Le Vent de la Chine Numéro 16

du 19 au 25 avril 2014

Editorial : Pollution : au fond du gouffre, la Chine remonte la pente
Pollution : au fond du gouffre, la Chine remonte la pente

En Chine, des décennies de négligence environnementale se paie au prix fort : émettant 22% du CO2 de la planète, la pollution cause 1,5 million de décès prématurés chaque année. Mais depuis deux ans, suite à l’apparition de nuages de smog d’une virulence et d’une durée record, le discours a changé. L’Etat veut réagir. The end of China’s coal boom , le rapport de Greenpeace

Incluant les deltas des Perles (Canton) et du Yangtzé (Shanghai), 6 provinces se sont imposées d’audacieuses coupes d’usage du charbon d’ici 2017 : moins 50% à Pékin, -13% au Hebei et Shaanxi,-19% à Tianjin, -21% à Chongqing. Avec -5%, le Shandong fait l’effort le plus rude : 1er usager national, il grille autant que l’Inde ! D’ici 2020, ces régions remplaceront 655 millions de tonnes de houille, par le gaz ou les énergies renouvelables, ce qui les ramènera à leur niveau de 2010. Autre bonne nouvelle : la croissance du charbon qui explosait en 2003 (+19%), a freiné à +2,6% en 2013. En 2012, 10 provinces cumulant 30% de la consommation nationale, passaient en croissance négative avec -66,5 millions de tonnes. 

Alors que les experts du GIEC, pour l’ONU, visent des coupes nationales d’émissions qui limiteraient le réchauffement global à 2°C d’ici 2100, les efforts que la Chine s’apprête à faire, avec une coupe de 1,3 milliards de tonnes de CO2 d’ici 2020, devraient limiter ses émissions à 8,5 milliards de tonnes. Elle n’aurait plus que 500 millions de tonnes à couper pour être sur les rails du plan.
Comme on le voit, la Chine change son fusil d’épaule. Reste certes la question des palabres internationales, du remplacement du protocole de Kyoto, où elle bloque tout compromis. Mais elle ne semble plus loin de basculer : son besoin de changer les choses, prenant le dessus sur sa sensibilité cocardière. D’autant qu’en énergies renouvelables, elle est très en avance : en 2012, avec une hausse de 26 terawatts-heures (TWh) en capacité installée, ses parcs d’éoliennes, croissaient plus vite que ses centrales thermiques…Greenpeace note les implications, si à Paris en décembre 2015, à la conférence COP21, la Chine votait un plan doté de quotas nationaux contraignants : elle forcerait d’autres pays réticents à la suivre tels Etats-Unis et Canada, et deviendrait historiquement, celle par qui changèrent les règles du jeu de l’énergie.

Autre tournant crucial : selon Cao Mingde, professeur de droit, les amendements à la loi de l’Environnement de 1989, seront votés en 2014. Le ministère pourrait dorénavant saisir et fermer des centrales, et fermer des zones entières à toute activité polluante. D’ailleurs, Pékin vient d’ordonner le déménagement dans le Hebei, de 53 usines pékinoises (acier, industries lourdes, chimie…) avec pour objectif d’en déplacer 500 d’ici la fin de l’année. Mais les ONG n’ont pas encore le droit de se porter partie civile (mais cela pourrait vite évoluer)…Tout ceci le suggère, l’Etat prend conscience du besoin de remonter la pente : faute de tel sursaut, une population désespérée et le dos au mur, n’acceptera plus longtemps l’inacceptable !


Politique : Anti-corruption et luttes de factions
Anti-corruption et luttes de factions

Depuis novembre 2012, la campagne anti-corruption n’a fait que prendre de l’ampleur, un fait unique en 30 ans d’histoire du pays. Les têtes tombent : Zhang Qinyun, patron du Hubei media group, Shen Peiping, vice-gouverneur du Yunnan, Yao Mugen, vice-gouverneur du Jiangxi, ou Song Lin, président de China Resources, sont arrêtés. Dix vice-ministres (ou ministres) sont également sous enquête. Stressés, les cadres sont de plus en plus tentés de mettre fin à leurs jours : depuis 2013, sur 54 décès « non-naturels », 23 se seraient suicidés, dont Xu Ye’an, n°2 au Bureau national des pétitions, trouvé mort dans son bureau.

