A la loupe : L’éolienne chinoise bulldozer

Partie de rien, l’industrie chinoise de l’éolienne a rattrapé en 10 ans un demi-siècle d’expérience en Europe et aux USA. En 2009, elle commence à exporter en Asie, et double son parc à 25,1Gw/an.

D’ici 2020, le Conseil mondial de l’énergie éolienne (GWEC) la voit décupler ce parc, puis doubler en 2030 à 509Gw, assurant ainsi 17% de l’offre nationale.

En terme de qualité, cette expansion convainc moins, ce réseau souffrant de maux de jeunesse. D’ici 2030, dit GWEC, l’éolienne chinoise ne produira que 50% de sa capacité. Mal localisée, elle ne tourne que 75 jours/an (110j à la britannique). Après quatre ans, elle voit casser turbine, boite, pales. En 2009, ses parcs ne sont encore raccordés qu’à 38%: trop excentrés, et parfois l’opérateur hésite à les brancher, de peur de voir son réseau griller sous sa tension instable.

Ces petits travers ne sont que passagers. En 2009 Sinovel, n°3 mondial a installé 3,5Gw, dont des éoliennes de 113M de diamètre (3Mw), maîtrisant des technologies récentes. Créé en 2008, un «bébé» comme Envision montera en 2011 l’équivalent de 250 turbines d’1,5Mw, dessinées à son centre de R&D au Danemark, temple de l’éolienne. La Chine accélère l’investissement en réseaux intelligents capables de gérer les sautes de tension, (638MM$ d’invests prévus d’ici 2020) et en 15 lignes à super-haute tension pour acheminer le courant de l’Ouest vers la côte. Sous l’action de la Commission de l’Energie, les 70 producteurs chinois de 2009 se restructurent sans état d’â-me. Jusqu’en 2020, les crédits se poursuivront pour financer un réseau national surpuissant : projet politique, que l’objectif de rentabilité n’intègre que progressivement et en douceur.

Il faut tout de même le dire, pour obtenir cet éclatant succès, les dés ont été pipés. La Chine a forcé le transfert des technologies étrangères, combiné à la protection de son marché. Cela s’est fait en 4 temps – comme dans le moteur à explosion: [1] Admission : NDRC et Conseil d’Etat ont invité les ténors mondiaux à équiper la Chine— d’une production made in China à 70% : tous ont répondu présent. [2] Compression : le savoir faire pompé, les licences (allemandes) acquises, on limite le marché pour étrangers aux petits projets, 50Mw max: les étrangers ne vendent plus guère. [3] Explosion : avec des crédits en milliards$ (parfois ONUsiens, issus du protocole de Kyoto), Pékin octroie à ses producteurs des contrats géants, tels ces quatre parcs off-shore d’1Gw annoncés en septembre au large du Jiangsu. [4] Echappement : les étrangers doivent alors réfléchir fort aux options qui leur restent.

L’avant-dernière option était une défense par leurs propres nations ou blocs, au nom des règles de l’OMC (Organisation Mondiale du Commerce).

En 2009, la Chambre de commerce européenne dénonça ces pratiques : en vain, quoique soutenue par Bruxelles et par les Etats membres. Le 17/10, Washington lance une procédure (art.301) dénonçant restrictions à l’export, subsides interdits par l’OMC, discrimination et imposition de transferts technologiques (Pékin dément tout). La démarche peut-elle aboutir? Aucune, selon notre source qui cite les derniers pas de groupes étrangers, tel GE qui ouvre une JV avec une maison de Chongqing. Siemens, Alstom « réfléchissent » à ce type de mariage pourtant passé de mode depuis 10 ans. C’est l’indice ultime, du peu de confiance qu’ont ces industriels dans la capacité de Washington, Bruxelles ou New Delhi de les protéger. Ils optent pour sauver les meubles, et paient le prix lourd pour conserver une entrée sur le marché chinois : le partage de leur technologie et de la moitié des profits !

 

 

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