Temps fort : Japon et Chine, entre hiver et printemps

L’arrivée en septembre 2009 de Yukio Hatoyama, Secrétaire Général du Parti démocratique du Japon, au poste de 1er ministre, a remis sur ses rails la normalisation avec la Chine. Ce qui n’empêche les incidents de s’accumuler, exacerbés par la crise et le poids du passé. Le 17/01, Katsuya Okada et Yang Jiechi, ministres des affaires étrangères, se rencontraient à Tokyo pour faire le point de contentieux et projets, espoirs et soucis.

1er souci, l’exploitation imminente par la CNOOC (China National Off-shore Oil Corporation) du gaz sous-marin de Chunxiao: «viol de l’entente de 2008», disent les Japonais qui croyaient avoir convenu avec Pékin de partager l’exploitation du gisement mitoyen, tandis que les Chinois rappellent que le lieu d’où ils forent, est dans leurs eaux territoriales. Le débat semble vain, vu la faiblesse des réserves estimées, 92Mm3. Mais si la Chine va de l’avant, Tokyo l’avertit d’«actions en retour». L’enjeu étant le partage de gisements à découvrir dans la zone à l’avenir. Sur le fond (si l’on peut dire), Pékin s’appuie sur la définition de la démarcation par la Convention du Droit de la mer (qui l’avantage), à savoir «l’extension naturelle du plateau continental». Le Japon défend le principe opposé, celui de la ligne médiane.

2 ième différend : sur l’îlot de Okinotori, à 2000km plus au sud, Tokyo a investi 300M$ dans des digues autour du site et un phare inhabité. Le 18/01, la Diète (son Parlement) entamait l’étude d’un projet de loi « sur la protection des îles éloignées ». Tout cela est rejeté par la Chine qui refuse d’appeler Okinotori une île, lui préférant le terme d’«atoll de 10m²». C’est que les implications sont lourdes, en terme de ressources d’avenir (hydrocarbures, nodules polymétalliques). Si le Japon fait reconnaître ce statut d’île, il héritera de 400.000km² de ZEE Zone Economique exclusive (maritime), et d’un plateau continental de 740.000km². Clairement, pour s’entendre, les deux pays devront confronter experts et diplomates durant des années, et les temps ne sont pas murs.

Un 3ième litige se dégonfle: après en avoir soupesé l’éventualité, Tokyo renonce à s’associer au projet du G7 financier (les 5-6/02 à Iqaluit, Canada) de réclamer à la Chine plus de flexibilité sur le ¥uan. Le Japon peut se dire que ce combat n’en vaut pas la chandelle, puisque Pékin semble proche de réévaluer de toute manière (voir notre éditorial). Tokyo réagit aussi aux prouesses commerciales de son voisin, nouveau second exportateur alors que le Japon n’est plus que 4ème. De janvier à octobre 2009, 13% de l’export nippon partait aux USA contre 20% à la Chine, acteur premier de la reprise japonaise, et partenaire qu’il convient de ménager plus que jamais !

Aussi malgré toutes ces anicroches, la tendance est à l’embellie. De source nippone, le gouvernement propose à Hatoyama de se rendre à Nankin (en marge de l’Exposition Universelle de Shanghai ?) pour y présenter des excuses «sans ambiguïté» pour le massacre de 1937. Suite à quoi Hu Jintao viendrait à Hiroshima le 15 août, 65ième anniversaire de la reddition japonaise, rappeler la position chinoise pacifiste, sur l’usage de l’arme nucléaire. Ni confirmé ni infirmé, cet échange de visites est évidemment dans l’air du temps.

Enfin, Chine et Japon se découvrent un nouvel intérêt commun. A Okinawa, on vit mal la présence d’une base américaine, qui doit changer de site mais non quitter l’île. Pékin bien sûr, serait prête à bien des sacrifices pour les aider à faire repartir l’encombrant allié. A tout le moins, une opportunité se présente aujourd’hui pour la Chine. A condition d’en payer le prix, en rassurant le Japon, et toute l’Asie, sur ses ambitions militaires…

 

 

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