Société : Normes nationales des noces et funérailles

Derniers avatars de la campagne anti-corruption, des normes sur la taille correcte des noces et des funérailles fleurissent partout en Chine. 

En tradition confucéenne, célébrer solennellement ces dates familiales est une façon d’honorer les ancêtres. Mais cette occasion permet trop souvent au cadre local d’imposer à ses centaines d’invités une contribution mal vécue. Ainsi en décembre à Pékin, Wang Cizhao, président du Conservatoire Central de musique, fut limogé pour avoir imposé à un centre artistique filiale, une ristourne imposante pour le mariage de sa fille.

Le 17 février, sur son site internet, la Commission de Discipline du Parti (CCID) appelle à normaliser à ces fêtes de famille. Son appel tente d’harmoniser les règles car, d’une province à l’autre, en parfaite cacophonie, chacune fixe ses propres plafonds. 

A Jinyang au Sichuan, pour tout résident, membre du Parti ou non, la somme des cadeaux de mariage ne doit pas dépasser 60.000 ¥. Un seul banquet est licite, et ne doit pas dépasser 69 tables – ce qui permet quand même, mine de rien, d’inviter 800 personnes. La colonne de véhicules fleuris doit se limiter à 6 limousines. Pour les rites funéraires, pas plus de 10 vaches peuvent être abattues – tandis que confettis ou « monnaies de l’enfer » (billets à brûler au cimetière) sont bannis, symbole d’un ancien régime superstitieux et révolu.
À Harbin cependant, les invités aux noces ne peuvent dépasser 200, et ceux aux funérailles, la moitié.
Dans un village du Shaanxi, en novembre, le secrétaire du Parti, voulant marier son fils, se vit refuser le nombre d’invités qu’il souhaitait – il avait beaucoup d’amis. Il finit par obtenir sa fête mémorable, mais à un prix exorbitant : il dut démissionner; sonnant ainsi le glas de sa carrière politique au nom de l’honneur familial ! 

Dans son article, la Commission de Discipline tente laborieusement de réconcilier tradition et équité : les futures normes des noces et funérailles ne doivent pas nuire à l’« intérêt national, local, ou des particuliers ». Par leur importance, ces fêtes ne doivent entraver ni « la production, ni l’éducation, la recherche ou la circulation ».

Hélas, en dépit de ces précautions, cette campagne est vécue comme intrusion dans les vies privées. Un internaute va jusqu’à même soupçonner qu’elle permettra aux cadres indélicats d’imposer aux administrés d’offrir des cadeaux, sans être invités  au banquet en contrepartie… 

C’est ainsi que cette tentative du gouvernement, de protection des citoyens contre la rapacité du hobereau rouge, finit par aboutir à une levée de boucliers des personnes concernées. Cette réaction trahit la lassitude face à la pression autoritaire toujours plus forte. Elle ajoute aussi une preuve, si besoin était, que l’enfer est toujours pavé de bonnes intentions !

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