Le clan de Zhou Yongkang dans l’oeil du typhon

L’œil du typhon se concentre sur l’entourage de Zhou Yongkang. Depuis janvier, 300 de ses proches, arrêtés, se sont vu saisir 15 milliards de $ de biens (en cash, villas, voitures de luxe). Parmi eux : Liu Han, milliardaire du Sichuan (accusé de délits mafieux dont 9 meurtres, ex-partenaire d’affaires de Zhou Bin, fils aîné de Zhou Yongkang), Guo Yongxiang, aide de Zhou au Sichuan (exclu du PCC), Zhao Miao, patron de l’organisation du PC au Sichuan, Yan Cunzhang, chef de division à la CNPC (un des fiefs de Zhou)…

Sous l’impulsion de son chef Wang Qishan, la campagne s’emballe et s’en prend à ses propres enquêteurs ! Un des 130 superflics, Shen Weichen, secrétaire du PC à la Chinese Association for Science & Technology (la CAST, très active en R&D militaire), au rang de ministre, est placé sous « double investigation » (双规, shuanggui, 12/04), histoire de marteler que le temps des dessous-de-table est fini. 

Cette traque rend l’air du temps un peu surréaliste, artificiellement frugale, et tendue. A Canton, tout cadre doit dévoiler au moins 10 jours avant, son budget pour tout mariage ou enterrement. A la cantine, on consomme des portions administrativement congrues et les banquets ont diminué de moitié. Pékin s’apprête à interdire l’achat de cigarettes aux frais de l’Etat. Et après s’être jetés mi-mars sur 11 provinces, les limiers de la Commission Centrale de Discipline, font une volée d’arrestations dans le Shanxi… L’économie s’en ressent : les hôtels 5 étoiles souffrent, les budgets restent non-dépensés, les chantiers sont à l’arrêt. Même les théâtres, faute de public, coupent les spectacles jusqu’aux 3/4 (au Jilin).

Nul doute, la campagne est dangereuse pour la stabilité du régime–elle suscite une lutte acharnée au sein du Parti. Pas seulement Zhou Yongkang, mais aussi Jiang Zemin, ses ex-lieu-tenants Jia Qinglin, Li Changchun et Wu Bangguo, et même Li Peng, avec leurs clans, fabuleusement enrichis, sont vulnérables. C’est le dogme de l’intouchabilité des membres du Politburo qui est menacé par le principe de la primauté de la loi. Or Xi ne peut se permettre de frapper «tous» les corrompus qui, selon une enquête interne secrète de 2013, seraient « plus de 30% » du corps des fonctionnaires des 3 pouvoirs (Parti, gouvernement, armée). Les «tigres», anxieux, doivent soit attendre leur chute, soit se liguer pour se défendre, pour faire tomber Xi Jinping. En mars, Wang Qishan avouait le poids écrasant sur ses épaules : « la situation est plus grave que nous le pensions au départ ».

Suivant, les points de vue, la campagne a deux enjeux : pour Xi, il faut briser la digue qui préserve les privilèges des clans, et nommer des centaines de cadres intègres et favorables à la réforme ; tandis que les ultras des grands clans résistent, moins pour préserver leurs privilèges que pour se protéger ensemble de la chute—début avril, Jiang avertissait Xi de « ne pas déployer trop large l’empreinte » de la campagne.

Hu Jintao rend hommage à Hu Yaobang

Hu Jintao Visite Hu Yaobang 11'04Or, le 11/04, Hu Jintao se rendit en visite mi-officielle, mi-secrète à Liuyang (Hunan), berceau de Hu Yaobang, théoricien réformateur dont le décès (15/04/89) avait lancé le printemps de Pékin, et se prosterna de-vant sa statue. Au-delà du témoignage de sa gratitude envers l’homme qui l’avait nommé chef de la Ligue de la Jeunesse, son ascenseur vers le pouvoir suprême, la visite avait aussi un sens politique : elle affirmait le soutien de Hu Jintao -et de la Ligue- à la campagne de Xi Jinping. Pour Hu, c’est une revanche sur Jiang Zemin, qui l’avait bloqué durant ses 10 ans de mandat, par la cage de fer des institutions qu’il avait noyautées avant son départ. Mais à présent, Hu aide son successeur à faire ce à quoi il a lui-même échoué. 

