Editorial : Splendeurs et misères de la crise en Chine

[1] Automobile US : la curée chinoise ? « SAIC (Shanghai Automobile Industry) et Dongfeng ont la capacité et l’intention d’acheter certains actifs des deux groupes américains en difficulté», Chrysler et General Motors : cette véritable bombe était lancée le 18/11, 8 jours après que les constructeurs chinois ait reçu le permis d’investir hors du pays. L’annonce est pour le moins prématurée, mais l’origine de la fuite (un cadre du MII, le ministère des Industries de l’Information, le super ministère de tutelle) lui donne du poids : Dongfeng, SAIC appartiennent à l’Etat, qui les finance à sa guise.  En quasi-faillite, GM et Chrysler ont peu de chance d’obtenir les 25MM$ qu’ils réclament, et même en ce cas, la rallonge ne ferait que retarder l’amère issue. Washington ne pourrait pas non plus s’opposer à la reprise -toujours meilleure que le démantèlement. Pour la Chine, ce rachat ouvrirait enfin la porte à l’export (que ses partenaires de JV lui dénient), et la technologie qui lui manque. Surtout, avaler ces marques emblématiques, signifiera jouer d’égal à égal, dans la cour des grands!

[2] Emeutes. Les 17 et 18/11, Longnan (Gansu) vécut sous des émeutes d’une choquante violence. Ses 2,7M d’âmes s’insurgeaient contre le rasage du centre-ville, imposé à la hussarde. Durant 48h, 20.000 émeutiers pillèrent le bâtiment du syndicat, celui du Parti, brûlèrent voitures et motos, lapidèrent les policiers. Pourtant, la mairie semblait de bonne foi, en imposant cette mesure à titre de sécurité : le 12 mai, le séisme avait aplati une partie de la ville, causant 275 morts…

Or, d’autres émeutes éclatent sporadiquement partout en Chine. Le spectre du chômage hante les esprits. Yin Weimin, ministre des affaires sociales annonce que «la stabilisation de l’emploi est la priorité n°1». Mais quand la crise arrive, les faiblesses du tissu social viennent soudain menacer la précaire stabilité. Selon ce rapport juste paru, de l’Institut de développement et de réforme, «les inégalités ont renforcé les obstacles à la croissance». Le fossé riches/pauvres commence à  menacer le ressort du développement, et la seule parade, pour Pékin est de renforcer l’accès des pauvres à la santé, l’éducation et la couverture sociale, le grand échec des années ’90 de Jiang Zemin. C’est justement ce qu’il tente  de faire à présent avec le grand plan anti-crise.

Il y a plus grave: un sondage de 6277 internautes par Sina.com établit que 96% des Chinois croient que l’injustice vient du pouvoir. Wu Xuecan, ex-journaliste au Quotidien du Peuple, évoque une entreprise de joaillerie qui serait possédée par l’épouse du 1er ministre, une compagnie d’assurance supposément propriété du fils, un contrat de 10MM¥ qui aurait été octroyé au fils du Président de la RPC. Tout cela, les Chinois croient le savoir, se le disent sur internet, hors censure, faisant gronder la colère!

[3]Baidu, main dans le sac: Baidu, n°1 de la recherche en ligne, est sous le coup de multiples accusations d’avoir biaisé les données sur les firmes qui acceptaient de le payer sous la table. Tel Sanlu, le laitier à la mélamine dont il avait caché les fautes jusqu’à ce qu’éclate le scandale. Le site médical Qmyyw. Com porte plainte contre lui, réclamant 171M¥ de dommages pour distorsion d’image. Baidu s’excuse platement. Mais l’affaire éclaire le lien délétère entre censure et délit commercial : ayant reçu de l’Etat le pouvoir de censure «franchisé», Baidu l’a détourné à ses propres fins…

 

 

 

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