Le 20/01, Meng Jianzhu, patron des Affaires judiciaires (membre du Politburo) énonça devant la Commission « politique et légale » du Comité Central les instructions de Xi Jinping sur la réforme de la justice : aux « comités judiciaires » présents dans chaque tribunal, Xi ordonnait de laisser les juges instruire leurs affaires en toute indépendance. Ces juges devraient être choisis pour leur « professionnalisme, conscience politique et intégrité », et leur « loyauté envers le Parti, l’Etat et le peuple ».
Autant de formules qui expriment l’ambiguïté du pouvoir face au système judiciaire. Depuis son arrivée à la tête du pays, Xi veut rendre aux tribunaux plus d’indépendance… mais sans toucher au monopole du Parti sur la justice ni surtout à celui de ces « comités » qui, en pratique, désignent les juges et décident des verdicts. Une source essentielle de pouvoir et de richesse.
Pourtant, au terme de cette même conférence, Zhou Qiang, Président de la Cour Suprême, ne manqua pas de s’indigner de la pratique fréquente des juges d’expulser du prétoire les avocats de la défense, il dénonça comme perversion la tendance de ces derniers de s’entendre avec l’avocat général avant le procès pour fixer le verdict d’avance. Et quand l’avocat proteste, il se retrouve chassé du tribunal par les huissiers.
Cette parodie de justice est ancienne en Chine, dénoncée par de nombreux juristes et avocats tel Zhang Sizhi, qui défendit Jiang Qing et la bande des quatre en 1979. De nos jours, le PCC émet le souhait de voir changer les choses, mais sans toucher aux fondements. De fait, les soupirs de Zhou Qiang ne changeront guère à la réalité des prétoires.
Shenzhen au moins, la ville-laboratoire social, voit cette semaine débuter 2 innovations.
L’une est l’implantation du premier « tribunal de circuit », dont les 13 juges prêtaient serment le 28/01 (cf photo). Ils statueront sur les affaires administratives et civiles des trois provinces méridionales – Guangdong, Guangxi et Hainan – et serviront en pratique de Cour de Cassation, pour soulager la Cour Suprême.
En même temps, Qianhai, la zone économique spéciale de Shenzhen, ouvre la première cour d’assise du pays, avec jury—une pratique jusqu’alors inconnue en Chine. Une partie des jurés doit venir de Hong Kong. Toutefois, comme déclare le professeur Dong Likun, de l’Institut des affaires Hong Kong-Macao, tout dépendra du mode de désignation de ces jurés, et des pouvoirs qui leur seront conférés – tout cela reste encore à déterminer.
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