Temps fort : NYSE – ruée vers l’Eldorado virtuel chinois

L’entrée de Renren, groupe pékinois, au New York Stock Exchange – NYSE (5/05) a tant séduit les actionnaires américains, qu’ils ont acheté au total 61 millions d’actions pour 855 millions$ et porté sa valeur à 3,95 milliards de $. Renren n’est pas une affaire comme les autres, puisque ce qu’il vend, est de l’immatériel. Comptant 117millions de clients (25% du marché), Renren est le 1er site social de Chine, un Facebook local, qui doit beaucoup à l’interdiction en Chine de son modèle US, pour raisons politiques—comme Baidu doit beaucoup au ban sur Google, lui permettant d’empocher 75% du marché de la recherche en ligne.

Mais l’ardent accueil de Renren aux USA fait froncer les sourcils des analystes, qui crient à l’indéniaisable optimisme, comme si l’économie chinoise allait conserver ses 10% de croissance jusqu’à la fin des temps, et si Renren allait demeurer le seul site social chinois au NYSE—alors que d’autres géants, tels Kaixin001 (19% du marché) et Pengyou (18%) préparent leur entrée.

En termes de sécurité financière, Renren est plus fragile que Facebook, aux 600millions de clients et 50 milliards de $ de capitalisation. Facebook tire 93% de ses revenus de la pub, contre 42% à Renren, qui doit aller chercher la plupart de ses revenus dans les jeux en ligne. Ce qui le force à renouveler sans cesse son offre de jeux sans savoir s’ils plairont, posant ainsi une ombre sur son avenir.

De fait, Renren souffre dès ce 1er trimestre de plafonnement du chiffre d’affaires et de pertes d’exploitation. Tout comme Youku, distributeur de clips-vidéos aux performances médiocres en vie réelle, mais que compensent par leurs financements les agioteurs new-yorkais. Ces investissements traduisent la foi «yankee» dans l’expansion d’un internet chinois comptant 457 millions d’utilisateurs appelés à dépasser le milliard à terme. On voit aussi d’un genre de revanche : interdits de facto de déployer en Chine leurs groupes d’internet et des télécoms, les USA y retrouvent une présence, en apportant capitaux et technologies.

NB: Comme 13 autres sites fournisseurs d’audiovisuel piraté, Baidu se voyait la semaine passée menacé de sanctions par le ministère de la Culture. Pour y échapper, il promettait de fournir dès le 09/05 des titres légaux gratuits, en payant des droits d’auteurs.

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Émerge d’autre part, au 30/04, la refonte complète de la régulation de l’internet en un Bureau d’Etat d’information de l’internet qui centralisera les monopoles de toutes les agences publiques sous la férule du Conseil d’État : les licences et la surveillance, les jeux, vidéos, publications, livres, audiovisuel ; l’accès des particuliers à la toile, le Wifi, le téléphone-internet ; la fraude en col blanc, le hackage.

Le problème est que tous ces pouvoirs lucratifs sont aux mains de 14 ministères, qu’on imagine peu soucieux de lâcher ces prébendes.

Un autre obstacle tient au fait que l’internet, outil mondial par essence, «sera libre, ou ne sera pas »: au nom de ce principe, Washington investit 19M$ dans la diffusion de logiciels anti-censure à destination de régimes autoritaires, telle la « Grande muraille de feu » chinoise.

Enfin, la refonte du contrôle public et la vague d’entrées en bourse de groupes géants des multimédias entrent dans le grand plan de croissance de l’ économie culturelle de Li Changchun, patron de la propagande nationale—cf VdlC n°3 (XVI). Son but est de « libérer les forces productives » de la culture, « renforcer la guidance dans la création de ses produits », et «parachever d’ici fin 2012 la mutation des groupes d’État culturels-commerciaux en entreprises basées sur le marché». L’avenir tranchera.

 

 

 

 

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