Le Vent de la Chine Numéro 34 (2021)

du 18 au 24 octobre 2021

Editorial : L’économie chinoise toussote
L’économie chinoise toussote

Le rebond économique chinois perd de sa superbe en cette fin d’année. Lors de l’ouverture de la foire de Canton, le Premier ministre Li Keqiang a reconnu que la croissance a ralenti au 3ème trimestre (+4,9% contre 7,9% au 2nd trimestre), mais s’est montré rassurant : « les principaux indicateurs économiques restent à un niveau raisonnable (…). La Chine a les outils adéquats pour faire face aux challenges économiques auxquels le pays fait face (…) et devrait être en mesure d’atteindre un taux de croissance ‘de plus de 6%’ » (le seuil plancher qui est venu remplacer le traditionnel objectif de croissance « fixe » lors de la dernière session du Parlement).

Si les politiques mises en œuvre par le gouvernement sont en partie à l’origine de ce ralentissement économique, il est peu probable que Pékin fasse marche arrière, le leadership estimant que c’est le prix à payer à court terme pour une plus grande stabilité à long terme.

En visite dans une usine du fabricant d’appareils électroménagers Midea dans la province du Guangdong (cœur industriel et manufacturier du pays), Li Keqiang a promis que des solutions seraient apportées aux coupures électriques qui frappent une vingtaine de provinces depuis le début de l’hiver. Pour faire face à la pénurie de charbon qui a causé une envolée des prix, les autorités ont donné carte blanche aux producteurs et sollicité les fournisseurs étrangers (Russie, Mongolie en tête…). Pékin a également autorisé une plus grande fluctuation des prix de l’électricité (+20%), premier pas vers une libéralisation du marché. Pour autant, le gouvernement n’a pas l’intention de revenir sur les objectifs de réduction de la consommation énergétique imposés aux provinces, quoi qu’ils soient eux aussi responsables du rationnement électrique…

Le marché immobilier lui aussi, tire la croissance vers le bas. Depuis que Pékin a volontairement fermé le robinet du crédit aux promoteurs surendettés, le n°1 du marché, Evergrande, se retrouve au bord de la faillite. La crise de liquidité que traverse le conglomérat a fait chuter les ventes de plus de 30% dans 30 grandes villes en septembre, habituellement l’un des meilleurs mois de l’année. Dans l’expectative, les potentiels acheteurs préfèrent patienter, craignant de se retrouver propriétaires de logements inachevés à l’instar des clients d’Evergrande.

Brisant son silence le 15 octobre, la Banque Centrale a taclé le « management médiocre » d’Evergrande, qui « n’a pas su agir judicieusement face aux changements des conditions du marché et a continué à se diversifier aveuglement ». Zou Lan, directeur du département financier, a exhorté le groupe à « accélérer la cession de ses actifs » et a annoncé que « les autorités financières vont coopérer avec les gouvernements locaux pour fournir le soutien financier nécessaire à la reprise de la construction ». Cependant, le banquier a affirmé que « toute contagion au secteur financier est contrôlable » et que le cas d’Evergrande est une « exception » sur le marché de l’immobilier. Au-delà de la leçon infligée au promoteur, Pékin y voit une opportunité d’assainir le secteur, qui représentait jusqu’à présent un quart de la croissance chinoise, au profit d’autres pans de l’économie réelle.

C’est l’un des aspects du concept de « prospérité commune », ressuscité mi-août par le Président Xi Jinping. Un extrait de l’un de ses discours, publié le 16 octobre par le journal du Parti, Qiushi, en dévoile un peu plus sur le nouveau mot d’ordre qui devrait « offrir à tous l’opportunité de devenir riche », notamment grâce à « l’éducation, la formation et la migration urbaine ». Les salaires des fonctionnaires et des employés des entreprises d’État seront augmentés, les revenus « déraisonnables » encadrés, le système fiscal « réformé » et les « gains illicites » réprimés. Apparemment bien conscient des maux de la jeunesse, le Président veut éviter que les jeunes « s’allongent », mais aussi que la population ne devienne « fainéante ». Selon le leader, la « prospérité commune », qui devrait connaitre son apogée « au milieu du siècle », est le seul moyen « d’accroître la productivité globale du pays » et de « consolider les fondations d’un développement de haute qualité ». Sous ce prisme, le ralentissement économique est considéré comme un mal nécessaire pour amorcer « dès maintenant » cette transition, quoi qu’il en coûte.


