Editorial : 2018 – Promesses et défis

L’année 2017 qui s’achève, fut témoin de la tumultueuse mutation de la Chine. L’économie a vu se poursuivre les concentrations industrielles et une inflexion vers la consommation intérieure et les services. Le programme spatial suit son cours et le long-courrier chinois C919 (de la Comac) prit son l’envol. En politique, le Congrès d’octobre désigna l’équipe qui dirigera le pays jusqu’en 2022, sous la poigne de Xi Jinping. Mais qu’est-ce que 2018 réserve à la Chine ? Osons quelques prédictions :

– En intelligence artificielle, la reconnaissance faciale permettra le contrôle des personnes dans leurs déplacements, en métro, à la banque, ou dans les aéroports. Le « crédit social » poursuivra sa construction, en route vers 2020 où cette note morale individuelle, calculée à partir de « big data », déterminera les droits de chacun en matière d’accès au crédit, à l’emploi… À Wuzhen (Zhejiang), la Conférence mondiale de l’internet, les 3-5 décembre, le Président Xi Jinping (cf photo) répéta le principe de cyber-souveraineté. Certes, pour la Chine, le risque de cette censure omniprésente est de faire de l’internet chinois un « intranet » séparé du monde, d’affaiblir la recherche, la compétitivité chinoise… Mais pour Pékin, cela ne semble pas être la priorité ! Sur place, des ténors du secteur, tel Tim Cooks (Apple) acceptèrent en silence les règles du jeu du marché chinois, vus les profits réalisés (ou espérés). Grâce aux applications disponibles sur son App Store Chine, Apple engrangeait 7 milliards de $ en 2016.

– En mer de Chine du Sud, la Chine poursuivra en 2018, la réconciliation avec ses voisins. Justement, aux Philippines, le Président Duterte prie l’armée chinoise de patrouiller autour de ses îles Sulu, pour tenir en respect les pirates islamistes.

– Côté « nouvelles routes de la soie » (Belt & Road Initiative – BRI ), Pékin va revoir sa copie. Le Népal et le Pakistan viennent de rejeter deux projets chinois de barrages en milliards de $, leur reprochant d’être trop chers, conclus sans appels d’offre, et sous des conditions insupportables de remboursement du crédit (la Chine nie catégoriquement). 

– Côté croissance, l’objectif de 2017 « autour de +6,5% » sera poursuivi en 2018, tout en insistant sur la qualité des investissements plus que leur volume. L’immobilier et les infrastructures reculeront relativement, avec une hausse de +12% au lieu de 20% en 2017.

– En diplomatie, se profile un risque de conflagration, entre une Chine déterminée à « endosser un rôle majeur dans les affaires du monde » (comme le déclarait Xi Jinping le 1er décembre), et des Etats-Unis curieusement contradictoires, partagés entre réflexes protectionnistes et ambition de rester leader mondial. Trump envisage un conflit commercial sur les panneaux solaires ou les semi-conducteurs. Cela lui permettrait de tenir ses promesses électorales et d’espérer sa réélection en 2020. Les USA revendiquent l’ouverture du marché chinois des services et des marchés publics, réservés aux firmes chinoises. Sur ce dossier, l’Union Européenne les soutient : nul doute que si la Chine ne fait pas des concessions à ses partenaires en 2018, les rapports s’en ressentiront. Mais la Chine y est-elle prête ? L’impression générale est pessimiste – et pourtant, de cette réponse chinoise dépend peut-être la survie de l’OMC. Face à Trump et ses exigences commerciales, la Chine pourrait gagner un sursis en lâchant la Corée du Nord, en exerçant toutes les pressions dont elle dispose (notamment cesser de lui livrer du pétrole) pour la forcer à renoncer à sa bombe atomique. En attendant, Etats-Unis et Corée du Sud mènent la plus grande manœuvre militaire en 40 ans (260 chasseurs-bombardiers). Côté chinois, le Quotidien du Jilin (province frontalière) prépare sa population au pire, et l’APL mène des exercices à la frontière. Mais cela sera-t-il suffisant pour dissuader Pyongyang ? Il est permis d’en douter !

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