Editorial : Trois regards neufs sur la Chine

Sous ce printemps précoce, voici trois regards neufs, bourgeons de la Chine de demain :

[1] Gorgées de devises, les banques, assurances, fonds de pension et firmes chinoises accélèrent les rachats d’actifs en Europe. Des deux côtés, les règlements s’assouplissent, telles les 85, bientôt 125 mesures préférentielles (baisses d’impôt, subventions), présentées par Clara Gaymard, ministre des investissements étrangers en France, de passage à Pékin le 20/3. En France, ces rachats chinois de 150M², sextupleront d’ici fin de l’année: montants encore modestes, souvent en R&D, mais préludes à des investissements industriels !

[2] Côté socio-économie, le professeur Li Qiang (université Qinghua, Pékin) vient d’évaluer le recensement de l’an 2000, et sonne l’alarme : une infime minorité s’enrichit, le reste stagne.

Li a classé 640.000 citoyens recensés, selon leur richesse, évaluée à travers la norme mondiale ISEI.

84% sont déclarés très pauvres ou pauvres, à moins de 31 points (paysans, recycleurs d’ordures, migrants). 10,3% sont très modestes, à 33-38 points : les métiers de transport et ouvriers. Les cols blancs suivent, 5% (journalistes, enseignants, commerçants).

Enfin, moins de 5% se partagent les positions de 43 à 88 points : professeurs, managers, cadres… Ce « gratin » salarial est d’autre part capable de s’enrichir en secret, via la corruption (15% du PIB, selon l’expert Hu Angang). Mécanisme qui n’apparaît pas dans ce recensement. Le déséquilibre pourrait donc être plus grave que ne laisse apparaître l’étude de Li Qiang, qui conclut pourtant que cette structure démographique déséquilibrée, est parmi les plus instables au monde.

NB : cette analyse est identique à celle de He Qinglian (cf VdlC n°35 de 1998), journaliste et économiste en exil.

[3] Après 3 ans d’OMC (Organisation mondiale du commerce), quel est le fruit de l’expansion chinoise dans le monde?

Selon la Mission Economique française et l’étude en cours de publication par l’OMC, 2005 constitue un triomphe commercial, avec 102MM$ d’excédent et 7% du marché mondial (double de 1999). Mais cet excédent cache un déficit envers Taiwan (58MM$), Corée (42MM$) et Japon (16,5 MM$).Ensemble, ils fournissent 30% de l’import chinois, surtout en pièces vitales de téléphone et d’ordinateurs, dont l’export chinois explose: 58MM$ pour les ordinateurs, contre 13MM$ en 2004 ! Il faut noter dans cet export, sa faible valeur ajoutée (26%) et sa domination étrangère croissante (59%).

Enfin, l’OMC recommande à Pékin de libéraliser ses services et sa monnaie, et de lutter contre la piraterie. Sans quoi, l’objectif de 100M d’emplois neufs en 10 ans, quoique incontournable, ne sera pas atteint !

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