Environnement : Une COP15 « aux caractéristiques chinoises »
Une COP15 « aux caractéristiques chinoises »

« Si l’humanité ne déçoit pas la nature, la nature ne nous décevra pas », a conclu le Président Xi Jinping, lors d’un discours retransmis en direct à la COP15 de Kunming (11 au 15 octobre) dans la province du Yunnan, qui abrite la biodiversité la plus riche du pays mais également le lac Dian, l’un des plus pollués il y a encore quelques années.

Pour Pékin, c’est le premier sommet de l’ONU depuis la Conférence mondiale sur les Femmes en 1995, et une occasion unique de montrer au monde que la Chine s’engage pour la planète.

Maintes fois reporté à cause de la pandémie, ce sommet virtuel a adopté « la déclaration de Kunming », un texte qui reprend le concept de « civilisation écologique » de Xi Jinping, mais pas son slogan « des eaux vives et des monts verts », qui a suscité une levée de boucliers de la part de plusieurs pays.

Cette déclaration est censée mettre sur les rails la centaine de pays participants pour adopter un cadre mondial contraignant visant à protéger 30% des terres et des mers de la planète d’ici 2030. Aujourd’hui, 17 % des terres mondiales sont protégées et seulement 8 % des mers et des océans.

La seconde partie du sommet devrait avoir lieu au printemps 2022, en présentiel cette fois, pour clore les négociations. Cela laisse donc six mois à la Chine pour persuader les autres pays de consentir à cet objectif.

Pour sa première présidence d’un grand sommet environnemental, la Chine veut montrer l’exemple, en espérant que cela suscite un élan de mobilisation chez les autres pays signataires.

Surtout, Pékin pousse pour l’adoption d’un cadre mondial « réaliste », rappelant qu’aucun des objectifs d’Aichi (Japon), adoptés en 2010, n’a été pleinement atteint… Pour cela, la Chine veut mettre l’accent sur la vérification des engagements et sur les financements.

Devenu coutumier des grandes déclarations sur les thématiques climatiques et environnementales (pics des émissions avant 2030, neutralité carbone d’ici 2060, fin du financement des centrales à charbon à l’étranger…), Xi Jinping a mis la main au portefeuille en annonçant le lancement d’un fond doté de 1,5 milliard de yuans (200 millions d’euros) pour soutenir la protection de la biodiversité dans les pays en voie de développement. C’est loin d’être suffisant, mais c’est un premier pas, de la part d’un pays qui a longtemps alimenté le trafic illégal de défenses d’éléphant ou de cornes de rhinocéros – espèces menacées.

Au plan national, Xi Jinping a annoncé la création de cinq parcs nationaux : celui de Sanjiangyuan aux sources du Yangtze, du fleuve Jaune et du Mékong, où l’on peut apercevoir des antilopes tibétaines et des léopards des neiges ; celui des pandas géants, à cheval sur trois provinces à l’ouest du pays ; celui du tigre de Sibérie et du léopard du fleuve Amour dans le nord-est de la Chine ; celui de l’île tropicale de Hainan et ses gibbons ; et celui des montagnes Wuyi (Fujian), abritant de nombreuses espèces… Ces 230 000 km2 de parcs nationaux couvrent près de 30% des espèces sauvages protégées, présentes sur le territoire chinois. 

En parallèle, la Chine a mis en avant le concept de « lignes rouges écologiques », élaboré au lendemain des catastrophiques inondations le long du fleuve Yangtze en 1998. Ces milliers de zones protégées de l’appétit des promoteurs, sont déterminées scientifiquement à partir de trois critères : leur importance en matière de biodiversité, de réduction des risques (érosion, inondations, désertification…) et leur apport aux écosystèmes (approvisionnement en eau potable, fertilité des sols…).  Elles couvriraient environ un quart de la superficie du pays.

