Politique : Le torchon brûle au Liaoning

Confirmée le 1er mars par Chen Qiufa, gouverneur du Liaoning, la nouvelle fait bondir : les statistiques de la province ont été falsifiées « de 2011 à 2014 ». Ainsi, son PIB de 2016 publié en février, est en baisse de 23%, une chute invraisemblable. Même si après ajustement de l’inflation, le recul n’est de 2,5%, cette province est la première à admettre une récession.

D’autres chiffres confirment la triche des leaders d’alors, cadres en mal d’avancement. Pour 2016, les dépenses d’investissement fixe publique (IFP, qui sont en Chine le 1er pilier de la croissance) chutaient de 64%, chiffre ahurissant. En 2015, ces IFP avaient déjà chuté de 27,8%, ce qui n’avait empêché le Liaoning de maintenir—contre toute logique statistique–un PIB de 3%. Pire, ses rentrées fiscales qui depuis 20 ans gonflaient de plus de 10% par an, dérapaient à 7,6% en 2013, 4,5% en 2014, pour régresser de -33,4% en 2015. Mais, avoue le gouverneur, cette recette provinciale avait été surestimée d’au moins 20%. Ce qui avait privé les habitants d’une part injuste de leur niveau de vie, cette province pauvre ayant reversé 20% en trop de ses recettes au niveau central…

Ceci rappelle la boutade de Li Keqiang, qui savait de quoi il parlait, ayant exercé la fonction de Secrétaire du Parti au Liaoning de 2004 à 2007 : « pour savoir comment va le Liaoning, je ne regarde pas les statistiques, mais seulement les chiffres de consommation électrique, du fret ferroviaire et des prêts bancaires ».

Une telle fraude pourrait-elle se retrouver ailleurs en Chine ? « Non », assure l’audit national, mais « Si ! », contredit Mizuho Securities, qui croit voir, de 2006 à 2010, un PIB national surévalué de 4,8%, et de 6% de 2011 à 2015. L’écart grandissant est dû à l’endettement des provinces, forcées à puiser dans leurs profits pour refinancer leurs emprunts. Mizuho conclut que la distorsion a mené Pékin à décider d’un crédit abondant, puis de le maintenir au risque d’alimenter la bulle, visible dans l’acier comme l’immobilier.

Fait curieux mais au fond logique, au Liaoning, la triche des bilans s’accompagna d’une fraude électorale : en 2016, 45 de ses 102 députés nationaux furent expulsés du Parlement pour avoir acheté leur charge. Les élus tricheurs étaient les industriels, assez riches pour suborner l’administration, et ayant besoin de ce pouvoir pour maintenir un cadre financier qui leur allait si bien. Ce qu’ils n’avaient pas prévu, était la colère de Pékin, voyant ces amateurs en politique prendre la place des candidats qu’il avait choisis, et soucieux de faire le ménage avant le Congrès d’octobre.

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