Un bruit circule : la campagne s’arrêtera à Zhou Yongkang et à un petit nombre de corrompus, dont les généraux Xu Caihou (ex-chef d’état-major) et Gu Junshan (ex-n°2 de la logistique). Ce qui permet à 18 généraux, rassurés, de faire un rare serment d’allégeance à Xi (02/04), et donne le sentiment que Xi, en quête d’un compromis, l’a peut-être déjà trouvé ! 

Enfin, Xi prépare deux de ses proches alliés, issus de son fief du Zhejiang, à de hautes fonctions : Xia Baolong, Secrétaire provincial, devrait être promu au Xinjiang avant une montée-éclair au Politburo en 2017 ; et Zhong Shaojun, civil parachuté lieutenant-colonel en 2013, pourrait bien reprendre en main à moyen terme « notre nouvelle grande Muraille » (我们的新长成), surnom de l’APL…


Sécurité Alimentaire : La Chine s’éveille au souci de qualité

Cet article fait suite à notre dossier spécial sur la sécurité alimentaire » – cf dernier numéro du Vent de la Chine.

En fait de sécurité alimentaire, 2008 a apporté à la fois un éveil et une rupture. A l’époque, la majeure partie des laits maternisés sur le marché, avaient été contaminés à la mélamine : 300.000 bébés avaient été touchés, dont 6 décédés. Ce scan-dale ruina la confiance des consommateurs envers le marché alimentai-re dans son ensemble, et provoqua une remise en question de la compétence des agences sanitaires. En 2013, sur 3.200 personnes interrogées, 38% estimaient encore que la sécurité alimentaire était « un très grave problème », contre 12% avant l’affaire. 

Un corps mixte d’inspection

Dès 2008 pourtant, la Chine avait commencé à battre le rappel. Elle entamait la concentration des fermes (laitières, légumes, fruits, viande), seule chance d’accéder à l’investissement et à la consolidation. Elle renforçait sa loi-cadre, et créait en 2013 une puissante FDA (Food and Drug Administration) calquée sur son éponyme des Etats-Unis, reprenant des compétences jusqu’alors atomisées entre 9 agences. Puis le 30/03, elle annonce la création d’un corps mixte d’inspection, FDA et Sécurité publique, qui visitera les fermes, centres d’emballage ou de transformation, magasins, laboratoires, usines pharmaceutiques. A travers le pays, travailleront ensemble un expert qui détectera les infractions, et le policier qui émettra les amendes, armé en cas de coup dur. 

La FDA a ouvert une ligne d’urgence (n°112331) et un site internet : en 2013, elle recevait 270.000 plaintes pour produits dangereux ou publicités mensongères. Il en résulta 43 000 enquêtes et la détention de 60 000 suspects déférés à la justice, parmi lesquels 5184 procès « majeurs » (+24%). 

Wal-Mart s’insurge du traitement réservé aux groupes étrangers

Anodine en apparence, la remarque qui suit permet d’appréhender les limites du filet de protection qui se met en place. Wal-Mart, le géant mondial (10.957 magasins dans le monde, dont 408 en Chine) ose suggérer à la FDA de ne pas focaliser ses contrôles sur les seuls groupes étrangers. Ainsi, la FDA est prise sur le fait, en train de contrôler prioritairement la grande distribution étrangère en Chine, fermant à demi les yeux sur les groupes locaux. À sa décharge, il faut dire que c’est la solution de facilité : les étrangers, non protégés, acceptent les sanctions et les amendes sans broncher. Le problème vient du fait que le commerce chinois est souvent de structure PME, donc local, et le contrôle sanitaire très régionalisé : une situation qui favorise les petits arrangements… 

Toutefois à la longue, cette « innocente » discrimination (probablement non voulue par le niveau central) se retourne contre ses acteurs : sous l’effet de la surveillance constante, des chaînes comme Carrefour (236 magasins), ont investi en lourd dans leur sécurité et traçabilité, créant des systèmes de contrôle (tests microbiologiques, contrôle à distance par un QG national…) parmi les plus avancés. Et ils ne font pas non plus dans la demi-mesure : surpris en 2013 par une fraude dans son réseau, Wal-Mart a réagi en fermant le magasin coupable, et en faisant réaliser des tests systématiques sur toute la marchandise. Suite à quoi il a écarté 300 fournisseurs, quoique ces derniers aient fourni une documentation impeccable (mais de complaisance) sur leur conformité aux normes. Ainsi, le paradoxe est qu’en frappant sélectivement les étrangers, la Chine les renforce, au risque de tuer à petit feu ses propres challengers locaux.

