Automobile : Volkswagen quitte le Xinjiang

Volkswagen quitte le Xinjiang

C’est un départ qui semblait inéluctable. Face à la pression internationale et aux controverses entourant l’internement en « camps de rééducation » de plus d’un million de membres des minorités musulmanes du Xinjiang (essentiellement des Ouïghours), le géant automobile Volkswagen a finalement annoncé le 27 novembre, la vente de son site industriel en banlieue d’Urumqi, la capitale provinciale, ainsi que d’une piste d’essai à Turpan, dans le désert, à 240 kilomètres de là.

Il faut dire que la présence d’une ligne de production dans le « Far West » chinois était devenue difficile à justifier pour Volkswagen. Le groupe a été accusé d’avoir passé un accord avec la police locale prévoyant une « formation patriotique » et un « entraînement militaire » à des travailleurs de l’usine, mais aussi d’avoir commandité un audit externe concluant à une « absence de problèmes » sans avoir pu réaliser les inspections nécessaires sur le terrain…

Mais s’extirper du Xinjiang sans froisser les autorités n’est pas chose facile pour les groupes étrangers. Les autorités chinoises interprètent en effet leur présence dans la région comme une validation de leur campagne de répression et, à l’inverse, considèrent leur retrait comme une critique implicite. En 2021, la marque suédoise de fast-fashion, H&M, avait payé le prix fort (boycott des consommateurs, disparition des plateformes de e-commerce…) pour avoir décidé de cesser de se fournir en coton du Xinjiang.

Le chimiste allemand, BASF, s’en est mieux tiré lorsqu’il a annoncé en février dernier, son retrait de deux JV dans la région autonome – peut-être car le groupe venait d’annoncer quelques jours plus tôt un investissement record (10 milliards de $) dans une nouvelle usine dans le Guangdong…

De la même manière, Volkswagen et son partenaire SAIC, groupe automobile étatique de Shanghai, ont saisi l’occasion de l’annonce de la reconduction de leur coentreprise jusqu’en 2040 pour faire savoir que les sites du Xinjiang ont été vendus à un autre groupe public chinois dans le cadre d’un « réalignement stratégique ».

Cette vente est sûrement un soulagement pour le groupe automobile allemand qui va pouvoir se libérer des risques politiques que représentaient de tels sites, tout en réduisant ses capacités de production à une période où ses ventes en Chine ralentissent. Après tout, l’usine était à l’arrêt depuis déjà 5 ans… Signe des temps : depuis 2023, VW n’est plus le plus gros vendeur automobile du marché chinois, dépassé par son rival de Shenzhen, BYD.

Volkswagen n’est pas le seul dans ce cas. General Motors serait en discussion avec son partenaire, SAIC, pour la fermeture d’une ou plusieurs usines. Honda, allié avec GAC, est déjà passé à l’acte le mois dernier.

Selon un analyste d’UBS, si les constructeurs étrangers continuent ainsi de perdre des parts de marché, ils pourraient être contraints de réduire leurs capacités de production en Chine de 10 millions d’unités et perdre 20 milliards de $ chaque année.

L’heure est donc à l’introspection et au changement de stratégie s’ils veulent continuer d’exister sur le marché chinois. Pour beaucoup, cela passe par de nouveaux investissements en R&D dans l’Empire du Milieu et par la création de coentreprises avec des fabricants chinois de batteries et autres technologies associées. Car le verdict est implacable : des mots d’un commercial d’une concession automobile shanghaienne, « les constructeurs étrangers sont à ce stade incapables de développer des voitures électriques qui correspondent aux attentes des clients chinois ».

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