la pointe de l’innovation

C’est un peu « l’auto-école » des pilotes de ligne. Nous sommes ici au centre de formation sino-européen Hua-Ou (华欧), situé à 5 km à vol d’oiseau de l’aéroport de Pékin Capitale, dans la zone industrielle de Tianzhu.

Depuis la création en 1997 de cette coentreprise entre Airbus et la CAS (China Aviation Supplies), Hua-Ou a formé plus de 50 000 pilotes et plusieurs milliers d’hôtesses de l’air, stewards et mécaniciens.

De l’extérieur, le bâtiment ne paie pas de mine, et pourtant, il renferme six simulateurs de vol de « niveau D », c’est-à-dire les plus sophistiqués : 3 pour A320, 1 pour A330, 1 pour A350, et 1 pour hélicoptère H225.

Ces petits bijoux, qui coûtent environ 15 millions d’euros pièce, sont capables de recréer fidèlement toutes les conditions de vol possibles et imaginables (nuit, mauvaise visibilité, turbulences…), mais également une panne moteur ou un incendie dans le cockpit (avec fumées pour plus de réalisme).

Ces drôles de cabines montées sur vérins, sont occupées 365 jours par an, 20 heures sur 24, à raison de cinq sessions de 4 heures chacune, facturée environ 3 000 $ à la compagnie aérienne, que ce soit pour une formation initiale ou un maintien des qualifications de vol d’un pilote sur un type d’appareil donné.

A Hua-Ou, huit instructeurs se chargent de la théorie et une trentaine d’autres se chargent de la pratique, sachant que 95% de la formation se passe sur simulateur et seulement 5% en vol réel. De quoi rassurer les passagers ! En moyenne, il faut compter de 2 à 8 semaines de formation, selon l’expérience du pilote.

Avec la reprise progressive des liaisons longs courriers entre la Chine et l’étranger depuis la fin de la politique « zéro Covid », le centre Hua-Ou affiche complet. Et les perspectives de développement sont plutôt encourageantes, avec la méga-commande de près de 300 avions de la famille A320 passée l’été 2022 par Air China, China Eastern, China Southern et Shenzhen Airlines.

Mais l’avenir de Hua-Ou se joue peut-être aussi autour d’un mystérieux sigle : l’ « EBT », « Evidence Based Training » en anglais, ou « formation basée sur des données probantes » dans la langue de Saint-Exupéry et de Louis Blériot.

Apparue il y a quelques années déjà, cette méthode représente une petite révolution dans le monde de la formation aéronautique, pour laquelle la Chine – particulièrement stricte en matière de sécurité aérienne – s’est très tôt montrée intéressée.

Dès 2020, l’administration de l’aviation civile chinoise (CAAC) a annoncé que toutes les compagnies aériennes chinoises devraient adopter l’ « EBT » d’ici 2024, en complément de la « formation basée sur les compétences » (CBTA), qui se focalise davantage sur la capacité du pilote à gérer toutes les opérations liées au fonctionnement de l’appareil.

Mais alors, en quoi l’ « EBT » consiste-t-il au juste ? En quelques mots, il s’agit d’optimiser le maintien des compétences du pilote. Chaque pilote de ligne en activité subit des entraînements et contrôles tous les six mois. Cette nouvelle méthode permet de les rendre encore plus efficaces. Le maître mot est le développement continu des compétences « techniques et non-techniques » (prise de décision, gestion du stress…), sur la base de données objectives

Traditionnellement, les sources pour le développement des programmes de maintien des compétences sont la réglementation et les instances internationales, les constructeurs et les opérations aériennes de la compagnie elle-même. Dans le cadre de l’EBT, les données viennent également de l’historique de formation du pilote, ainsi que de ses propres forces ou faiblesses.

Le fait que l’évaluation ait lieu avant le réentrainement, et non pas après, permet de générer des données essentielles quant aux besoins du pilote, qui permettront à l’évaluateur et l’instructeur, spécifiquement formés à la méthode « EBT » de délivrer un entraînement plus ciblé. Ces données seront également utilisées pour contribuer à l’amélioration continue du système de formation.

Cette option « EBT » consiste donc à former les instructeurs et les évaluateurs, et à co-développer un programme de formation « sur mesure ». Une offre qu’Airbus est le seul à proposer en Chine pour le moment. 

En 2022, Loong Air, jeune compagnie aérienne en pleine expansion basée à Hangzhou, dont la flotte est composée à 95% d’appareils Airbus, est devenue la première cliente « EBT » de Hua-Ou. Des mots de son président, il s’agit ni plus ni moins « d’entrer dans la nouvelle ère de la formation au pilotage ».

De fait, ce partenariat s’annonce déjà extrêmement instructif. En effet, les pilotes chinois sont réputés être très à l’aise lorsqu’il s’agit d’appliquer des procédures, même les plus complexes. L’EBT permettra non seulement de renforcer ces capacités, mais également de leur donner tous les atouts pour appréhender l’imprévu… Paré au décollage !

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