— «Je reprendrais bien une gifle, pour la route!» : à Shangqiu (Henan), Wang Mingliang, 39 ans a ce penchant bizarre : aimer les coups.
Il y est venu en 2001, par hasard. Sa constitution maladive le maintenait au lit, bourré de cachets au point de devenir 药罐子yao guanzi, pot à potions. Puis il découvrit que plus son masseur cognait, mieux il allait. Alors, de frappe en tarte, se faire rosser devint pour lui une addiction. Seulement voilà, pour dérouiller, il faut payer : de clubs de boxe en salle de musculation, depuis lors, il a dû aligner 100¥/mois à ses baffeurs, grevant son indigent budget.
Wang reçut alors d’un videur l’idée qui va changer sa vie: au lieu de payer, il va «encaisser», en mettant son vice au service de celui des autres. A Shenzhen (seule ville de Chine assez folle pour cela), Wang veut se louer comme punching ball dans un club d’exutoire, où les gens paient des fortunes pour se vider de leur agressivité : on lui souhaite bonne chance ! D’autant que notre tapé va plus loin encore. Ebloui par les infinies perspectives de la Chine de 2005, il veut entrer au livre Guinness. On lui objecte un scepticisme réprobateur – Guiness étant, par morale, hostile aux pratiques de Masoch. On lui suggère d’étoffer son dossier: combien de coups par série, de joule par gnon, quelle unité de mesure pour le plaisir ressenti. Si Wang parvient à inventer pour son hobby un vernis scientifique tenant la route, il aura son record. Après tout, 萝卜白菜,各有所爱 luobo baicai, ge you suo ai – tous les goûts sont dans la nature («chou ou navet, à chacun le sien!»)
Sommaire N° 29