Politique : Les deux Assemblées — Les nominés sont…

Comme chaque année, les « deux Assemblées » (两会- liǎnghuì), Conférence Consultative Politique du Peuple Chinois (CCPPC de 2158 membres) et Assemblée Nationale Populaire (ANP, 2800 membres), siègeront du 3 au 13 mars et du 5 au 15 mars. Cette session permettra au régime de présenter le gouvernement tout frais promu pour le quinquennat qui débute après avoir renouvelé lors du 19ème Congrès en novembre les organes du Parti.  

A la CCPPC, c’est le remue-ménage : 63% des membres partent en retraite ou sont remplacés par des édiles considérés comme plus fiables ou plus présentables. Parmi les écartés figurent Mao Xinyu le fantasque petit-fils du Grand Timonier, Li Xiaolin fille de l’ex-1er ministre Li Peng, Liu Xiang le médaillé olympique aux 110m haies, Mo Yan le prix Nobel de littérature, Chen Kaige l’emblématique cinéaste. Aucun suspense n’est à attendre pour les Présidences de ces organes – arrêtées depuis le 19ème Congrès : l’ANP sera dirigé par Li Zhanshu le n°3 du Parti (67 ans), et la CCPPC par Wang Yang le n°4 (62 ans).

Sans surprise, Wang Qishan, l’ex-gourou de la CCID, devrait faire son come-back. Ayant atteint la limite d’âge de 69 ans au 19ème Congrès, il s’était retiré de tous ses mandats—même de son siège au Comité Permanent, l’organe suprême. Cette « application » apparente de la règle avait permis à Xi Jinping de forcer le départ à la retraite de 4 autres compagnons de Jiang Zemin pour la plupart. Mais à peine ces adversaires remisés, en un tour de passe-passe, voilà Wang Qishan de retour, imminent vice-Président de la République.

Li Yuanchao (67 ans), qui tient le poste de vice-Président encore pour quelques jours, était un proche de l’ancien Président Hu Jintao. Il n’en avait pas fallu plus pour qu’il reste sur le banc de touche tout au long du quinquennat précèdent, pour finalement perdre son poste au Comité Central de novembre 2017. Il est rarissime qu’un homme à ce niveau de l’appareil, soit privé du droit à exercer son second mandat. Jusqu’alors la charge de vice-Président était honorifique. Avec Wang Qishan, elle devrait prendre une autre envergure. Proche de Xi depuis la Révolution culturelle, expert des USA où il connaît comme sa poche les sphères dirigeantes, il devrait suivre les relations sino-américaines pour tenter de mitiger les menaces de guerre commerciale de Trump. Et bien sûr continuer à conseiller Xi dans la lutte anti-corruption.

Li Keqiang (62 ans) est si marginalisé qu’il n’est plus besoin de l’écarter—il peut rester Premier ministre. Mais il devrait être flanqué de quatre ou cinq vice-Premiers. Le vice-1er « exécutif » serait Han Zheng, (63 ans), ex-maire de Shanghai (2003-2012). Membre du Comité Permanent, ce lieutenant de Jiang Zemin, ayant réussi son réalignement à Xi Jinping, devrait entre autres être en charge de la protection environnementale et de l’organisation des JO de 2022. Mais ce « rallié » n’appartient pas à la garde rapprochée de Xi. Il devrait donc perdre l’initiative Belt & Road (BRI), dont son prédécesseur Zhang Gaoli avait la charge. Au passage, le cas de Han Zheng est là pour rappeler que dans l’avancement, l’ancienneté conserve ses droits, et que Xi Jinping doit faire des compromis avec les autres tendances.

Seule femme au Bureau Politique, Sun Chunlan, 67 ans, recevrait aussi ce « bâton de maréchal » de vice-première, dans la foulée de Mme Liu Yandong. Elle gérera l’éducation, la culture, la santé, les sports (y compris la réforme du football).

Hu Chunhua, 54 ans, qui était le poulain de Hu Jintao pour succéder à Xi Jinping en 2022, est pressenti au poste de vice-Premier, avec le portefeuilles de l’agriculture et en charge du programme, cher à Xi, de lutte contre la pauvreté (Hu étant lui-même issu d’une famille extrêmement pauvre du Hubei). Un lot de consolation pour la perte de ses chances de succession…

Bras droit de Xi en affaires économiques, Liu He (66 ans) devrait reprendre la charge de vice-Premier de Ma Kai, dans la finance, l’industrie et les transports. Il deviendra le Président du Comité de Développement de la Stabilité Financière, alors que la rumeur d’une fusion des tutelles de la banques, de l’assurance et peut-être de la bourse, enfle. Liu est aussi bien placé pour récupérer le portefeuille de l’initiative Ceintures et Routes (BRI). Le 24 janvier à Davos, Liu assurait que la Chine allait s’ouvrir économiquement cette année « d’une ampleur que nul ne soupçonne pour l’instant ». Enfin, juste avant l’ouverture des deux assemblées, Liu He se trouvait en mission à Washington pour rassurer Trump sur les projets à long terme de Xi Jinping et aussi négocier des concessions commerciales dans l’espoir d’éteindre la mèche déjà allumée d’un conflit commercial sino-américain. 

Yang Jiechi le diplomate conseiller d’Etat (67 ans) aurait également des chances de devenir vice-1er. Ce serait une première fois dans l’histoire du pays que les Affaires étrangères soient représentées à si haut niveau du gouvernement. Wang Yi (64 ans), l’actuel ministre des Affaires étrangères, reprendrait le poste de conseiller d’Etat de Yang. Lui succéderait son n°2 Zhang Yesui, (64 ans) ancien ambassadeur aux USA (2010-2013) et auprès des Nations Unies.

L’actuel ministre des Finances Xiao Jie (60 ans) serait promu conseiller d’Etat, et Ding Xuedong (57 ans) actuel n°2 au secrétariat du Conseil d’Etat, reprendrait sa charge.
Actuel patron de la CBRC, Guo Shuqing, 62 ans, pourrait remplacer l’irremplaçable Zhou Xiaochuan, 70 ans, Gouverneur de la Banque Centrale depuis 2002.
Un des n°2 de la Commission Militaire Centrale, le Général Wei Fenghe, passerait ministre de la Défense et conseiller d’Etat. 
Zhao Kezhi (64 ans) ex-n°1 du Hebei, allié de Xi Jinping, depuis décembre 2017 ministre de la Sécurité Publique passerait Conseiller d’Etat. Sa promotion ministérielle brise une hégémonie de Jiang Zemin sur ce maroquin depuis des décennies.

Si certains montent, la chute est brutale pour d’autres, tels Wu Xiaohui PDG d’Anbang, 3ème groupe privé d’assurances ; l’ex-conseiller d’Etat Yang Jing (sur dénonciation du milliardaire Xiao Jianhua, lui-même en prison depuis décembre) ; Lu Wei (57 ans), l’ex-patron de la censure sur internet, est expulsé du Parti le 13 février. Ye Jianming (40 ans), président fondateur de la compagnie CEFC de commerce des hydrocarbures (50.000 employés, exercice annuel de 40 milliards de $), tombe, peut-être pour avoir osé racheter 14% du groupe stratégique russe Rosneft, (9 milliards de $) –  un dossier trop stratégique pour le privé et une chasse gardée de l’Etat chinois.

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1 Commentaire
  1. severy

    Bref, on frictionne le bébé avec de la teinture d’iode. Y s’ra beau quand y s’ra grand.

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