D’autres forces viennent enfin assister la Chine en sa longue marche vers la qualité alimentaire :
– la FDA américaine vient d’obtenir les visas pour doubler, de 13 à 27, ses inspecteurs expatriés, en quête de malfaçons sur les bases médicamenteuses exportés vers les Etats-Unis. Leurs 84 inspections de 2013 devraient doubler cette année.
– la KOF-K Kosher Supervision, organisation juive américaine, déploie un système simple mais efficace pour certifier les exports kashers de Chine. Des rabbins, experts en alimentaire, parcourent le pays, usines et abattoirs, pour assurer le respect des normes de sécurité alimentaires inscrites au Talmud—et ça marche ! 

En dépit de ces progrès, gardons un regard sobre : la Chine part de bas, et les soucis fourmillent. Le 13/04, 120 tonnes de viandes périmées du Vietnam étaient encore saisies à Nanning (Guangxi) – elles avaient jusqu’à 4 ans de congélateur. Indice que pour remonter une telle pente, il faudra 20 ans, au bas mot.


Monde de l'entreprise : Dongguan : le soulier insurgé
Dongguan : le soulier insurgé

Au Guangdong, Yue Yuen, géant taiwanais, est au soulier l’alter ego de Foxconn dans le smartphone : un producteur à façon pour 60 marques internationales, Nike, New Balance... Entre ses 7 usines de Dongguan et à l’étranger, en 2013, Yue Yuen produisait pour 7,5 milliards de $ de chiffre d’affaires, avec 435 millions de $ de profits. 

Yue Yuen entra en crise en mars, quand une employée en retraite après 18 ans de maison, se plaignit d’une pension tronquée – le groupe n’avait pas cotisé selon la loi. Apparemment, la pratique est courante en Chine, où en 10 ans, sur les 400 industriels vérifiés par China Labor Watch, pas un seul ne respectait les parts patronales des assurances sociales. 

Cette fois, la situation s’embrasa : très informés de leurs droits, notamment par des ONG locales, telle Chunfeng Labour Dispute Service, les travailleurs communiquaient par les réseaux sociaux, Weibo ou WeChat. Mardi 15/04, 40.000 d’entre eux débrayaient (cf photo) – la police se contentant de protéger les bâtiments. Ils exigeaient le rattrapage des cotisations (en retard d’au moins 200¥ par mois par employé), et +30% de salaire. Le jour même, Yue Yuen offrit la régularisation sur 24 mois : les grévistes refusèrent, craignant que les patrons ne ferment les usines, sans honorer leur parole, pour se replier sur celles d’Indonésie et du Vietnam. 

Détail intéressant : les grévistes ayant refusé d’être représentés par le syndicat unique (organisation de masse universellement déconsidérée en Chine), ce furent des cadres du Parti local qui négocièrent pour eux, face à la direction. Après 5 jours, aucun accord n’avait été trouvé et le temps jouait en faveur des travailleurs. Car les clients, Adidas et Nike, en rupture de stock, s’impatientaient, et n’aimant pas voir leur image ternie par des pratiques d’entreprise illégales. 

Le 15/04, à Canton (ville voisine), un tribunal jugeait 12 membres d’une milice, pour « désordre public ». Ils avaient menacé leur employeur (un hôpital) de suicide collectif, suite à un conflit salarial. Fait remarquable, se démarquant de sa main lourde habituelle, le juge prononça le non-lieu ou le sursis pour 3 accusés et condamna les autres à des peines légères – quelques semaines, compte tenu du temps déjà purgé. A en croire les experts, le Parti (qui décide des verdicts) cherchait une voie de sortie à cette affaire, car un verdict lourd ferait risquer l’explosion dans le monde du travail. 

De ces deux histoires simultanées, la leçon pourrait être qu’avec les méga-usines installées sur son sol, l’Etat ne puisse plus longtemps s’offrir le luxe d’une absence de dialogue entre patrons, employés et lui-même.


