Taiwan : Wang Huning à la manœuvre ?

Wang Huning à la manœuvre ?

Un voile se lève sur l’un des mystères du XXème Congrès du Parti. Il s’agit de la nomination de Wang Huning à la tête de la Conférence Consultative Politique du Peuple Chinois (CCPPC). Pourquoi avoir choisi ce discret personnage à l’origine de nombreuses théories politiques, à ce poste qui requiert un certain talent oratoire ?

Le quotidien japonais Nikkei apporte un élément de réponse. Citant une source interne au Parti, le journal avance que l’ancien conseiller de Jiang Zemin et de Hu Jintao aurait été chargé par Xi Jinping d’imaginer une nouvelle stratégie de réunification avec Taïwan en sa qualité de nouveau directeur adjoint du groupe central directeur pour les Affaires taïwanaises. Wang sera assisté dans cette tâche par Wang Yi, l’ancien ministre des Affaires étrangères et ex-directeur du bureau des Affaires taïwanaises de 2008 à 2013.

En effet, depuis la reprise en main sécuritaire infligée par Pékin à Hong Kong en réaction aux manifestations prodémocratie de 2019, le principe « d’un pays, deux systèmes » est rejeté en bloc par les Taïwanais, qui craignent que Pékin étouffe à leur tour leurs libertés. Or, ce schéma imaginé par Deng Xiaoping quarante ans plus tôt était censé être l’épine dorsale du rapprochement pacifique entre l’île et le continent.

C’est la raison pour laquelle Xi Jinping a besoin d’une nouvelle dynamique. Pour le dirigeant, c’est l’occasion de faire table rase du passé et de laisser sa propre marque dans l’histoire, lui qui ambitionne de se maintenir au pouvoir pour un 4ème mandat (2027-2032).

Si ce scénario se concrétise, cela signifie que le leader privilégie toujours l’option pacifique. Selon les progrès effectués en matière de rapprochement grâce à la nouvelle stratégie imaginée par Wang Huning, la nécessité d’un recours à la force serait alors réévaluée, explique la source citée par le Nikkei.

Cette analyse va à l’encontre des prédictions alarmistes du général américain Michael Minihan : dans une note interne envoyée le 27 janvier à ses troupes, il alerte sur le risque élevé d’une guerre entre les États-Unis et la Chine en 2025, très probablement autour de Taïwan.

Même si les informations du Nikkei sont confirmées, la stratégie élaborée par Wang Huning (cf photo avec le vice-président du KMT, Andrew Hsia, le 10 février) pourrait bien ne pas voir le jour avant les prochaines élections présidentielles de janvier 2024, qui désigneront le successeur de Tsai Ing-wen du parti progressiste (DPP). A l’inverse des élections locales qui sont davantage influencées par les problématiques régionales, l’issue des présidentielles est fortement influencée par la position des candidats vis-à-vis de la Chine.

Que Pékin préfère voir un candidat du parti nationaliste (KMT), historiquement partisan d’un rapprochement avec la Chine, victorieux lors des présidentielles de 2024 ne fait aucun doute. Xi Jinping aurait d’ailleurs chargé l’un de ses proches, Song Tao, nouveau directeur du bureau des Affaires taïwanaises, de mobiliser tous les ressources nécessaires pour que le DPP perde cette élection. Ceci dit, même si le KMT reprend le pouvoir, il est certain que Pékin ne sera pas en mesure de proposer un projet de réunification qui soit acceptable aux yeux des Taïwanais. 

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