Technologies & Internet : Baidu en pleins remous

En 2014, Wei Zexi, 19 ans, étudiant à Xi’an (Shaanxi), fut diagnostiqué d’un cancer rare. Plusieurs traitements échouèrent. Désespéré, il chercha alors sur Baidu, le moteur de recherche aux 700 millions d’usagers et au quasi monopole grâce au Grand Firewall chinois. Il y trouva dans les premiers résultats de la recherche « anti-cancer », un traitement de pointe très séduisant. Co-développé par Stanford (USA), dispensé à Pékin par l’hôpital n°2 de la police armée, il consistait en une culture in vitro de cellules immuno-actives du patient, réinjectées ensuite pour détruire les cellules malades. Seul souci, le prix exorbitant : 200.000 yuans. Mais la famille se cotisa, puis Wei reçut à 4 reprises le traitement.

Nonobstant, au fil des mois, le mal triompha. Avant son décès le 12 avril, Wei publiait sur internet un brûlot vengeur, accusant Baidu de s’être laissé acheter par des charlatans pour vanter un remède « bidon ». En fait, il ne s’agissait pas d’un article, mais d’une publicité – une mention figurait bien sur la page, mais en petits caractères. Quant à l’implication de Stanford, on découvre sur Google que l’institut médical avait abandonné ces recherches. L’hôpital n°2 ne pratiquait pas directement le traitement, mais le laissait administrer dans ses murs par Putian, gros groupe privé. Depuis le décès de Wei, il a fermé ses portes à tout nouveau patient.

Sur la toile, l’affaire suscita colère en Chine, et une perte d’image pour Baidu, dont l’action perdait 8% en bourse de New York, 5,3 milliards de $ ! L’Etat chinois même, prit l’affaire très au sérieux : trois organes publics dont l’Agence nationale du cyberespace ont ouvert une enquête, qu’ils promettent de rendre publique. Plusieurs analystes s’attendent à une sanction sévère, amende ou même retrait de licence publicitaire sur le marché de la santé. Des contrôles stricts devraient suivre, en complément à la récente « loi de publicité médicale ».

Enfin, cela pourrait être une bonne occasion pour l’Etat d’affaiblir le monopole de Baidu, qui jouit de trop de pouvoirs, en tant que voix unique de la recherche en ligne. Une punition exemplaire satisferait aussi l’opinion, sur un dossier où les intérêts du régime ne sont pas directement engagés : sanctionner Baidu serait faire d’une pierre deux coups.

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