Et en guise « d’avant-première » à la COP26 de Glasgow (31 octobre au 12 novembre), le Président Xi a également promis « d’accélérer le développement de l’énergie solaire et éolienne » dans son pays. Cette annonce vient confirmer la rumeur d’un projet de construction « dans le désert » d’une gigantesque ferme de 400GW, dont la moitié serait opérationnelle d’ici 2025. La première phase du projet, représentant 100 GW (soit la capacité solaire et éolienne de l’Inde), a déjà commencé, a affirmé le leader chinois.

Cet agenda national ambitieux contraste avec la passivité dont la Chine a fait preuve jusqu’à présent sous l’angle diplomatique. Au lieu de pousser les différentes nations à s’entendre sur des objectifs communs et chiffrés, elle s’est pour l’instant contentée de fournir une « plateforme » pour que les pays expriment leurs idées et leurs inquiétudes.

Alors que la pertinence et la faisabilité de l’objectif de protéger 30% de la planète d’ici à 2030 fait encore débat au sein des nations, la Chine elle-même semble moins encline à fournir des efforts sur la partie maritime que sur la partie terrestre, pour des questions militaires et de souveraineté.

Cependant, si la Chine veut faire de sa présidence à la tête de la COP un succès, et ainsi marcher sur les traces de « l’accord de Paris » ou encore du « protocole de Kyoto », il faudra plus que de grandes annonces nationales. Un engagement diplomatique intense sera nécessaire, tout comme savoir jongler entre les différents intérêts afin de mettre tout le monde d’accord, sur fond de tensions politiques entre la Chine et de nombreux pays (occidentaux). En quelques mots, il faudra que Pékin aille au-delà de sa zone de confort.


Environnement : COP15 – Le tigre n’a plus sa place en Chine du sud
COP15 – Le tigre n’a plus sa place en Chine du sud

Alors que Kunming (Yunnan) a finalement accueilli – en majeure partie virtuellement – la première partie du sommet de l’ONU sur la biodiversité (COP15) du 11 au 15 octobre, la Chine peut se targuer d’avoir réussi à sauver plusieurs espèces, menacées d’extinction.

Selon un livre blanc publié par le gouvernement le 8 octobre, le nombre de pandas géants dans la nature a augmenté en 40 ans de 1114 à 1864 aujourd’hui, celui d’ibis à crête de seulement 7 à 500, celui des gibbons de Hainan de moins de 10 à 35, et celui des éléphants d’Asie de 180 à 300. Quelques spécimens de ces derniers se sont d’ailleurs illustrés ces derniers mois (cf photo) par une folle épopée de milliers de kilomètres à travers la province du Yunnan, probablement poussés à l’exode par la perte de leur habitat naturel, causée par la déforestation…

Des centaines d’autres espèces, présentes en Chine, sont sur la liste « rouge » de l’UICN (Union internationale pour la conservation de la nature), dont de nombreuses en « danger critique » d’extinction. C’est le cas de l’alligator de Chine, du chameau de Mongolie (de Bactriane), du marsouin aptère du Yangtsé, de la salamandre géante de Chine, ou encore du tigre de Chine méridionale, considéré comme « l’ancêtre » de tous les autres tigres.

Jusqu’en 1950, ce grand félin vivait – presque tranquillement – sa vie dans les forêts et bambouseraies de Chine du sud, en évitant les chasseurs qui voulaient transformer sa carcasse en médecine traditionnelle : les os fournissaient le « vin de tigre », un sirop guérit-tout ; les dents et les griffes traitaient l’insomnie et la fièvre ; la bile et les yeux l’épilepsie ; le cerveau, la fatigue et les boutons ; le pénis était particulièrement apprécié, plus goûteux, paraît-il que le Viagra ; les moustaches, coupées en petits morceaux et glissées dans la potée du voisin devenu importun, permettaient de s’en débarrasser… Et puis, Mao Zedong, qui avait dû croiser un tigre de près, le déclara « bête nuisible ». Certains disent qu’il préférait « les tigres de papier » (1956) !

