«L’ANP doit se plier d’elle-même à l’autorité du PCC » : tel est l’insipide viatique donné à l’Assemblée Nationale Populaire par Li Peng son ex-Président, en un ultime discours (10/3) salué de longs sinon sincères applaudissements.
A l’heure du bilan,Li Peng, figure mal aimée et complexe, apparaît la meilleure incarnation du système, qu’il servit avec pugnacité.
Fils d’un communiste exécuté par Chiang Kaichek, il fut adopté par Zhou Enlai, qui lui ouvrit les écoles d’élite du Parti, et un pedigree socialiste impeccable. Stalinien sans état d’âme, il rassure à la fin des années 1980 le baitoubang (« gang aux cheveux blancs ») des vieux leaders et brûle les étapes de la carrière politique. C’est lui qui parvient, en 1988-1989, à renverser l’équipe libérale de Zhao Ziyang, et à réprimer le printemps de Pékin (juin 1989), gagnant ainsi son image historique indélébile, et pour le pays, 12 années d’un leadership conservateur pragmatique, qui exécutera -à contrecoeur-le programme de ses adversaires.
Depuis lors, Li resta au pouvoir,malgré le choix d’un autre n°1 (Jiang Zemin), puis (dès ’93) d’un autre mentor économiste, Zhu Rongji qui reprit en ’97 sa place de 1er ministre. Ni le tournant imposé par Deng en ’92 pour rétablir modernisation et politique d’ouverture,ni les bouleversements réformistes technocratiques imposés par Zhu, ne parvinrent à ébranler sa foi dans le monopole du Parti et la primauté de la loi.
Ce que l’on sait moins est que Li,hydraulicien formé à Moscou, fut aussi le père du parc électrique chinois, du réseau hydroélectrique géant à l’Ouest, dont le fleuron est le barrage des Trois Gorges (= 20 réacteurs de 1000Mw).Li imposa le programme nucléaire et les 4 tranches achetées à la France (Alstom, Framatome). Li conçut aussi le plan d’ intégration du réseau chinois inspiré de l’EDF,dont il est admirateur.
Sur le tard (’02) plusieurs de ses proches furent impliqués -peut-être à l’instigation d’un adversaire- dans des scandales liés au secteur de l’énergie. Comme patron du Parlement, Li ne démérita pas, muselant toute velléité de renforcement de ses pouvoirs, mais portant aussi à son actif le vote de 109 lois nouvelles et la révision de 124 autres.
Poussé à la retraite, il cède la place (18/3) à Wu Bangguo, technocrate modéré. Non sans avoir implanté au sommet Luo Gan, autre conservateur dur, pour prévenir tout changement de ligne – prouvant ainsi sa fidélité intacte au seul principe qu’il reconnaisse – l’exercice du pouvoir!
Sommaire N° 9