Pol : Après la police des polices, le juge des juges!

• A huis clos, Pékin et les provinces lavent leurs différends dans l’eau des crues décroissantes. Accusé n°1: le Barrage des 3 Gorges, imposé par le précédent gouvernement, gouffre à crédits publics, qui aurait entravé l’entretien normal du réseau de digues. Suite à son inspection (07-12 septembre) dans quatre provinces touchées (+ Chongqing), Zhu Rongji dicte ses priorités:

[1] Reprendre à zéro le programme de prévention des crues, et

[2] Garantir une efficacité absolue (et pas de détournement!) aux fonds publics ou privés de reconstruction.

• Après trop peu, trop : le Hubei veut, d’ici 2003, avoir replanté 1Mha de forêt (5% de son territoire), et classé « zone forestière » 31% en plus. Coût total : 840MUSD, dont 10% à charge de Pékin, le reste à celle du Hubei, notamment par une taxe sur les usines urbaines (selon le principe du « pollueur payeur »). Mais comment le pouvoir local pourrait t’il faire face, alors que son budget «forêt» en ’97, était de 3,6MUSD?

NB : théoriquement, les coupes forestières autour du Yangtzé ont pris fin au 31 août, à minuit : dès l’annonce de l’interdiction, tout ce que les villages comptaient de bras et de scies, étaient à l’ouvrage, fatal aux derniers cyprès centenaires -avant de démarrer, suivant la consigne, le programme de reforestation.

• Une fois les crues vaincues, Jiang Zemin relance le dossier politique n°1 de son second quinquennat: l’effort de réinsertion de Taiwan dans la nation. Nomination annoncée d’un nouveau Secrétaire. Général du groupe de travail « Taiwan » du Parti Communiste Chinois (PCC): Zeng Qinghong, son bras droit. Visite pékinoise pour octobre de Koo Chen-fu, Président de la Fondation pour les Echanges au travers du Détroit (SEF), fondation officieuse taiwanaise. Jiang « souhaite » des insulaires une « date de retour », même non contraignante (pour parer la menace d’un accès au pouvoir du DPP, indépendantiste). Taiwan, de son côté, fait un geste: le commerce direct avec la Chine, va être testé, à partir de futures Zones Économique et Commerciales Spéciales.

• Deux rencontres sino-japonaises au sommet montrent l’évolution des rapports, des critiques méfiantes des mois passés, au sentiment de l’urgence de coopérer. A Pékin (14/09), le vice ministre des Affaires Étrangères nippon Haraguchi a vu un vis-à-vis chinois Sun Guangxiang. A Tokyo (16/09), le nouveau patron du MOFTEC, Shi Guangsheng, le 1er Min. Keizo Oguchi. Discrétion dans les deux cas, mais le thème central, a été la coopé monétaire (anti-spéculation).  NB1: de janvier à juillet, les exports chinois vers le Soleil Levant ont baissé, de 4,3%, et l’investissement nippon en Chine, de 30%.

NB2 : rassérénés par ces retrouvailles, les deux capitales confirment la visite de Jiang à Tokyo, première d’un Président chinois, avant la fin de l’année.

• Li Peng donne le 1er fruit, inattendu, de son leadership sur l’Assemblée Nationale Populaire (ANP) depuis mars 1998 : une enquête critique sur le fonctionnement des tribunaux. Dans sa nouvelle responsabilité de parlementaire, l’ex-1er ministre milite pour une justice démocratique: procès publics (sauf pour ceux de sécu d’Etat, d’affaires « intimes », et de jeunes), jurys, et fin de la détention prolongée des suspects. Tancée par l’ l’Assemblée Nationale Populaire (ANP) (qui, en mars, avait voté à 45% contre son rapport d’activité), la Cour suprême a déjà détecté 15000 cas entachés de vices de forme… 12000 où le juge aurait été corrompu… 4700 juges et policiers auraient été tancés, dont 77 vont passer en justice. Sept « juges des juges » sont en cours de nomination, et les sanctions ont été révisées. Mais que faire, quand on atterrit comme «incorruptible», dans une ville où maire, Secrétaire du Parti, juge et commissaire jouent ensemble au (ma jiang, en français mah jong)?

• Flux, reflux, et beaucoup de vagues semaine passée, dans la mer politique underground. Dans 6 provinces (Zhejiang, Shandong, Hubei, Liaoning, Jilin, Heilongjiang) des personnes privées sont parvenues à déposer des demandes d’enregistrement d’un parti au même nom, le « Parti de la démocratie ». Alors qu’une démarche identique, en juillet (Zhejiang) s’était soldée par 13 (très provisoires) arrestations, cette fois, les candidats se sont vus indiquer des conditions (50000Y, 50 membres, une adresse, et les CV de trois fondateurs), et priés de repasser dans un mois, pour décision.

A Pékin et à Shanghai, par contre, cette opération a valu quelques heures de commissariat à 3 dissidents (dont 1 chevronné, Ren Wanding). D’où ces déductions:

[1] Muselée il y a un an, la dissidence est aujourd’hui aussi vivace qu’une crevette;

[2] Emerge une structure politique nationale, réaliste, qui se revendique « non-dissidente », (elle reconnaît le rôle dirigeant de Jiang et du Parti Communiste Chinois (PCC));

[3] Le pouvoir, pour l’instant, fixe des limites, et demande du temps.

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