A la loupe : Pénurie d’eau—la fin du non-durable

«S’il est un obstacle capable d’enrayer la croissance chinoise, c’est l’eau», déclare M. Komesaroff, du bureau de recherche sur les matières 1ères Urandaline. Ce commentaire résonne, alors que la sécheresse darde ses langues sur le Hunan (121.300ha), le Ningxia, le Jiangxi, et le Hubei – lequel affronte sa pire sécheresse printanière en 50 ans.

En 10 ans, la situation se dégrade. Depuis 2000, on a trop peu investi dans les économies d’eau, causant une hausse de consommation de 549,8MMm3 à 599MMm3, tandis que la part agricole n’a baissé que de 68,8 à 62%. Ce qui cache un gaspillage. 80% de cette eau à usage rural est destinée aux céréales, dont 350MMm3 sont prélevés des cours d’eau et du sous-sol, causant une baisse moyenne de la table aquifère d’1m/an voire 6m/an dans le Hebei («taxé » en eau par Pékin, pour alimenter ses 22M d’hts).

Or, du à l’obsolescence du réseau, 55% de l’eau agricole n’atteint jamais la plante et l’irrigation moderne reste rare. Pire, pour éviter les heurts sociaux, les prix de l’eau stagnent à un niveau trop bas, ne couvrant pas le coût du recyclage, à 1/10ème des tarifs européens.

Pendant ce temps, pointe à l’horizon le tarissement des réserves du Tibet, «toit du monde».

Du 8 au 10/05, le Barrage des 3 Gorges a dû, déstocker de l’eau.

Le débit a été accéléré à 7000m3/seconde, soit 1500 de plus que l’influx, afin de maintenir la navigation sur le Yangtzé en aval, lequel atteint par endroit une faiblesse de tirant d’eau historique, comme 2,87m à Wuhan le 04/05, au lieu de 4m, niveau normal de l’époque. Cet étiage si bas multiplie les risques d’échouages ou collisions. Le long du parcours navigable de ce 6ème cours mondial, des 10aines d’équipes de pilotes et remorqueurs sont déployés en urgence, et l’Etat ressort ses projets de dragage du Yangtzé, moyennant 18MM¥ d’ici 2015, de Shanghai à Nankin, pour y permettre le passage de cargos jusqu’à 50.000TJB. La baisse de débit des fleuves est une tendance ancienne : entre les périodes 1956-1979 et 1980-2000, le ministère de l’eau estime que les Fleuves Jaune, Huai, Hai et Liao ont perdu 6% en moyenne, et 17% pour les lacs locaux.

Comme pour s’arracher à la léthargie, l’État, pour 2011, émet des objectifs audacieux : réduire de 7% sa dépense en eau par point de PIB. Pour y parvenir, il veut dépenser, d’ici 10 ans, 612MM$ dans les économies d’eau, et restaurer les réservoirs, les canaux d’adduction, tout en multipliant les équipements en irrigation sélective. Les pouvoirs locaux sont astreints d’affecter 10% du produit des ventes foncières—leur principal mode de financement- aux projets de conservation.

En février dernier, Zhou Shengxian, ministre de l’environnement, avertissait que « depuis des milliers d’années, le conflit homme/nature, en Chine, n’a jamais été si sérieux qu’aujourd’hui »…

Cela dit, les experts objectent : quoique pas exorbitants, les arrosages «goutte à goutte» restent hors de portée de la plupart des paysans. Lesquels, par ailleurs, n’ont intérêt à se lancer dans cet investissement lourd, que s’ils sont assurés de ne pas perdre leur terre, techniquement bien de l’État, trop souvent confisquée par des cadres indélicats. La résolution du problème de l’eau, comme tant d’autres, semble moins dépendre d’un investissement ou d’une technologie que d’un changement de perception, du droit foncier, et de la réforme politique, aujourd’hui bloquée !

 

 

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