Taiwan : Sirocco sur Hong Kong, et Mistral sur Taïwan

Taiwan le 20 mai, Tsai Ing-wen, Présidente du DPP indépendantiste, prenait ses fonctions de Présidente de la République. Depuis janvier, Pékin fait pression pour jauger la capacité de résistance de la leader, et pour punir l’électorat insulaire d’avoir débarqué son champion Ma Ying-jeou, du Parti KMT, pro-réunification. Le message de Pékin est clair : « la prospérité avec moi ; la crise sans moi ».  Au 1er trimestre, les échanges avec la Chine ont baissé de 11,5, à 37,5 milliards de $. Le tourisme s’érodait de 10%, avec 364.000 visiteurs du continent, pourtant fort attendus—ils achètent sur place pour 2500$ chacun en moyenne.   
Pour refouler Taiwan dans son état de paria diplomatique, Pékin lui  a repris l’ambassade en Gambie, bloqué son entrée à la Banque Asiatique d’Investissement (AIIB) et à l’OMS. Et deux jours avant le discours d’investiture, la Chine avertissait : Tsai ne devra s’en prendre qu’à elle-même en cas de tempête, si elle osait faire l’impasse sur le « consensus de 1992 » – accord verbal et vague sur une appartenance commune à « une seule Chine », non définie. Lors de son discours d’investiture, Tsai se garda de mentionner explicitement ce consensus, se bornant à reconnaître qu’en 1992, Pékin et Taipei avaient eu un « point d’entente » à ce sujet. C’était une tentative subtile de se dégager d’une situation « entre enclume et marteau », l’impatience du PCC et la sourde résistance de la population à perdre sa souveraineté de facto, au profit du grand frère voisin…

A Hong Kong aussi, le climat est à l’orage, et le tourisme baisse. C’est en partie dû un accueil maussade fait aux hordes chinoises dans ses commerces et ses rues. En fait, un clash de générations déchire la ville, entre les jeunes, tenaillés par leur affirmation identitaire, et les plus âgés, qui voient dans la mère patrie un gagne-pain. Dans ce contexte, la visite de Zhang Deqiang, le président de l’ANP, en charge de Hong Kong (17-19 mai), se déroula dans un climat aigre, en dépit de sa main tendue et de ses sourires. Ce cadre formé en Corée du Nord, passe pour un dur, auteur du mur de refus au mouvement « Occupy Central » qui paralysa la ville des semaines fin 2015. Zhang cependant, se déclare d’accord pour ouvrir un dialogue à haut niveau avec les élus d’opposition, rassurant la ville qu’elle ne perdra pas son identité… Mais sans convaincre !
Pourquoi ce tournant ? Peut-être parce que à Hong Kong, la confrontation a cessé, laissant place au désespoir, ce qui convient plus à Pékin, que des manifestations ! Peut-être aussi Zhang est atteint d’un syndrome bien connu des leaders chinois proches de la retraite : le désir de paix, de marquer l’histoire, de se faire aimer, pour une fois.

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