Pol : Chine-Japon : visite en avril, dégel en novembre

Chine-Japon – visite en avril, dégel en novembre

Wen Jiabao s’était rendu à Tokyo en avril pour assister aux derniers jours d’exercice de son homologue Shinzo Abe : sept mois plus tard, en résulte (20 /11), en marge de l’ASEAN à Singapour, une rencontre presque chaleureuse avec Yasuo Fukuda son successeur, et l’annonce d’une série de meetings : la visite du Président chinois l’an prochain, un dialogue économique le 1/12, et le départ immédiat du Shenzhen, croiseur chinois, pour un port japonais —ce sera la 1ère fois en plus de 60 ans. Wen Jiabao l’a lui-même souligné, les deux pays en sont à un tournant de leur histoire. En multipliant les visites à Yasukuni, sanctuaire-fondation d’idéologie négationniste, Junichiro Koizumi, l’avant-dernier leader nippon avait porté les relations avec Tokyo à leur niveau le plus bas en des décennies. Abe son successeur, avait compris le besoin de réconcilier, mais sans conviction.

Avec Fukuda, c’est différent. Son père Takeo signa en 1978 le traité d’amitié avec la Chine.  Pékin s’en souvient, et se prend à rêver d’un leadership sur l’Asie, partagé avec Tokyo, notamment en matière d’influence environnementale. Mais pour ce faire, il faut d’abord régler de lourds contentieux tels ceux de la souveraineté sur les îles Diaoyu-Sankaku, et du partage du pétrole off-shore mitoyen, ou encore, celui du groupe Tomida, maltraité par la mairie de Kunshan (Jiangsu). Autant de tâches ardues, et qui débutent à peine. Enfin, l’essentiel est déjà acquis : le contact est repris.

Le nouveau Pékin antique frappe au portail

Depuis 2001, en préparation des Jeux Olympiques, 65% des 7M de m² d’architecture d’époque Ming ont été démolis pour laisser place aux galeries béton style Soho ou The Place, tandis que jusqu’à 2M de citadins prenaient la route des banlieues. Restent 16,410km² du centre historique.

Tardivement sensibilisée à son patrimoine, la mairie veut les sauver. Publié par la commission municipale d’urbanisme, le plan de redéploiement travaille sur des concepts inédits : considérer le centre comme un ensemble, préserver reliques, perspectives et façades, interdire les stations d’essence, améliorer le trafic et l’entretien des sites… Mais un lièvre est levé par Liu Xiaoshi, l’ex-urbaniste-chef. Ce plan prévoit le déplacement de 200.000 habitants pour alléger la densité de peuplement des hutong et siheyuan. Mais alors comment empêcher, les promoteurs de se servir dans ce tissu urbain hors de prix, pour en faire du marbre de luxe ? Quid de la préservation des microclimats culturels, fruit de décennies de bonheur calme ? Questions sans réponse dans le nouveau plan, et donc en grand risque de passer au classeur universel des voeux pieux.                                                          

NB : Une raison d’espérer : Huang Yan, à la tête du bureau, démontre cinq originalités sur son CV : elle est femme, jeune (43 ans), docteur en urbanistique à l’université de Louvain, non membre du Parti, et estimée de Hu Jintao.

Nouvelles tensions à l’Ouest

Lors du festival de Lithang (Sichuan) en août, Runggye Adak, nomade, 52 ans, cria ses souhaits de longue vie au Dalai Lama. Son arrestation causa une émeute le lendemain, forçant la troupe à tirer en l’air. Le 20/11, un juge de Ganzi le condamne à 8 ans. Trois autres Tibétains sont condamnés ailleurs, de 3 à 10 ans, pour séparatisme ou espionnage, ayant posté photos et données hors du pays. Coïncidence ? Le Dalai Lama, peut-être renforcé par ses récentes rencontres avec des personnalités telles G.W. Bush et A. Merkel, n’exclut plus (20/11) de nommer son successeur, rompant avec la pratique théologique des Bonnets jaunes de la sélection des réincarnations. Cette hypothèse suscite la colère de Pékin, dénonçant la rupture de tradition. L’objectif du Dalai étant d’éviter, comme dans le cas du Panchen Lama, la sélection d’un Dalai Lama sous contrôle.

NB : la question de fond semble ailleurs – pourquoi l’exacerbation de tensions entre Pékin et Lhassa, que le régime tenta d’éviter depuis des années en investissant des milliards dans la modernisation, l’éducation, voire le respect de la liberté de culte? Risquons deux explications:

[1] Ouvert en été 2007, le train Pékin-Lhassa a accéléré la l’acculturation, réveillant le malaise chez les Tibétains de 2de génération face à leur héritage, et

[2] Face au clergé lamaïste, tout comme face aux autres confessions, aucun concordat n’a été trouvé. Désireux de l’accord, Pékin s’est avéré incapable de concilier ses différentes tendances internes, aux intérêts privés contradictoires, mais prédominants.  

 

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