« L’examen d’entrée à l’université le plus difficile ». Telle est la façon dont l’édition 2024 du « Gāokǎo » (高考), le « baccalauréat chinois », a été présentée. Spécificité de cette année : les étudiants ont pu choisir parmi différentes « spécialités » comme l’histoire et la physique, ou encore la politique, la géographie, la chimie et la biologie, en plus du Chinois, des mathématiques et de l’anglais – les trois matières obligatoires. Adieu donc les filières comme « sciences humaines » ou « scientifique » ! Mais pas de « Parcour’Sup » pour les lycéens chinois pour autant : c’est leur score au « gaokao » qui déterminera leur entrée (ou non) dans les meilleures universités du pays. Voilà pourquoi chaque année, la pression est à son comble au mois de juin, l’examen étant considéré comme déterminant pour l’avenir professionnel des jeunes Chinois.
Sauf que cette année, le « gaokao » était apparemment un peu plus difficile par rapport aux éditions précédentes. En effet, ils étaient 13,42 millions de lycéens à se présenter à l’examen – un record (cf graphique). Ce chiffre était en hausse pour la 8ème année consécutive avec 510 000 élèves de plus qu’en 2023 (+3,95%).
Parmi ces candidats, 4,13 millions ont « redoublé ». Derrière ce terme plutôt péjoratif en France, se cachent souvent en Chine des élèves déterminés à obtenir une meilleure note comparée à leur première tentative. Pour cela, certains d’entre eux n’hésitent pas à s’inscrire dans des écoles de « bachotage » réputées pour le score élevé de leurs étudiants. Une démarche que les autres candidats perçoivent d’un bien mauvais œil…
Autre facteur censé augmenter la difficulté de l’examen : l’accent mis cette année sur l’esprit critique, le « gaokao » étant souvent blâmé pour valoriser uniquement l’apprentissage « par cœur ». Cette évolution n’a pas été du goût des élèves qui ont dû cogiter sur le thème de l’intelligence artificielle. Même si les sujets de dissertation sont souvent inspirés de l’actualité, ce thème dans l’air du temps n’a pas fait l’unanimité : « je me suis converti en livreur Meituan quelques secondes après l’examen », s’apitoyait avec humour un candidat sur Internet. « Comment des élèves issus de zones reculées, n’ayant jamais été exposés à l’IA, sont-ils censés débattre d’un sujet qu’ils ne connaissent pas ? », s’indignait un parent.
Que les élèves le veuillent ou non, l’IA faisait déjà partie intégrante de leur « gaokao » puisque plusieurs provinces ont opté pour cette technologie afin de détecter la triche, le plagiat et autres comportements suspects via la vidéo-surveillance des salles d’examen.
Enfin, comme si bachoter des milliers d’heures pour préparer son « gaokao » ne suffisait pas, les étudiants devront désormais se préparer à affronter un marché de l’emploi pour le moins « hostile », où le chômage des jeunes atteignait 14,7% en avril, après révision de la méthode officielle de calcul, et était de 21,3% en 2023. Une perspective qui les pousse de plus en plus à retarder leur entrée sur le marché du travail et qui pourrait presque leur faire regretter le (bon vieux) temps du « gaokao » !
Sommaire N° 20 (2024)