Environnement : Lanzhou : Veolia pollué au benzène

A Lanzhou (Gansu), un incident a privé cette ville de 3,6 millions d’habitants d’eau durant 2 jours (11/04), forçant la JV de retraitement (mairie 55%, VeoliaWater 45%, n°1 de l’eau potable en Chine) à couper le réseau et à donner l’alarme. Un épandage de benzène dans le Fleuve Jaune est responsable, à proximité d’un point de pompage. 

Relayant les rumeurs sur les réseaux sociaux, la presse prétend que depuis début mars, l’eau du robinet avait une odeur fétide. La ville aurait découvert une teneur en benzène (produit carcinogène) de 201 microgrammes par litre le 11/04, alors que le plafond est de 10mg/l. Faute d’équipements ad hoc « dont seuls disposent les organismes d’Etat », Veolia n’aurait pas détecté l’incident. 

Cependant, selon nos sources, Veolia aurait bel et bien trouvé un léger dépassement du plafond en benzène (17mg/l) le 10/04. Puis, faisant des tests de vérification, aurait constaté une pollution intense, à 23h le jour même. Deux heures plus tard, dans la nuit, la JV aurait notifié cinq instances (bureau de l’environnement, d’épidémiologie, d’hygiène…). 

En octobre 2011, une filiale de Nestlé au Heilongjiang avait été accusée de frauder les paysans avec de fausses balances. La révélation de l’affaire avait pu être remontée à un groupe local concurrent. Même entre groupes chinois, cette forme de délation, vraie ou fausse, n’est pas rare… 

A Lanzhou, la source de la fuite de benzène n’a pas encore été déterminée. De l’avis d’un expert, un groupe pétrolier voisin, déjà impliqué ailleurs en Chine dans un cas de pollution fluviale au benzène, aurait pu lancer cette cabale juste après l’accident pour éviter de se retrouver en ligne de mire de l’opinion chinoise.
Au demeurant, Veolia dit avoir confiance dans les autorités pour établir la source du benzène, à tout le moins. 

Alibaba depuis quelques jours, vend des kits à 65¥ aux volontaires pour tester la qualité de l’eau partout en Chine —et multiplier les dénonciations auprès de l’Etat ! Une démarche révélatrice de la méfiance des citoyens chinois dans leurs services publics…


Petit Peuple : Xinyu (Jiangxi) – Les trois rêves du jeune Zou Junyi (2ème partie)

Résumé de la Partie 1 : A Xinyu (Jiangxi), Zou Junyi, 9 ans, paralysé, nourrit le rêve de devenir policier. La mairie décide alors, en janvier 2014, de monter un scénario où toute la ville serait complice, lui permettant de réaliser son fantasme et d’ « arrêter deux bandits pris en plein hold-up, doublé d’une prise d’otages »…

C’était bien sûr une scène totalement improbable. A peine menottés, dans ce supermarché, les « malfrats » se retrouvaient alors libérés, et se mettaient à leur tour à applaudir le jeune en uniforme, au côté de la foule qui l’ovationnait, tandis qu’un panneau électronique flashait en diodes écarlates : « Junyi, officier de police hors pair ». Puis sur la scène du crime convertie en podium, Yan Wenjing, le maire de la ville, apparut et prononça un discours de circonstance, avant de décorer solennellement le bambin d’une médaille.

Cependant le programme des festivités était loin d’être épuisé. Le lendemain, Junyi fut reçu en grande pompe au commissariat central de Xinyu, pour une journée de présentation et d’initiation aux forces de maintien de l’ordre. Il assista aux cours des élèves officiers, à un entraînement d’un peloton d’intervention anti-terroriste. Il fut aussi invité à régler la circulation, avec un bâton électronique, depuis son fauteuil, au plus important carrefour de cette préfecture de 50.000 habitants. Il fut enfin gratifié, le soir venu, d’un adieu du commissaire en personne, qui dit en substance, au futur collègue, que « ce n’était qu’un au revoir ».
Jeune Policier Handicape Collegues

Au journaliste venu l’interviewer, le garçon, aux anges, confiait son bonheur d’avoir été reçu « officier de police anti-émeutes ». Aucun doute, une fois grand, et guéri, il entrerait dans ce corps d’élite, et continuerait à œuvrer à l’éradication des mauvaises gens. 

