Santé : Grippe aviaire – le retour du spectre

Depuis 2005, date d’apparition du virus H5N1 de la grippe aviaire, plus une année ne passe en Chine sans incidents liés à ce nouveau virus. Pourquoi la grippe aviaire démarre-t-elle invariablement en Chine ? Il se trouve que le pays, surtout au Sud, vit dans une forte promiscuité rurale, où l’habitat humain jouxte de façon précaire un fort élevage de volailles, milieu favorable aux échanges génétiques entre les deux espèces. 

L’apparition en mars 2013 d’une nouvelle souche H7N9 n’est donc pas vraiment étonnante. Mais sa virulence prend les experts de surprise : il totalise à ce jour 290 cas (dont 115 depuis le 1er janvier 2014), et 66 décès. 5 à 10 nouveaux cas par jour sont actuellement recensés par l’Organisation Mondiale de la Santé.

Cette période du Chunjie est donc un pic. A cela, on compte plusieurs facteurs favorisants :  le va-et-vient entre extérieur glacé et intérieur surchauffé rend les organismes plus vulnérables ; ‚ les 280 millions de migrants qui retournent au foyer par bus ou par train, font un «bouillon de culture» incontrôlable ; ƒ la tenace tradition chinoise, « au nom des ancêtres », d’acheter le poulet vivant et de l’abattre à domicile, est un facteur déterminant de transmission. 

Le virus est foudroyant : le nombre de décès atteint 66, et 25 en 2014, soit 21% dans les deux cas (en comptant Hong Kong et Taiwan). Et contrairement au H5N1, le H7N9 ne provoque aucun symptôme sur la volaille, ce qui rend le mal indétectable, sauf par test épidémiologique. Or sur les volatiles cantonais exportés sur Hong Kong, les tests chinois semblent avoir été pris en défaut fin janvier 2014. Par contre, les services vétérinaires de Hong Kong ont détecté le germe pathogène et imposé d’emblée l’abattage des 20.000 poulets et canards, tout en bannissant l’importation pour 3 mois. 

Fortement touchée par l’épidémie, Shanghai a emboité le pas. D’autres métropoles annoncent les mêmes mesures prophylactiques. Parmi les habitants, même à la campagne, la nervosité est palpable. Pour autant, les autorités chinoises et l’ OMS rassurent : il n’y a aucune preuve à cette heure, de la capacité de ce H7N9 à passer d’humain à humain – tous les cas suspects étudiés ont pu être associés à un contact avec des oiseaux d’élevage. Instruits par l’expérience du SRAS en 2003, les pouvoirs locaux (Center for Disease Control – CDC, ministère de la Santé) semblent pratiquer la transparence et bien communiquer les progrès du virus. On trouve malgré tout des internautes, autour de Harbin, qui dénoncent une sous-évaluation notable dans les chiffres officiels de contamination dans leur région.

Et puis voilà qu’arrive, en plus du H7N9, une nouvelle souche, le H10N8. Il a déjà contaminé à Nanchang au Jiangxi (une femme de 73 ans, décédée le 06/12). Très agressif sur l’organisme, il résiste aussi aux anti-virus tel le Tamiflu. A l’OMS, on prend pour l’instant la nouvelle sans angoisse : cette souche nouvelle n’est pas (encore) capable de passer d’humain à humain. Toutefois au CDC de Pékin, le professeur Shu Yuelong avertit : « le potentiel d’agression du H10N8 ne doit pas être sous estimé ». 

De son côté, évaluant devant le Sénat américain les risques liés au H7N9, un haut cadre américain avertissait le 29/01 : « en cas d’éruption hors contrôle, la pandémie meurtrière atteindrait les 5 continents en moins de 6 mois, et durerait 2 ans ». Face à un tel danger, entre virus et humanité, une course contre la montre semble ainsi engagée, dont l’issue reste encore incertaine.

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