Editorial : Comité Central – le Plenum du tournant caché !

Rarement Plenum du PCC aura été si secret. D’autre part, sous Hu Jintao, l’ordre institutionnel est bouleversé : le conclave estival (discrétionnaire) de Beidaihe avait été annulé, et le nombre de meetings du Comité Central, triplé : c’est un style nouveau, plus légaliste et transparent! 

Volontairement abstrait, l’agenda du Plenum cache bien l’enjeu : une “décision d’amélioration de l’économie socialiste de marché”, et une “proposition d’amendements à la Constitution”, à faire entériner en mars 2004 par l’ANP, l’instance compétente. Ces deux démarches visent en réalité un but ambitieux : renforcer la  propriété privée, c’est à dire démanteler l’Etat socialiste. Jusqu’alors “bien inaliénable de la RPC”, le sol pourrait désormais être commercialisable. Il s’agit aussi de jeter les bases légales et techniques pour privatiser jusqu’à 49% des En-treprises d’Etat, voire de la presse (cf col. centrale), à commencer par le recensement de la propriété au sein de l’Etat. D’autres points aborderont la réforme des banques, de la Sécurité Sociale, la lutte à la pauvreté, etc.

Au plan politique, le Politbureau jusqu’alors intouchable se voit astreint à demander son “quitus” au Comité Central : atteinte à ses prérogatives, et un pas précis vers la transparence et la démocratie, façon Hu Jintao!

Un dossier nouveau a occupé l’avant-scène du Plenum: le plan de relance du 东北 Dongbei , l’ex-Mandchourie (Heilongjiang, Jilin, Liaoning, 107M habitants) devenue friche industrielle. Ce plan suit celui du gouvernement précédent, de rééquilibrage du Grand-Ouest. Mais avec une différence : soucieux d’éviter les «expériences» (sic) du Xinjiang ou du Ningxia, Pékin ne prévoit plus d’injections massives de crédits. Quatre outils sont envisagés :

[1] les mécanismes de marché (l’incitation fiscale),

[2] les ventes d’actifs publics (la privatisation),

[3] l’appel à un “réveil”, quittant la mentalité assistée pour rentrer dans une logique de profit,

[4] une synergie entre Dongbei et Grand-Ouest, avec recul  de l’action centrale.

On voit les faiblesses du plan : pas de crédits, et la privatisation du Nord-Est ne s’engage pas sous les meilleurs auspices alors que Brilliance, fleuron de l’industrie semi-privée locale, est en cours de renationalisation dans des conditions légales peu claires, avec son créateur en fuite… Mais sous réserve d’inventaire, le plan Dongbei a pu être mis en exergue du Plenum, moins pour son mérite propre que comme “arbre cachant la forêt” – le tournant dans l’ombre. Hu Jintao serait partisan d’“améliorer le système existant, pas de le changer”. Sa stratégie est double : s’appuyer toujours sur la légalité, et sur l’unité du Parti—ne jamais isoler publiquement ses adversaires. Moyennant quoi, sans en avoir l’air, il vient, pour la 1ère fois en 15 ans, de faire rebasculer le pouvoir au sein du PCC, vers le camp réformiste, en évitant les erreurs de ses prestigieux aînés !

Avez-vous aimé cet article ?
Note des lecteurs:
0/5
9 de Votes
Ecrire un commentaire