Petit Peuple : Chongqing, déboires d’un Figaro mal soigné !

Il peut arriver à la jeunesse chinoise de manquer d’hygiène : conséquence du syndrome du 小皇帝xiao huangdi –       « petit empereur », héritier unique gâté par une mère victime consentante. A peine sortis du nid, des millions de jeunes refusent avec la dernière énergie de laver leurs chaussettes, craignant de perdre la face, et que leurs amis ne se moquent d’eux.

 A l’aube de sa vie d’adulte, Wen, coiffeur de 25 ans, à Chongqing, était dans ce cas. Pour masquer ses odeurs intimes, il se parfumait outrageusement, portait cuir et brillantine, sortait en boîte avec son « petit miel » Jingjing, et s’arrangeait pour ne jamais l’introduire en sa mansarde.

Jusqu’au jour où elle finit par aboutir dans son capharnaüm : quel choc !

Draps emmêlés et gris, posters déchirés aux murs, chaussures dépareillées au sol et sur les chaises…! La jeune fille bien élevée voulut l’aider à rétablir un semblant d’ordre. Jusqu’à l’instant où, se baissant sous le lit, elle découvrit deux grandes poches de plastique, qu’elle ouvrit. Abomination ! Elles renfermaient soixante caleçons et paires de socquettes, trente chemises dont le fumet et les tâches dénonçaient cruement la crasse terminale !

Jingjing venait de découvrir la solution secrète de Wen au défi du lavage. Il suffisait d’investir dans les sous-vêtements, de les porter deux jours et les chemises quatre, pour limiter à trois fois l’an les passages à la laverie automatique !

Loin d’avoir honte, un Wen fier comme un paon,  sans soupçonner le dégoût de Jingjing, lui dévoila l’aspect révolutionnaire et « cool » de son système, très XXIème siècle en somme…  C’était compter sans son XXIème siècle à elle: mains sur les hanches, elle le toisa,  lui souhaita bonne chance, et s’enfuit à tire d’aile,  le laissant seul dans son cloaque! Wen la poursuivit, moins par amour profond que par suite dans les idées : on veut bien plaquer, mais non être quitté, et moins encore sur un motif ridicule !

La reconquête fut ardue. Elle nécessita une débauche d’appels, de SMS sans réponse, de lettres, d’envois de fleurs. Wen fit intervenir parents et amis en médiateurs. Enfin après huit jours, baissant pavillon, elle accepta de le revoir dans sa chambre récurée « au carré », avec l’aide de Maman bien sûr. Dans un coin, les sacs, cause du scandale, attendaient humblement leur sort. Wen offrit de les immoler au kérosène, sur l’autel de leur amour.

Que nenni : la fine mouche accepta ses excuses, mais à condition qu’il « se lave le coeur et ravale sa face » (洗心革面, xi xin ge mian). Il devrait garder les sacs à proximité. Chaque fois qu’il donnerait signe de rechute, elle le contraindrait à plonger le nez dedans, en signe d’expiation : manière comme une autre, de ne pas laver le linge sale en famille !

Sérieusement désorienté, notre as des bigoudis révise sa conception du monde : ayant cru s’en tirer en brûlant ses culottes, il découvre qu’il devra immoler quelque chose de bien plus précieux : l’utopie adolescente de faire prendre à sa copine, la place de sa mère !

 

 

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