Portrait : Hu Chunhua, un candidat de « premier » choix

Hu Chunhua, un candidat de « premier » choix

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La rumeur prend de l’ampleur. Et si Hu Chunhua (胡春华), actuel vice-premier ministre en charge de l’agriculture et de la lutte anti-pauvreté, venait à remplacer Li Keqiang, Premier ministre sortant, à la suite du 20ème Congrès ?

Après avoir longuement scruté les faits et gestes de Wang Yang, président de la CCPPC et n°4 dans la hiérarchie du Parti, les observateurs s’interrogent sur l’hyperactivité de Hu Chunhua au lendemain de la retraite de Beidaihe. Outre ses remarques plutôt banales sur la production agricole, ses interventions le 19 août lors d’une conférence nationale dédiée aux investissements étrangers, puis trois jours plus tard au sujet du marché de l’emploi, laisseraient présager d’un portefeuille élargi à l’économie, tel celui d’un Premier ministre !

Né à Wufeng (Hebei) en 1963, d’une famille paysanne de 7 enfants, Hu Chunhua se révèle être un élève brillant. Major de son district au Gaokao à 16 ans, il intègre la prestigieuse université Beida (Pékin) où il boucle une licence de lettres en 1983 – il est coopté dans la foulée au Parti.

Surnommé « le petit Hu » en raison de sa ressemblance frappante (physique et de carrière) avec son protecteur, l’ex-Président Hu Jintao qu’il rencontre à la Ligue de la Jeunesse, il passe 19 ans au Tibet, où il s’attachera à apprendre le tibétain – chose très rare pour un cadre. Envoyé dans sa province d’origine le Hebei en 2009, il devient alors le plus jeune gouverneur du pays, puis est nommé secrétaire du Parti de la Mongolie Intérieure, où il gère avec doigté les émeutes de mai 2011.

Fort de ses affectations dans des régions pauvres et « ethniquement sensibles », et surtout grâce à l’appui du Président sortant, Hu Chunhua est promu en 2012 à la tête du Guangdong, ce qui va de pair avec une place au Politburo. À l’époque, son « jeune » âge faisait de lui un candidat idéal à la succession de Xi Jinping en 2022, étant l’un des deux seuls dirigeants de la 6ème génération à accéder à ce pinacle du pouvoir. C’était sans compter sur les aspirations de Xi de se maintenir à la tête du pays pour (au moins) cinq ans de plus…

Bien conscient de ne pas être le favori de Xi Jinping, Hu a néanmoins su se faire passer pour « acceptable » aux yeux de celui-ci, en déclarant à multiples reprises son allégeance au leader, retenant la leçon de la chute brutale en 2017 de son rival, Sun Zhengcai. Encore le 27 juillet dernier, Hu Chunhua signait dans le Quotidien du Peuple une tribune vantant les réalisations du Président en matière de « réjuvénation rurale », l’article mentionnant Xi Jinping plus d’une cinquantaine de fois…

Ainsi toléré par le Premier secrétaire du Parti, Hu Chunhua, encore dans la fleur de l’âge (59 ans), pourrait bien rejoindre le « Saint des Saints », le Comité Permanent, à l’automne 2022 : soit en tant que nouveau patron du Conseil d’État, soit en tant que Président de la Conférence Consultative Politique du Peuple Chinois (CCPPC), dans le cas où Wang Yang serait remercié.

Jusqu’à présent, tous les 1er ministres (sauf Zhou Enlai, étant le tout premier de la liste) ont été sélectionnés parmi les vice-premiers en poste. Or, le seul vice-premier actuellement en fonction, qui n’a pas atteint la limite d’âge de 68 ans, est Hu Chunhua, ce qui fait de lui un candidat de choix.

Si cette nomination se confirme, sera-t-elle à interpréter comme une concession faite par Xi Jinping à la faction (affaiblie) de la Ligue de la Jeunesse (la « tuanpai »), incarnée au plus haut niveau par Li Keqiang et Wang Yang, en échange de leur soutien à sa « réélection » ? C’est possible… L’importance de ce potentiel compromis est néanmoins à nuancer, puisque Xi Jinping a relégué le rôle du Premier ministre au second plan ces dix dernières années. Et il y a peu de chances que Hu Chunhua – ou quiconque nommé à sa place – parvienne à inverser la tendance.

Une seule chose est sûre : le futur premier ministre aura fort à faire pour remettre sur les rails une croissance économique à bout de souffle après presque trois ans de politique « zéro Covid », et atténuer les dégâts provoqués par les multiples reprises en main du secteur privé initiées par son indéboulonnable patron.

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