Editorial : Pékin sous pression—l’enjeu des Jeux Olympiques

En 2001, lors de l’attribution des Jeux Olympiques de 2008 à Pékin, nul ne pouvait prévoir qu’en résulterait pour le régime une double tension, de l’intérieur et de l’étranger, perturbant ses équilibres !

De l’intérieur, chez les cadres, de la base au sommet, on sent le besoin de gommer les contradictions sociales. La censure est hyperactive, la justice frappe. Partout on parade les malfaiteurs condamnés (cf photo p.4), on brûle la drogue saisie, on tient des exercices antiterroristes. Mais les manifs récentes, de Xiamen (anti-industrielle) à Zhengzhou (des étudiants) sont là pour montrer les progrès rapides en émancipation de la société.

Tandis qu’hors de la Chine, des actions inédites prolifèrent pour faire pression. ONG, politiciens, artistes et syndicalistes d’Europe et d’Amérique s’y joignent, pour réclamer des concessions: sur le Darfour, la pratique du secret d’Etat comme outil juridique de répression, et le Tibet (cf p.2). Play Fair 2008 lâche une bombe (11/06), accusant, quatre usines cantonaises de mascottes olympiques, de faire travailler clandestinement des enfants de 12 ans, sous-payés et astreints à des conditions dangereuses. Le BOCOG, le Comité d’organisation des Jeux Olympiques de Pékin 2008,  répond en dépêchant des inspecteurs, et menaçant de révoquer les licences !

Sous cette douche froide de campagnes abîmant son image, les félicitations du Comité International Olympique à Pékin (11/06) pour la qualité de ses préparatifs, apparaissent bien insuffisants pour alléger l’atmosphère !

Clairement, le bât blesse. La Chine montre une vulnérabilité. A travers « ses » Jeux, elle veut imposer une image de partenaire fiable. L’étranger ne veut la lui accorder qu’en échange d’efforts visibles dans le démantèlement de son style de régime autoritaire. Même si un boycott des JO est irréalisable et nuisible, à 14 mois des JO, nul besoin d’être devin pour prédire que ce double ressort ne fera que se tendre, jusqu’en août 2008 !

Sur le champ diplomatique, la Chine semble en train de méditer des concessions pour réduire son isolement :

[1] sur le Darfour, en accélérant l’application du plan de paix de l’ONU —qui devrait aboutir à terme, au partage des recettes du pétrole local avec les ethnies non-musulmanes ;

[2] sur le réchauffement global, en offrant en décembre à Bali, aux pays négociateurs du second protocole de Kyoto, un quota contraignant (même minime) de coupe de ses émissions de gaz à effet de serre; et

[3]  sur les échanges commerciaux, en élargissant aux USA et à l’Union Européenne son marché des services : le commissaire P. Mandelson vient (12/06) de déclarer au ministre Bo Xilai que l’excédent chinois était « non durable » – inacceptable.

Les JO de Pékin 2008, ici, sont pris en otage de deux mécanismes sans aucun lien avec eux. D’une part, la tentation  protectionniste euro-américaine, conséquence politicienne de la poussée de l’export chinois, et de l’autre, la déception d’une opinion mondiale après 20 ans sans progrès en matière de démocratie. Or, des secteurs agissants de cette opinion semblent déterminés à saisir la chance qui s’offre, et d’ « aider » Pékin à tenir sa parole donnée au CIO en 2001 : de «promouvoir à travers les JO, les droits de l’homme en Chine ! »

 

 

Avez-vous aimé cet article ?
Note des lecteurs:
0/5
8 de Votes
Ecrire un commentaire