Industrie : Produits dangereux, le bout du chemin

SITA (filiale de SUEZ environnement), en joint-venture avec le  SCIP  (éco-parc de Caojing, Shanghai) -  SCIPSWS, ne produit rien que de la vapeur d’eau (240°C, 20 bars), revendue aux usines chimique voisines. En terme d’empreinte carbone et de rejet de gaz à effet de serre, elle évite au parc de brûler 30.000 tonnes de houille par an. Avec 130 employés et 2 lignes d’ incinération de déchets de 60.000 tonnes par an, elle passe pour petite comparée à ses géants voisins, telle la JV BP-Sinopec (900.000 tonnes d’ éthylène par an). Le projet d’implantation d’une 3ème ligne d’activité, qui devrait dès 2016 doubler sa capacité, est ultra-prioritaire, car c’est elle qui éradique les produits dangereux de ses 200 clients actifs.

Dans le cycle de destruction, la 1ère étape pour les chimistes de SCIPSWS, consiste à se rendre sur le site émetteur pour analyser le déchet, voir s’il peut être traité – s’il figure parmi les 3500 types de déchets répertoriés. 

« Les déchets ne sont pas toujours dangereux », confie Benjamin Chan-Piu, directeur du site, « certains sont inoffensifs, comme des cigarettes contrefaites, ou des séries ratées de Croc’s, les sandales en silicone… Le client nous les apporte pour s’assurer qu’une fois au rebut, ils ne réapparaîtront pas sur les marchés secondaires. 

La plupart des marchandises souillées sont cependant à prendre « avec des pincettes » et supposent dans leur maniement tout un savoir-faire de chimiste, tels ces corps inflammables au-delà de 10°C de température - ceux-là voyagent en camion-citerne sous azote. Les volumes aussi sont extrêmement variables, certains livrés en palettes d’un mètre cube, d’autres en seaux de 10 litres, ou encore par pipeline, 2 fois par jour. 

Le second test, au laboratoire SCIPSWS, va servir à définir la stratégie de destruction. Une part des déchets sont biologiquement traités par la station d’épuration, aussi gérée par SUEZ environnement. Mais certains peuvent être refusés, car trop agressifs envers la flore bactérienne chargée de les « digérer ». 

Pour ceux à incinérer, les déchets sont assortis par familles de matières, selon leur pouvoir calorifique.
Ceux solides sont parfois broyés pour assurer une meilleure combustion. Puis agit le four rotatif, tambour horizontal d’une dizaine de mètres, pour réduire en vapeur les matières à 850°C. Puis elles passent à 1100°C dans la chambre de postcombustion, pour la décomposition moléculaire.
Suit la redescente en température, l’addition de chaux et de charbon actif pour fixer les chlores, métaux lourds et poussières. La matière solide est ensuite séparée des gaz par une douche : les boues sont séchées en briques, conservées au sec, et les gaz repartent dans l’atmosphère. 

Sita UsineVisible en permanence par l’ordinateur central de l’éco-parc SCIP, l’écran moniteur annonce 6 milligrammes par m3 de gaz carbonique et diverses traces de soufre, NOX et autres polluants. C’est très peu, moins du dixième des normes en vigueur. 

Fait encourageant, le principe de payer pour l’élimination de déchets est de plus en plus accepté par les industriels, qui apprennent aussi très vite à emballer ces produits dangereux selon les normes. 

« A l’ouverture en 2006, se remémore B. Chan-Piu, presque seuls les groupes étrangers nous sollicitaient pour mettre leurs poisons hors d’état de nuire. Les autres recourraient à des PME coûtant jusqu’à moitié moins cher, mais au travail très médiocre.
Mais depuis, sous l’action du ministère de l’Environnement, ces unités peu professionnelles ont fermé et nous tournons à pleine capacité. Shanghai interdit même l’importation de déchets d’autres provinces. Ainsi, une véritable révolution est en cours dans les mentalités, et désormais toutes les provinces sont en manque de déchetteries comme la nôtre ». 

En 2014, SCIPSWS a reçu 50 patrons des bureaux provinciaux de l’Environnement, en deux stages d’une semaine à l’initiative du ministère, avec le soutien théorique de l’université Tsinghua. 

Le but n’était pas d’apprendre à ces patrons de la « police de l’environnement » comment ouvrir ou gérer des déchetteries, mais simplement de leur en présenter les technologies et ce qu’elles pouvaient faire pour améliorer l’air et l’eau de leur région. Et de la sorte, avoir une vision plus claire de quoi mettre dans le futur cahier des charges des sites de neutralisation des déchets dangereux. 

C’est un signe des temps qui viennent, croit B. Chan-Piu, annonciateur d’un tournant dans la pratique industrielle chinoise.
En terme de protection de l’air, de l’eau et de la terre, dans 5 ans pour les provinces riches, et dans 10 pour les autres, la perception officielle et l’organisation administrative auront radicalement changé, pour le meilleur.

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