Xinjiang : Carotte et bâton

Croissance économique et hyper contrôles : tels sont les mots d’ordre contradictoires au Xinjiang en 2018, sous un pouvoir déterminé à en finir avec dix ans d’attentats suicides, de rébellion séparatiste et intégriste ayant causé des centaines de morts. Chen Quanguo, Secrétaire du Parti depuis 2016, accentue la pression suite au retour au pays des Ouighours combattants de Daech, rescapés de la guerre de Syrie. Leurs arrestations, en 2017, ont été multipliées par 16 sur 12 mois.

Aussi les caméras de surveillance pullulent, dans les magasins et aux carrefours, reliées à une base de données faciales de toute la population. C’est le système le plus avancé du pays : selon un expert, nul suspect ne peut faire plus de 200m hors de son domicile sans se retrouver sur écran, identifié.
Agents, cadres exigent en tout temps présentation des papiers, même pour prendre bus, train ou métro d’Urumqi (dont l’ouverture est proche). Quiconque triche en présentant les papiers d’un autre, se fait repérer à la caméra et encourt 200 ¥ d’amende. Ces contrôles-papier étant moins destinés à épingler les suspects que pour les décourager de se déplacer. Une fraction de la minorité ouïghoure a été placée en camps de rééducation, pour une durée indéterminée : ces hommes et femmes de tous âges seraient 120.000 au sud de la région autonome (Kashgar), et 500.000 à un million sur toute la région – jusqu’au 10ème de la population ouïghoure  musulmane.
À 20.000 km de là, s’inquiétant des abus de cette « guerre du peuple contre la terreur », le Sénat américain envisage de frapper les cadres impliqués dans cette répression au nom de la sécurité nationale : sous le coup d’un Global Magnitsky Act, leurs compte aux USA pourraient être gelés et eux-mêmes interdits de visa.

Parallèlement, les investissements au Xinjiang augmentent : Pékin investit 300 millions de $ en rénovation des réseaux d’irrigation autour d’Aksu, Kashgar et Hotan. Au Nord-Ouest, 240.000 enfants de maternelles reçoivent chaque matin un petit carton de lait, au dos duquel figurent les paroles d’un chant du Parti.

China Southern ouvre au 21 juin une ligne directe Urumqi-Lahore (Pakistan). Au Pakistan, TBEA, firme du Xinjiang, monte au Punjab la première centrale solaire du pays. Ailleurs, une ligne électrique à ultra haute tension de 3300 km est inaugurée, reliant Xinjiang et l’Anhui, pour y fournir 66 milliards de kWh. Pour Pékin, pas de doute, la répression doit mater la révolte, mais les cœurs doivent être reconquis par la modernisation et l’élévation du niveau de vie.

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