En Chine, des décennies de négligence environnementale se paie au prix fort : émettant 22% du CO2 de la planète, la pollution cause 1,5 million de décès prématurés chaque année. Mais depuis deux ans, suite à l’apparition de nuages de smog d’une virulence et d’une durée record, le discours a changé. L’Etat veut réagir. The end of China’s coal boom , le rapport de Greenpeace
Incluant les deltas des Perles (Canton) et du Yangtzé (Shanghai), 6 provinces se sont imposées d’audacieuses coupes d’usage du charbon d’ici 2017 : moins 50% à Pékin, -13% au Hebei et Shaanxi,-19% à Tianjin, -21% à Chongqing. Avec -5%, le Shandong fait l’effort le plus rude : 1er usager national, il grille autant que l’Inde ! D’ici 2020, ces régions remplaceront 655 millions de tonnes de houille, par le gaz ou les énergies renouvelables, ce qui les ramènera à leur niveau de 2010. Autre bonne nouvelle : la croissance du charbon qui explosait en 2003 (+19%), a freiné à +2,6% en 2013. En 2012, 10 provinces cumulant 30% de la consommation nationale, passaient en croissance négative avec -66,5 millions de tonnes.
Alors que les experts du GIEC, pour l’ONU, visent des coupes nationales d’émissions qui limiteraient le réchauffement global à 2°C d’ici 2100, les efforts que la Chine s’apprête à faire, avec une coupe de 1,3 milliards de tonnes de CO2 d’ici 2020, devraient limiter ses émissions à 8,5 milliards de tonnes. Elle n’aurait plus que 500 millions de tonnes à couper pour être sur les rails du plan.
Comme on le voit, la Chine change son fusil d’épaule. Reste certes la question des palabres internationales, du remplacement du protocole de Kyoto, où elle bloque tout compromis. Mais elle ne semble plus loin de basculer : son besoin de changer les choses, prenant le dessus sur sa sensibilité cocardière. D’autant qu’en énergies renouvelables, elle est très en avance : en 2012, avec une hausse de 26 terawatts-heures (TWh) en capacité installée, ses parcs d’éoliennes, croissaient plus vite que ses centrales thermiques…Greenpeace note les implications, si à Paris en décembre 2015, à la conférence COP21, la Chine votait un plan doté de quotas nationaux contraignants : elle forcerait d’autres pays réticents à la suivre tels Etats-Unis et Canada, et deviendrait historiquement, celle par qui changèrent les règles du jeu de l’énergie.
Autre tournant crucial : selon Cao Mingde, professeur de droit, les amendements à la loi de l’Environnement de 1989, seront votés en 2014. Le ministère pourrait dorénavant saisir et fermer des centrales, et fermer des zones entières à toute activité polluante. D’ailleurs, Pékin vient d’ordonner le déménagement dans le Hebei, de 53 usines pékinoises (acier, industries lourdes, chimie…) avec pour objectif d’en déplacer 500 d’ici la fin de l’année. Mais les ONG n’ont pas encore le droit de se porter partie civile (mais cela pourrait vite évoluer)…Tout ceci le suggère, l’Etat prend conscience du besoin de remonter la pente : faute de tel sursaut, une population désespérée et le dos au mur, n’acceptera plus longtemps l’inacceptable !
Sommaire N° 16