Plus tard, au tournant du siècle, les Chinois pensaient avoir capturé les derniers tigres de Chine méridionale, sous-espèce alors quasi éteinte à l’état sauvage (il en restait 57 en 2005, quasiment tous dans des zoos), et les envoyaient, en « entrainement » dans des réserves d’Afrique du sud pour qu’ils puissent se réhabituer à une vie sauvage, y trouver des proies et conserver leurs instincts de chasseurs, tout en préservant au passage un minimum de libido pour que l’espèce se perpétue. Un tigron naissait pour la première fois hors de Chine en 2007.

Fin août, le portail « Espèces Menacées » s’interrogeait : « Le tigre de Chine méridionale est-il condamné » ? A juste titre car il existe moins de 5000 tigres dans les milieux naturels de plus en plus restreints d’Asie et, selon le point fait lors de la journée mondiale du tigre le 29 juillet 2021, aujourd’hui, « la population sauvage » du tigre de Chine du sud « est considérée comme fonctionnellement éteinte ». Seule lueur apparente d’espoir : il en resterait une centaine en captivité en Chine et même plus car, selon Born Free USA, organisation américaine de défense des animaux, jusqu’à 10 000 tigres seraient élevés aux Etats-Unis comme « bêtes de compagnie », et parmi eux des sudistes chinois.

Ces captifs ayant d’énormes problèmes de consanguinité et de maladies héréditaires, et surtout, leur milieu naturel ayant disparu sous l’urbanisation irrémédiable des régions sud de la Chine, il est à craindre que la malédiction du Grand Timonier condamne désormais ce grand prédateur à la captivité perpétuelle. Au mieux !

Avec Alain P.  Bonjean


Portrait : Huang Runqiu, l’expert « vert »
Huang Runqiu, l’expert « vert »

Ministre de l’écologie et de l’environnement (MEE), présent à la COP15 de Kunming, Huang Runqiu (黄润秋), 58 ans, est le symbole de la priorité donnée du leadership à l’expertise sur l’idéologie, particulièrement sur les questions « vertes ».

Le géologue de formation est seulement le troisième ministre non-membre du Parti Communiste chinois (PCC) nommé depuis la fin des années 70, après Wan Gang, ministre des Sciences et des Technologies et spécialiste automobile formé en Allemagne, et Chen Zhu, le ministre de la Santé à l’initiative du laboratoire P4 de Wuhan, tous deux nommés en 2007.

Né dans le Hunan en 1963, Huang a étudié et enseigné à l’université des technologies de Chengdu, jusqu’à en devenir vice-président et prendre la tête d’un laboratoire de renom de protection de l’environnement. En parallèle, il intègre la « société Jiu San » (九三学社), l’un des huit « mini » partis politiques tolérés par le gouvernement, dont il est aujourd’hui le vice-président.

Il monte à Pékin en 2016 et devient le vice-ministre de la Protection de l’Environnement, puis est chargé en 2018 des négociations du traité sur la biodiversité. Nommé ministre en fin avril 2020, il reste toutefois sous les ordres du secrétaire du Parti du ministère, Sun Jinlong, mis au placard par Pékin et mis sous sanctions par Washington pour son implication dans la répression au Xinjiang

Depuis sa nomination, Huang est très actif sur le terrain, multipliant les inspections, quitte à prendre les usines en flagrant délit d’émissions illégales comme lors des « Deux Assemblées » en mars dernier. À Kunming, lors de la première partie de la COP15, le ministre a affirmé qu’ « en tant que pays hôte, le Président Xi a proposé des mesures pragmatiques et faisables ». Optimiste pour la suite des négociations, il a confié « espérer que les parties puissent conclure un cadre ambitieux et réaliste pour mettre un terme à la perte de biodiversité dès que possible ».


Photo de la semaine : Le « Big Mac Cube » shanghaien
Le « Big Mac Cube » shanghaien

Vous ne l’avez peut-être pas reconnu, mais voici le célèbre « Big Mac » de McDonald’s, sous forme de jeton cryptographique ou de « NFT » (token non-fongible).

