A la loupe : Réforme politique – deux hirondelles ne font pas le printemps!

Plus encore que l’armée, le Parti communiste demeure la grande muette, aux 80M de membres toujours alignés et non critiques. Mais les choses évoluent : selon la CASS (Académie chinoise des Sciences Sociales), dès fin 2007, 55% d’apparatchiks intermédiaires étaient demandeurs de réforme politique, contre 40% en fin 2005.

Le 17/02 vit la sortie en kiosque d’un rapport excitant et décevant à la fois. Sous l’autorité de l’Ecole du Parti, « Prendre d’assaut la forteresse » se veut un «plan intégral de réforme du système politique». En 12 ans, selon Zhou Tianhong et Wang Changjiang, la Chine se muerait en une «société civile moderne», tandis que l’«état de droit» et la «démocratie mature» attendraient quelques décennies de plus.

 [1] le Parti devrait partager des compétences civiles avec les ONG, media et églises.

2] L’ANP, l’Assemblée nationale populaire, serait souveraine pour la fixation du budget de l’Etat et son audit.

3] Les membres du Parti devraient devenir égaux avec les citoyens devant la loi.

Avec tels axes, ce document reste très en deçà de la démocratie occidentale : ni élections, ni multipartisme, et le Parti se réserve le processus stalinien de décision par l’”élite”. Il contient même des contradictions intenables. Wang propose le renforcement de la démocratie interne et de campagnes électorales à tous les niveaux parlementaires, tandis que Zhang, l’économiste, préconise la suppression du niveau de base, le seul où un zeste de suffrage universel ait été saupoudré… Au moins, les auteurs tentent de remédier aux excès du système, et appellent avant tout à la liberté de presse. Par là-même, ils évoquent un puissant et secret débat interne sur la démocratie: sujet qui cesse d’être iconoclaste.

Confronté à cette effervescence, le pouvoir reste impassible en apparence, confirmant la réticence du n°1 Hu Jintao à mettre le doigt dans l’engrenage des réformes – le spectre de Gorbachev hante… China Daily chante les louanges des auditions publiques (consultations populaires). He Guoqiang, patron de la CCID (Commission centrale d’inspection de la discipline), entonne la vieille antienne, jamais réalisée, d’“établir un système loyal, éradiquant la corruption à la racine”. Pékin garde le cap d’une modernisation exclusivement technocratique, peaufine son projet de super ministères, mais on sait déjà qu’il ne sera pas mur pour la session du Parlement en mars. Ministères, provinces et Grandes entreprises d’Etat, font barrage pour le retarder. Et pourtant, rien ne prouve qu’un super ministère, une fois en place, soit plus “vertueux” qu’eux, plus capable de défendre d’abord l’intérêt de la nation, plutôt que les privilèges des fonctionnaires : ainsi, avant même d’être en activité, ce projet de Wen Jiabao d’administration plus propre et compétente, souligne à la fois ses lacunes, son urgence, et les puissants freins conservateurs à toute réforme politique. Au moins, la tentative aura le mérite de clarifier les choses : pour réformer, il faut déconstruire !

 

 

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