Temps fort : Sécurité alimentaire: Quelque chose de pourri au royaume des baguettes…

Menottes aux poignets, impassible au spectacle de sa vie dévastée, Zheng Xiaoyu apparut mardi 29/05 à la CCTV, écoutant un juge le condamner à mort. Les faits étaient notoires : de 1998 à 2005, moyennant bakchichs (650.000² prouvés), ce patron des médicaments et aliments chinois avait parfois certifié n’importe quoi, causant les morts de 11 Cantonais en 2006 après injection de faux anti-biotique, de 13 nourrissons en 2004, nourris au faux lait maternisé —et d’autres !

Le verdict sera-t-il appliqué ? Si le juge d’appel confirme, ce serait la 1ère exécution d’un ministre depuis 2000. Le top niveau veut « tuer le poulet pour faire peur au singe » – faire un exemple. L’exaspération de l’Etat contre ses cadres déloyaux est au comble, suite aux scandales qui lui reviennent en boomerang d’outre-Pacifique, faux aliments pour chiens, ou poisson-chat chinois avarié, faux dentifrice… En Chine même, les scandales de qualité des aliments se succèdent, témoignant d’une lourde crise et de laisser-aller : oeufs teintés à l’amarante cancérigène,  pesticides dans les légumes, antibiotiques dans la viande, le miel… En 2005, 34000 intoxications collectives étaient dénombrées. Cette année, sur les 450.000 usines alimentaires du pays, un tiers n’avait pas de licence, et 60%, pas de laboratoire…

La SFDA (State food and drug Administration) se réveille : les 170.000 licences de remèdes vont être révisées. Dans l’alimentaire, 90 inspecteurs sont en route vers 15 provinces pour traquer les fraudes repérées. Un règlement national sera prêt en décembre, imposant le rappel des produits dangereux. Mais, remarque J. Harkness, Président de l’IATP (ONG américaine, de référence mondiale, en matière de législation agroalimentaire), le vrai problème n’est pas abordé : l’encadrement hygiénique et phytosanitaire de la production. Harkness craint que la Chine suive le modèle des USA, confiant au marché la charge de la sécurité alimentaire. Pékin aurait notamment commis une erreur en planifiant, d’ici 2008, le remplacement des marchés par les supermarchés, estimés « de facto » propres et modernes.

Dernière tendance, pas la plus rassurante : comme par «oeil pour oeil», l’administration frappe aussi l’importé. Cinq conteneurs d’eau d’Evian (Danone) sont bloqués depuis février pour «excès bactériel», 30 tonnes de poissons australiens congelés sont refusées à Canton, pour trop de métaux lourds. Mi-2005, après le drame du lait maternisé, Nestlé avait vu deux de ses marques de lait en poudre interdites quelques mois, pour «excès d’iode». Destiné au public, le message est implicite: l’insécurité n’est pas que chinoise—pas la peine d’acheter étranger !

 

 

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