Santé : La pneumonie de Wuhan s’invite à la fête

A Wuhan, mégalopole de 11 millions d’habitants au centre de la Chine, les autorités sont en alerte après qu’au moins 750 de ses habitants ont été contaminés par un nouveau type de coronavirus. Les premiers malades sont des vendeurs du marché de Huanan où l’on pouvait notamment acheter, avant sa fermeture le 1er janvier, des animaux vivants comme de la volaille, des marmottes ou des chauves-souris. A ce jour 14 membres de l’équipe médicale ont attrapé la maladie au contact de leurs patients, ce qui indique que la transmission entre humains est possible. 15 cas sont apparus hors frontières : cinq en Thaïlande, deux au Vietnam, un au Japon, un à Taïwan, un aux États-Unis, trois à Singapour, et deux autres en Corée du Sud. Les patients s’étaient tous rendus à Wuhan avant leur hospitalisation. Par contre, aucun d’entre eux n’avait visité le marché de Huanan, ce qui laisse supposer que le virus « 2019-nCoV » peut s’être répandu dans d’autres parties de la ville. Finalement, la ville était bouclée par les autorités le 23 janvier. Mais trop tard, le virus s’était déjà répandu dans la Chine entière : 41 cas étaient détectés à Pekin, 33 à Shanghai, 57 à Chongqing, 10 à Tianjin, 3 à Zhuhai... Deux cas étaient déclarés à Macao et cinq autres à Hong Kong. Cela allait dans le sens de l’estimation publiée le 17 janvier par le MRC Centre d’analyse des maladies infectieuses de l’Imperial College de Londres, se basant sur le nombre de cas déclarés à l’étranger (au 12 janvier) et le trafic aérien depuis l’aéroport de Wuhan. Selon leurs calculs, pas moins de 1723 personnes pourraient avoir été infectées.

Si la Chine a retenu la douloureuse leçon du SRAS, dont elle avait tu l’épidémie pendant de longues semaines, les autorités ne sont toutefois pas exactement bavardes, et ne communiquent auprès du public que lorsqu’elles y sont contraintes. En effet, alors que le premier patient était hospitalisé le 12 décembre, il aura fallu que plusieurs rumeurs courent sur internet, pour que la Commission de santé de Wuhan fasse sa première déclaration le 31 décembre. Depuis, la municipalité s’efforce de faire plusieurs rapports hebdomadaires sur la situation, exhortant la population à ne pas céder à la panique et à être vigilante en cas de fièvre, difficultés respiratoires ou douleurs pulmonaires…

A peine une semaine après l’annonce de l’épidémie, des chercheurs chinois révélaient la séquence génétique du pathogène – une preuve des progrès accomplis par la Chine en virologie depuis le SRAS en 2003. A l’époque, cette tâche avait nécessité trois mois. « Identifier un nouveau virus en une si courte période est une réalisation remarquable, selon le Dr Gauden Galea, représentant de l’OMS en Chine, mais il faut encore déterminer l’espèce animale porteuse du virus, la période d’incubation, les modes de transmissions ». Depuis Berlin, le Dr. Drosten, directeur de l’Institut de Virologie à l’hôpital de la Charité et codécouvreur du SRAS, annonçait le 17 janvier que son équipe avait réussi à développer un test de dépistage pour le nouveau virus. La souche n’est qu’à 73% semblable au SRAS, mais il existe des similarités : tous deux ont émergé en Chine, pendant l’hiver, et ont été transmis d’animaux vivants à l’homme dans des marchés. En revanche, si le SRAS était très contagieux et dangereux (8 000 infectées, 775 décès, dont 80% en Chine), cette nouvelle zoonose est loin d’être aussi meurtrière : au 24 janvier, 41 décès ont été recensés. Pourtant, les experts avertissent que le virus n’est pas à l’abri d’une mutation.

Dans les rues de Wuhan, les habitants ne sortent plus sans leurs masques. Mais chacun s’efforce de garder son calme… Zhao Ma, résident à Shanghai, a été contraint d’annuler son voyage à Wuhan : « je ne serai pas avec ma famille pendant les fêtes mais c’est plus sûr de rester à Shanghai  ». En effet, la plus grande migration humaine au monde a déjà débuté, à l’occasion du Nouvel an chinois (25 janvier). Jusqu’au 18 février, plus de 3 milliards de voyages seront effectués à travers la Chine, par plus de 400 millions de ruraux qui quittent les grandes villes où ils travaillent, pour retourner dans leur province natale. De plus, quelques millions de Chinois s’envoleront faire du tourisme à l’étranger pendant les fêtes. Ainsi, les aéroports de Hong Kong, Macao, Taïwan, Corée du Sud, Singapour, Malaisie, Indonésie et Etats-Unis, sont sur leurs gardes, scannant la température corporelle de tous les passagers en provenance de Wuhan. Il ne reste plus qu’à espérer que ces précautions suffisent pour contenir l’épidémie…

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