Société : Le rituel autour de la fête de Qingming enterré ?

Le rituel autour de la fête de Qingming enterré ?

Célébré en Chine depuis plus de 2500 ans, le festival de la « lumière pure » (qīngmíng, 清明) du 3 au 5 avril, est l’occasion pour les familles de se réunir sur les sépultures de leurs proches disparus et d’honorer leur mémoire.

Cette tradition confucéenne millénaire n’a été érigée au rang de fête nationale qu’en 2008 par un gouvernement désireux de raviver sa popularité auprès de la jeunesse chinoise, mais aussi de stimuler la consommation en offrant trois jours de congés à la population. Ils seront 100 millions à partir en excursion cette année – c’est presque autant qu’avant la pandémie.

À la veille de cette Toussaint chinoise, le rituel qui consiste à brûler de la « monnaie de l’enfer » (faux billets, smartphones, voitures de sport et sacs de luxe en carton…) pour agrémenter la vie du défunt dans l’au-delà, fait débat.

À Harbin, les autorités ont qualifié cette coutume de « polluante » et « dangereuse », étant parfois à l’origine d’incendies de forêt. C’est pourquoi, cette année, les marchands « n’auront nulle part où vendre » et les acheteurs « n’auront rien à brûler » dans la capitale provinciale du Heilongjiang.

Un ban qui a fait des émules à travers le pays : Pékin, Tianjindeux villes touchées par la pollution – et la province de Hainanîle écolo – ont également suivi, appelant à une commémoration « civilisée » des disparus.

Ce n’est pas la première fois que les coutumes du pays sont bousculées par le gouvernement pour des raisons environnementales ou de sécurité (incendie). Lors du Nouvel An lunaire, les feux d’artifice et les pétards sont désormais interdits dans les grandes villes pour limiter la pollution et éviter les départs de feu accidentels.  

« C’est typique de la gouvernance paresseuse, estime Zheng Tuyou, vice-président de la société chinoise du folklore et professeur à l’université Fudan à Shanghai, ces mesures n’auront pas les résultats attendus ».

La plupart des internautes sont du même avis. « Si les autorités veulent vraiment faire quelque chose pour la qualité de l’air, qu’ils ferment les usines polluantes d’abord », écrit un utilisateur de Weibo. « Tant qu’à faire, pourquoi pas ne pas interdire de brûler de l’encens dans les temples ? », s’indigne un autre. Dans un contexte actuel tendu au sujet du traitement de la minorité ouïghoure musulmane au Xinjiang, un internaute note que « tout ce qui est qualifié de ‘superstitieux’ ou ‘religieux’ est dans le collimateur des autorités, mais cette fois, ils vont trop loin en touchant à nos coutumes Han ».

Pourtant, selon la fête de Hanshi (寒食节), intégrée il y a plusieurs siècles au festival de Qingming puis progressivement abandonnée, il était proscrit de faire du feu – ce qui explique la coutume de manger des plats froids ou des aliments crus. Sous cette perspective, l’interdiction de brûler de la monnaie de l’enfer apparait moins comme un abandon qu’un retour à la plus pure tradition !

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