Diplomatie : La Norvège sort de l’iceberg

Depuis 2010, la Norvège était en froid avec la Chine, suite à l’octroi du Prix Nobel de la paix au dissident Liu Xiaobo. En 2009, ce dernier avait été condamné à 11 ans de prison, pour avoir osé rédiger et faire signer une charte réclamant le passage à la démocratie multipartite. Suite au Nobel, l’Ambassadeur chinois avait été rappelé, les bureaux de Statoil (qui fournissait à l’époque à la Chine 100.000 barils par jour ) avaient été fermés, et les importations de saumon norvégien bloquées.

En décembre 2016, Xi Jinping tournait la page, au nom des « explicites explications » d’Oslo. Puis du 7 au 11 avril, il recevait Erna Solberg, 1er ministre de ce pays de 5 millions d’âmes, et lançait une invitation au roi Harald V en 2018.

Comme pour rattraper les années perdues, 6 mémorandums ont été signés – sur un traité de libre-échange, et sur les sports, en vue des JO d’hiver de 2022. En effet, ce pays hors de l’Union Européenne, a accumulé des savoir-faire uniques, intéressants pour la Chine.
Le dialogue va donc reprendre sur le modèle d’Etat-providence à la norvégienne (sa couverture sociale, son système éducatif favorisant la socialisation), ses pavillons maritimes, ses renouvelables (41% de son énergie). Son pétrole aussi est attractif, par ses techniques d’exploration et d’extraction en eaux profondes et par ses réserves. Déjà exploitant en eaux britanniques (gisement Buzzard, via sa filiale Nexen), CNOOC veut explorer en eaux norvégiennes. La veille de la visite de Mme Solberg, CNOOC recevait un vice-ministre norvégien du pétrole, accompagné d’une brochette de PDG de l’or noir.

Le retour en grâce de la Norvège, ouvre un peu plus à la Chine l’accès au cercle arctique, qu’elle guigne comme nouvelle frontière—pour les pêcheries et les ressources du sous-sol. Avec Oslo de son côté, Pékin peut négocier à « 5+1 » avec les cinq Etats du Conseil Nordique.
Enfin, cette crise qui s’achève, jette un éclairage cru sur la toile de fond du processus décisionnel chinois. Clairement, durant ces sept années perdues, les secteurs qui ont souffert de cet ostracisme (les pétroliers, les importateurs alimentaires) ont tenté en interne de défendre l’impératif de croissance. Mais les idéologues ont tenu bon, au nom du dogme de l’infaillibilité du Parti et du pouvoir absolu. L’image qui subsiste de cette péripétie suggère une forte discipline, mais aussi un rapport de force tendu, assez éloigné de l’image de façade harmonieuse du régime.

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