Environnement : La vie en vert

Entamé depuis 2012, l’effort de l’Etat pour lutter contre les différentes pollutions (air, eau, sol) en ville et en campagne, est réel, avec de nombreuses initiatives volontaristes. 

Le 27 juin, le bureau du Parlement adoptait deux révisions de lois. Celle de prévention de la pollution aquatique porte à 1 million de ¥ l’amende pour rejet d’effluents à proximité d’une source d’eau, et à 200.000 ¥ celle aux pouvoirs locaux qui refusent de publier leurs données sur la qualité de l’eau (obligatoire tous les trois mois au moins). De plus, sur tout cours d’eau, un cadre occupera désormais la fonction de « chef de rivière », responsable de la prévention, protection et mitigation de la pollution – avec promotions ou sanctions à la clé.

La loi de pollution du sol est également revue : elle ouvre le principe « pollueur-payeur » et impose aux provinces comme aux mairies de présenter des plans de prévention au ministère. Elle les autorise à classer sous « protection prioritaire » des zones spécialement dégradées, y interdisant pâturages ou cultures intensives, et y encourageant au contraire l’assolement triennal, la reforestation et le retour à l’état de lande ou prairie.

  L’amende pour enfouissement de produits dangereux non traités, passe à 2 millions de ¥. Un cadastrage de pollution est en cours, dont le bilan sera publié en 2020. Celui de 2013 avait fait apparaître 3,3 millions d’hectares contaminés (par effluents industriels, déchets miniers et usage excessif de pesticides et engrais), inaptes à toute agriculture. Quoique possible, leur mitigation par filtrage des sols prendra beaucoup de temps, vu son coût évalué à 1000 milliards de ¥ (150 milliards de $). En 2016, pour de tels chantiers de réhabilitation, l’Etat mettait sur la table 14,6 milliards de ¥ – une goutte d’eau (propre) dans la mare (cloaque) !

Ces lois révisées arrivent en même temps que le nouveau ministre de l’Environnement : Li Ganjie, 52 ans, formation d’ingénieur nucléaire à Tsinghua, la pépinière d’élites. La priorité du ministre ira au Hebei (où il vient de passer 6 mois comme vice-secrétaire du Parti) – province aux six villes les plus polluées du pays en 2017. Son prédécesseur Chen Jining, du même âge que Li et diplômé de la même université, passe vice-maire de Pékin.

L’investissement pour la décarbonisation est une difficulté classique des firmes et provinces : où trouver les fonds, dans un environnement d’affaires très dur, pour ces investissements non liés à un renforcement de productivité ou de qualité du produit ? Ici, toute erreur d’évaluation peut s’avérer fatale.

Certes, avant la fin de l’année se prépare le lancement du marché carbone national, défi vert ambitieux, où toute collectivité, usine ou grande exploitation agricole recevra des crédits d’émission de dioxyde de carbone (CO2), dont elle pourra revendre en bourse les reliquats, à ceux qui n’auront pu tenir leur quota. À moyen terme, ce sera l’incitatif à investir dans une production propre. Mais cela prendra du temps—l’Etat devra convaincre des millions d’entités polluantes à jouer le jeu, en leur offrant d’abord des quotas généreux. Sur les 10,4 milliards de tonnes de CO2 que la Chine relâchait en 2015 (1er pollueur mondial), ce système né de la fusion de 8 bourses locales (avec celle du Fujian, dernière née), en gérera 50%.

En attendant donc, les acteurs de la décarbonisation doivent trouver des crédits. En coopération avec la Banque Asiatique de Développement (BAD, entité internationale), quatre organes du Conseil d’Etat lancent une plateforme financière « verte » d’investissement dans la production à bas carbone. Ces organes sont deux fonds publics (l’I&G et la SDIC), le ministère des Finances et la NDRC, chef d’orchestre de l’économie nationale. Les besoins nationaux en crédits de décarbonisation sont estimés à 3000 à 4000 milliards de ¥/an, dont l’Etat n’est en mesure de payer que 10 à 15%. Mais il croit savoir que ce montant de financement de projets (validés par lui-même), inciteront le secteur privé à suivre.

Les banques doivent créer des prêts « verts » aux assujettis aux crédits carbone ou aux (futurs) quotas d’usage de l’eau pour leur permettre de s’équiper. Les assurances doivent développer des polices « spéciales-bas-carbone ».

Pour développer cette « finance verte », cinq zones pilotes ont été désignées, chacune pour tester différentes pistes. Canton testera les crédits à l’économie d’énergie et la réduction d’émissions, tout comme Zhejiang et Jiangxi. Le Xinjiang, Far-West chinois, travaillera avec les banques internationales sur l’export de technologies à bas carbone vers l’Asie Centrale, en lien avec le plan national « OBOR », ou « une ceinture, une route », des nouvelles routes de la soie. Le Guizhou se spécialisera en financement du retraitement de déchets agricoles, une forte source de pollution et un chantier majeur de l’antipollution chinoise. Plus de 50% des porcs sur Terre, sont élevés en Chine, et la totalité de l’élevage génère 3,8 milliards de tonnes de déjections, dont 40% non traitées. Yu Kangzheng, vice-ministre de l’Agriculture lance un programme de subventions pour renforcer de 50% l’usage de ces déchets comme fertilisant des vergers, potagers et plantations de thé – 500 districts et 200.000 mégafermes bénéficieront du plan.

D’autres initiatives « écologiques » se retrouvent au niveau du système judiciaire, qui commence à condamner à des peines carcérales les cadres faussant sciemment les statistiques de pollution.

En résumé, la longue marche verte, en Chine va tous azimuts ! 

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