Depuis lors, sous l’angle de la santé, son médecin ne tarit pas d’éloges. Si les remèdes physiques sont d’une efficacité limitée, psychothérapie et thérapie vocationnelle sont fort reconnues en Occident. Or, depuis son happening public, le jeune patient donnait les signes surprenants d’un contrôle limité, reconquis sur ses membres inférieurs. Aussi inouï qu’il y paraisse, face à sa maladie en principe incurable, pour Junyi, certains espoirs semblent de mise.
Sous l’angle financier de même, pour les parents, les nuages noirs reculaient : de partout, même de l’étranger, de mains anonymes, chèques et mandats expédiés par WeChat venaient alléger la charge financière médicale. Junyi avait déjà son rendez-vous retenu auprès d’un professeur pékinois des troubles dystrophiques, dont l’hôpital promettait de réduire ses honoraires au plus juste prix. En somme, tout était pour le mieux dans le meilleur des mondes : la Chine humaniste montrait son rassurant visage. 

Tout cela, au fond, avait été gagné grâce à la bonne action du maire. Brave homme, et surtout opportuniste dans l’âme, Yan Wenjing n’avait pas eu besoin de longtemps pour deviner la portée qu’aurait son initiative, tant pour l’image du Parti (d’un régime se souciant du bonheur des masses), que pour sa popularité et son avancement. Son simple petit geste pouvait se métamorphoser en un trésor inestimable « le bi de He et la perle de Sui » (和璧 隋珠, hé bì Suí zhū) – .
Le maire, il est temps à présent de le dire, n’avait même pas eu à inventer ce petit scénario du hold-up avorté par l’enfant handicapé. Celui-ci était le clone d’un mise en scène intervenue 3 mois plus tôt à San Francisco : la mairie avait dépensé 100.000$ pour permettre à un garçonnet de 5 ans, leucémique, de commettre divers sauvetages héroïques en ville, déguisé en Batman. 

Plagiat ou pas, applaudissons au sens aigu de l’à-propos de ce maire du Jiangxi. Car le transfert de technologie ne se limite pas à l’agronomie ou à l’industrie—il fonctionne aussi en matière de compassion, où là aussi, la Chine a tout à réapprendre, en terme d’aide à son prochain dans la détresse. Des démarches caritatives issues de l’étranger peuvent fonctionner en Chine – à condition qu’il y ait des gens pour les repérer et oser les appliquer. 

Enfin en conclusion, partageons notre intuition : il est bien possible que le plus fort profit de cet aimable histoire, n’ait pas été celui du jeune malade, ni celui du maire, mais celui de la ville entière, dans ses rapports sociaux. Il nous revient en effet que depuis lors, les citoyens de la ville se sourient et s’entraident davantage, ferment moins leurs portes à triple tour. Xinyu a regagné confiance en elle, dans sa capacité à faire le bien.


Rendez-vous : Salon de l’Auto et autres rendez-vous du 21 au 27 avril
Salon de l’Auto et autres rendez-vous du 21 au 27 avril

Salon De L Auto Pekin 201421-29 avril, Pékin : 13ème édition du  Salon de l’AUTO qui s’étend sur 230 000 m2 et attend au moins 800 000 visiteurs, au China International Exhibition Center. Cette année, le thème du salon sera l’innovation au service de la mobilité, un programme orienté autour des nouvelles énergies

Composants automobiles : du 20 au 24 avril 2014
Journée de la presse : 20 avril
Pour les professionnels : du 21 au 22 avril
Ouvert au public : du 23 au 29 avril

Plus d’informations dans le prochain numéro du Vent de la Chine !

22-24 avril, Shanghai : RE China Asia Expo Salon de l’imprimerie

23-25 avril, Pékin : China international Valve Expo

23-25 avril, Shanghai : NEPCON China

23-25 avril, Shanghai : Conférence sur l’industrie aéronautique commerciale

23-26 avril, Shanghai : ChinaPlas, Salon de l’industrie du plastique et du caoutchouc 

26-28 avril, Chengdu, PharmChina, Salon de la pharmacie

28-30 avril, Shanghai, CIENPI, Salon de l’industrie nucléaire

28-30 avril, Pékin : BMExpo, ConcreteTech et Salon de l’industrie du ciment