Quel genre d’homme est Hu Jintao, le Président chinois ? Sa personnalité réelle est indéchiffrable, derrière les rares données offertes par son CV officiel. Hu apparaît moins chaleureux que Jiang Zemin qui n’hésitait pas, à l’étranger, à citer Tennyson ou Twain, chanter en russe, jouer de la guitare hawaïenne ou valser avec Mme Chirac.
On sent plutôt l’obsession de nourrir un pedigree du communiste le plus orthodoxe: au Tibet, son 1er poste, il fait ériger (17/04) la plus haute statue de Mao (12m, 35t), pour honorer l’homme qui souda le territoire à la Chine.
A Pékin, il forge un slogan : les 八荣八耻 (ba rong ba chi), séries de «8 honneurs et 8 déshonneurs», code de conduite morale à usage de ses concitoyens, tel «être ardent à la tâche et non à la débauche» : dans la ligne des « trois représentativités » de Jiang Zemin, et tout aussi éloigné que celles-ci, des soucis de l’homme de la rue.
Moraliste donc, Hu se veut également économiste, déplorant la boulimie de la croissance au 1er trimestre, avec +10,2% au lieu des 8% attendus, et la masse des prêts bancaires qui dépassent déjà 50% du quota prévu pour 2006, avec 126MM² ! Hu ne semble cependant pas prêt à activer l’arrêt d’urgence—sauf exception, tels ces 60 chantiers arrêtés pour cause écologique (VdlC n°13) : mais là, le projet de Hu est d’éveiller la Chine à l’idée d’économie durable, plus que réellement refroidir la chaudière…
Le Président Hu veut aussi rester dans l’histoire pour sa défense du paysannat. Le ministre du sol enquête (18/4) sur 2 expropriations abusives, celle par l’aciérie Dezhong (Hebei), celle par la ville de Suining (Anhui), ayant ensemble confisqué 60ha aux paysans au défi de Pékin. La presse révèle 1M de ventes foncières illégales en Chine, 330.000ha en 7 ans, soit un an de construction dans le pays. Clairement, Hu se bat contre la classe possédante -le pouvoir provincial !
Face à G.W. Bush, Hu aux USA du 18 au 21/4 a tenté de rassurer : par rapport aux ambitions planétaires de ses GEE, aux espoirs (« commerciaux seulement ! ») sur le cône sud. L’enjeu était de décourager la tentation US d’encerclement ou « containment » de la future superpuissance rivale, en cimentant autour d’elle un glacis de Corée, Japon, Australie voire Inde.
Autant dire, le voyage s’est passé moyennement : manifs à Yale, Washington, Seattle, à la Maison Blanche-même; accord avec Bush sur rien, Hu déclarant qu’il ne prendra pas de leçons de démocratie des USA. Et sur le fond, malgré la prière chinoise, Bush n’a pas voulu accorder à la mission de l’hôte, l’honneur du statut de « visite d’Etat » !
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Sommaire N° 15