Frayeur à Pékin le 21 octobre pour cette banquière d’UBS, le géant helvétique en gestion de fortune (383 milliards de $ en Asie en 2017). À l’heure de reprendre l’avion pour Singapour, elle fut arrêtée à l’aéroport : les autorités souhaitaient s’entretenir avec elle. Elle devait donc remettre son départ. Quelle ligne rouge a-t-elle donc dépassé, causant l’action des forces de l’Etat ?
La mission de la banquière était de rendre visite à de riches clients, pour les conseiller à domicile sur leurs placements financiers. Mais les règles étaient claires : pas d’échange de fonds entre le client et l’étranger, et pas de sortie de capital. Alors, aurait-elle aidé des clients à sortir de l’argent de Chine ? Ou plutôt, comme d’autres le soupçonnent, aurait-elle été sollicitée pour livrer des informations sur l’un de ses clients, alors que la campagne de lutte contre l’évasion et la fraude fiscale s’intensifie en Chine ?
Apprenant la nouvelle, UBS a réagi au quart de tour. Il faut dire que cette quasi-arrestation n’était ni encourageante pour son image, ni pour la sécurité de ses conseillers itinérants. Ces derniers donc, reçurent instruction d’éviter la Chine jusqu’à nouvel ordre.
Subséquemment, d’autres banques suivirent – Julius Baer, Citigroup, Standard Chartered, JP Morgan, BNP Paribas recommandaient à leurs banquiers d’aller voir ailleurs. Quelque soit le souci, il semble avoir été vite aplani—c’était l’intérêt des deux parties. Le 23 octobre, la banquière retrouva le droit de quitter le pays, et UBS leva l’embargo. Avec la Chine, c’était de nouveau « business as usual ».
Quelle conclusion tirer ? Pékin semble avoir voulu avertir les groupes étrangers de gestion de patrimoine de respecter la loi.
Au demeurant, UBS est la seule banque disposant, outre ses missions venues de l’extérieur, d’un service patrimonial en JV à l’intérieur du pays. Ceci lui donne sur ses concurrents plusieurs encolures d’avance. D’ailleurs, UBS s’apprête à annoncer sous quelques mois le droit d’investir 125 millions de $ pour devenir majoritaire dans cette JV. Sous 5 ans, UBS aura remplacé dans l’entreprise le personnel du partenaire, et doublé le sien, lui permettant ainsi de fournir aux clients milliardaires un service de meilleure qualité.
Cette perspective donne un dernier indice sur les raisons pour la Chine de sanctionner cette affaire : quand on est le n°1 étranger, sur un marché que la Chine est en train d’ouvrir, on se doit d’être irréprochable.
Sommaire N° 36 (2018)