Spatial : Pékin en colère contre le projet Starlink d’Elon Musk

Pékin en colère contre le projet Starlink d’Elon Musk

La station spatiale chinoise est passée à moins de 4 kilomètres de la catastrophe. Selon Pékin, cette dernière a dû effectuer à deux reprises ces six derniers mois, des manœuvres pour éviter une collision en orbite basse (moins de 550 km de la surface terrestre) avec deux des 1900 satellites du constructeur américain Starlink.

Cette méga-constellation, qui devrait atteindre les 12 000 puis les 42 000 satellites à terme, est destinée à fournir une connexion internet dans des zones reculées. C’est un des principaux projets d’Elon Musk, aux côtés des voitures électriques Tesla et des vols spatiaux de SpaceX.

Indignée par la « grave menace » que ces engins ont fait planer sur la vie de ses trois taïkonautes à bord de la station spatiale chinoise, la Chine a porté l’affaire devant le Bureau des affaires spatiales de l’ONU début décembre, accusant les États-Unis de « manquer à leurs obligations internationales ».

Si les autorités chinoises n’ont pas explicitement mentionné Elon Musk dans leurs réclamations, le milliardaire américain, pourtant très populaire dans l’Empire du Milieu, n’a pas été épargné par les internautes chinois. « Ça ne manque pas d’ironie : les Chinois achètent des Tesla, donnant de l’argent à Musk pour qu’il lance des satellites et les jette contre la station spatiale chinoise », pointait l’un d’entre eux. La menace d’un boycott plane sur Tesla, qui réalise un quart de ses ventes mondiales en Chine.

Ce n’est pas la première fois que les satellites Starlink font l’objet de récriminations. Outre la lumière réfléchie par leurs panneaux qui nuirait à l’observation spatiale, le 44ème satellite Starlink avait également frôlé début septembre 2019 le satellite européen Aeolus, censé améliorer les mesures de la vitesse du vent. La possibilité d’une collision était alors d’une sur 1000, dix fois plus que lorsque l’Agence Spatiale Européenne (ESA) avait adressé sa première alerte à SpaceX quelques jours plus tôt – sans effet sur la trajectoire du Starlink 44…

Ces collisions évitées de justesse mettent en avant l’absence de réglementation internationale pour gérer ce genre de situation.

Selon l’Université britannique de Southampton, les satellites d’Elon Musk sont impliqués dans environ 1 600 rencontres rapprochées (moins d’un kilomètre) entre deux engins spatiaux (la plupart du temps d’autres satellites Starlink) chaque semaine, soit la moitié des incidents de ce type.

Même si SpaceX a affirmé avoir « ajusté » les orbites de ses satellites afin de réduire la possibilité de collisions, le risque qu’un tel événement se produise ne cesse de s’accroître à chaque nouveau lancement.

C’est sans compter sur les dizaines de milliers de « débris orbitaux » qui encombrent l’orbite basse de la Terre. Mi-novembre, cette problématique a suscité l’attention mondiale après un tir d’essai d’un missile anti-satellite par la Russie sur un de ses anciens appareils encore en orbite. La destruction de l’objet a provoqué la création d’un nuage de débris menaçant la station spatiale internationale (ISS). La Chine elle-même a procédé à un tir similaire en 2007, à l’origine de nombreux débris.

La question de l’augmentation des débris spatiaux pourrait devenir aussi cruciale que celle du réchauffement climatique, à en croire certains experts. Au fur et à mesure que l’espace disponible se réduit sur certaines orbites convoitées, les tensions entre les États-Unis et la Chine, les deux pays aux programmes spatiaux les plus actifs, sont amenées à augmenter. Pékin blâmera les USA pour les « vieux déversements », tandis que Washington condamnera la Chine pour les déchets « récents ».

Cette même thématique avait donné lieu à un échange de reproches entre Pékin et Washington il y a quelques mois. En mai 2021, la Maison-Blanche avait dénoncé la « négligence » de la Chine, qui a laissé s’écraser sur Terre 10 tonnes de débris de la fusée Long March 5B. Un mois plus tôt, c’était un lâcher dans l’espace de plus de trois tonnes de détritus par la station internationale (ISS), qui suscitait l’ire de la Chine.

Malheureusement, cette concurrence fait obstacle à toute coopération internationale autour du problème des débris spatiaux et de leur nettoyage, en partie parce que les technologies de suivi ont des applications militaires

Dans un tel contexte, on peut s’interroger sur la manière dont Elon Musk compte s’y prendre pour continuer à vendre autant de Tesla en Chine tout en mettant au point pour le compte du Pentagone un satellite capable de détecter les nouveaux missiles hypersoniques de l’Armée Populaire de Libération.

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