Politique : Florilège de propositions

Florilège de propositions

Comme chaque année, les 3 000 délégués conviés à participer aux « Deux Assemblées » (CCPPC et ANP) ont joué le jeu parlementaire en soumettant leurs propositions législatives. Le Conseil d’Etat en aurait ainsi reçu plus de 15 000 de la part d’édiles aux profils très variés : avocats, sportifs, acteurs, hommes d’affaires, scientifiques… Tous ont ainsi la chance de mettre en avant les sujets qui les préoccupent. Même si ces suggestions n’ont que peu de chances d’être traduites par des politiques concrètes, elles reflètent à la fois les préoccupations du gouvernement, et d’une certaine manière, celles du « petit peuple ».

L’un des grands sujets de cette session tourne autour de la natalité du pays. Pour la première fois en plus de 60 ans, la Chine a vu sa population baisser de 850 000 personnes l’an dernier. En cause, la chute des naissances, malgré l’assouplissement de la politique du planning familial à trois enfants en 2021. Les couples chinois sont unanimes : c’est avant tout le coût de l’éducation qui les freine dans leur désir de fonder une famille. Pour y remédier, Zhao Dongling, une écrivaine-déléguée du Shandong, propose de généraliser les allocations maternité à toutes les femmes, en particulier les travailleuses indépendantes, les paysannes et les mères au foyer. Pour Gan Huatian, professeur de médecine, le gouvernement devrait rendre la scolarité gratuite de la crèche au lycée à partir du 3ème enfant. Encore faut-il déjà en avoir deux !

D’un point de vue administratif, la proposition la plus significative est celle de permettre aux femmes non-mariées d’enregistrer la naissance de leurs enfants, qui étaient jusqu’à présent privés de « hukou » (permis de résidence), d’une scolarité normale et d’accès aux services publics. Shanghai et les provinces du Sichuan et du Guangdong ont déjà sauté le pas, tout en réfutant vouloir encourager les couples non-mariés à devenir parents. Ainsi, pour que cette mesure soit véritablement efficace, il faudrait un profond changement des mentalités.

Au plan médical, le spécialiste de la fertilité, Xu Congjian, propose d’autoriser les femmes non-mariées à accéder à la congélation d’ovocytes. D’autres parlementaires suggèrent encore de subventionner la fécondation in vitro (FIV). Le recours à une mère porteuse lui, reste encore tabou et surtout réservé aux plus riches qui n’hésitent pas à s’envoler à l’étranger pour ainsi concevoir.

Dans la même veine, la baisse continue de la population active depuis 2014, inquiète les parlementaires. D’ici la fin de ce siècle, la Chine ne recensera plus que 400 millions de travailleurs. Pour un pays qui a longtemps compté – et compte toujours – sur son réservoir de main-d’œuvre pour faire tourner son moteur économique, la pénurie d’ouvriers est un problème sérieux. Une solution avancée par certains délégués serait de reculer l’âge du départ à la retraite (60 ans pour les hommes et 55 ans pour les femmes), inchangé depuis 40 ans. Cela fait des années qu’une réforme est dans les tuyaux, mais le gouvernement n’a jamais osé passer à l’acte, de peur de se mettre sa population à dos. Pourtant, selon le professeur de droit, Lu Xiaoming, ce réajustement est inévitable. Il propose donc de lutter contre les discriminations à l’emploi des « seniors » et de créer davantage d’emplois spécialement pour les travailleurs ayant dépassé un certain âge.

Autre thématique brûlante de cette session : le cyberharcèlement, un vieux problème en Chine et son milliard d’internautes. Ce sont les récents suicides de deux jeunes influenceurs victimes de harcèlement, qui ont remis le débat à l’ordre du jour. En guise de réponse, plusieurs délégués encouragent les réseaux sociaux à mettre en place des systèmes plus efficaces pour répondre aux plaintes des utilisateurs.

Dernière proposition, dans l’air du temps : celle de Zhou Yuan, patron de la plateforme Zhihu (équivalent chinois de Quora), de mieux encadrer le chatbot américain « ChatGPT » afin de mieux protéger les mineurs de tout « contenu inapproprié ». Une proposition tournée en ridicule par les internautes puisque la technologie est officiellement indisponible en Chine !

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