Politique : Triplé pour « la pensée de Xi Jinping »

Triplé pour « la pensée de Xi Jinping »

En l’espace d’une dizaine de jours entourant le centenaire du Parti le 1er juillet, ce n’est pas un, deux, mais trois centres dédiés à la « pensée de Xi Jinping » qui ont été inaugurés. L’un sur « la pensée de Xi Jinping sur la civilisation écologique » sous la houlette du ministère de l’Environnement, un autre sur « la pensée de Xi Jinping sur la gouvernance selon la loi », et un dernier sur « la pensée de Xi Jinping sur l’économie » relié à la NDRC (un énième coup dur pour les Likonomics, la doctrine du Premier ministre Li Keqiang).

Leur rôle ? Interpréter l’idéologie éponyme du Secrétaire général et trouver les meilleurs moyens de l’appliquer et de la répandre.

L’étude de la « pensée de Xi » est déjà obligatoire dans les universités, pour les journalistes et pour tous les cadres. Elle dispose même de sa propre application mobile« la plus téléchargée du pays » d’après la presse officielle.

Élément intrigant : l’inauguration de ces centres n’a pas fait l’objet d’une couverture médiatique intense, ni d’une présence à haut niveau. Est-ce le signe d’une intensification des luttes intestines au sein du Parti ou d’un désir de profiter des célébrations liées au 100eme anniversaire du Parti pour ne pas attirer l’attention ? Cela n’a toutefois pas échappé à certains internautes : « de chaque domaine de recherche transpire le culte de la personnalité et les luttes politiques… Cela va mal  finir », écrivait l’un d’entre eux.

Ces trois instituts viennent s’ajouter à deux autres : celui sur « la pensée de Xi Jinping sur une armée forte » inauguré en mai 2019 et celui sur « la pensée de Xi Jinping sur la diplomatie », lancé en juillet 2020, complété en juin par un site web recensant les discours, les citations, les voyages à l’étranger de « l’hyper-Président ». Lors de la cérémonie d’inauguration (cf photo), le ministre des Affaires étrangères Wang Yi, avait qualifié Xi Jinping de « grand stratège ».

Au total, une vingtaine de centres d’études à des niveaux inférieurs (l’Académie nationale des Sciences sociales, l’École Centrale du Parti…) et dans les provinces (au Shandong, lieu de naissance de Confucius, ou encore au Zhejiang et au Fujian, bases d’influence de Xi Jinping), ont été créés depuis le 19ème Congrès de 2017, date à laquelle « la pensée de Xi Jinping du socialisme aux caractéristiques chinoises pour une nouvelle ère » (son nom complet) a été enchâssée dans la constitution du Parti et celle du pays. Un tour de force pour Xi Jinping, puisqu’elle contient son nom, à l’inverse de ses prédécesseurs directs, Hu Jintao et Jiang Zemin.

La prolifération inédite dans l’histoire du PCC de ces « instituts de recherche » dédiés à l’idéologie d’un dirigeant n’est pas sans rappeler la multiplication des « groupes directeurs » depuis l’arrivée aux affaires du Président Xi, venus grignoter les attributions des administrations et organes existants afin de renforcer son pouvoir personnel.

Dans la même ligne, le déploiement de ces outils de propagande a pour objectif de consolider l’emprise idéologique de Xi sur le pays, reflétant l’ambition sans limite du leader de se hisser au panthéon de l’histoire. Ce mouvement devrait se renforcer d’ici le 20ème Congrès du Parti à l’automne 2022, durant lequel Xi Jinping est quasi certain de rafler un troisième mandat, après avoir détricoté toutes les règles de gouvernance (alternance, succession, direction collégiale…) instaurées par Deng Xiaoping et censées éviter le retour au pouvoir solitaire et le culte de la personnalité. Des dangers vers lesquels Xi Jinping se dirige à grands pas.

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