188 exemplaires de ce « hamburger 3D », inspiré du Rubik’s Cube, seront offerts aux employés et clients de la chaine américaine à l’occasion du 31ème anniversaire de sa présence en Chine et de l’inauguration de ses nouveaux bureaux shanghaiens sur le West Bund.

Misant sur ces nouveaux outils digitaux pour séduire les jeunes consommateurs, le leader du fast-food, dont la filiale chinoise est contrôlée à 52% par la banque d’investissement CITIC, devient donc la première chaine de restauration à se lancer en Chine dans les NFT, une technologie jusqu’à présent réservée aux artistes et aux geeks

Un pari osé alors que Pékin a interdit toutes les activités liées aux cryptomonnaies et s’apprête à placer – pour de bon – l’activité de « minage » sur liste noire des investissements.


Petit Peuple : Urumqi (Xinjiang) – Zeng Duozi, ou trop tricher nuit ! (3ème partie)
Urumqi (Xinjiang) – Zeng Duozi, ou trop tricher nuit ! (3ème partie)

Une première fois en 2004 à 28 ans, Zeng Duozi a réussi à échapper à la prison, alléguant de sa grossesse

En 2005, à Urumqi, aux confins du monde chinois, Zeng Duozi désormais ne connaissait plus de loi. Presque chaque jour, elle chapardait dans les magasins et s’exhibait dans les tenues qu’elle avait réussi à faucher. Elle en riait auprès de ses riches amants, tel exploitant de gisement gazier, patron d’une « bingquan » vinicole (une de ces corporations issues de l’armée de conquête des années ’50), ou membre influent du Parti, à la tête du comité des investissements territoriaux.

Elle avait aussi recommencé à arnaquer de grosses compagnies publiques, faisant miroiter des contrats d’exportation de vin ou de tomate vers l’Europe. Notoirement, de telles affaires nécessitaient un prêt bancaire bloqué, au titre de garantie de bonne fin. C’était ce montant qu’elle parvenait à détourner, moyennant l’imprudente confiance d’un de ses compagnons de plaisirs.

Arrêtée en mai 2006, elle s’était refusée à avouer la cachette du magot et avait été condamnée à 8 ans de prison. Curieusement, cette peine n’avait pas été cumulée avec la précédente, simplement oubliée…

Mais voilà qu’à la stupéfaction générale, après publication du verdict, Zeng faisait savoir qu’elle était à nouveau en « situation intéressante ». Le juge ordonna vérification par un obstétricien assermenté, mais ce dernier, sérieux comme un pape, ne put que confirmer la grossesse de la trentenaire.

Dès lors, comme pour la fois précédente, dans la stricte application de la loi, le magistrat n’avait plus qu’à déchirer son jugement et statuer que la coupable vive le temps de sa peine au lieu de sa guise. Elle était désormais en règle avec la justice ! Un mois plus tard, tout signe de sa grossesse avait disparu, après un passage dans un discret dispensaire…

A partir de ce moment, les choses commencèrent à couler comme un long fleuve tranquille, mais en circuit fermé. Chaque soir, Zeng régnait sur le « Xianggelila », la principale boîte de la ville, où les hommes fortunés et importants passaient leur soirée en compagnie des plus éblouissantes filles du territoire autonome.

Pour l’heure, Zeng avait jugé plus prudent de se concentrer sur les vols à l’étalage de parfums et ceintures, sacs à main et carrés de soie importés de France, aux motifs de chevaux et casaques.

Sauf qu’en décembre 2006, elle fut prise sur le fait et condamnée à 15 ans, le juge ayant cette fois opté de cumuler le châtiment avec le précédent. Après parution du verdict au tableau public du tribunal, plus personne en ville, ni les journalistes, ni les simples citoyens, ne furent autrement surpris de la voir se déclarer une fois de plus dans l’attente d’un heureux événement.

Par acquit de conscience, le prétoire fit vérifier l’assertion. Et comme elle était véridique, Zeng étant de nouveau dans l’attente d’un bébé, elle se retrouva une nouvelle fois dispensée de la peine !

Qu’on le croie ou non, jusqu’en 2015, Zeng Duozi ne se retrouva pas moins de 14 fois devant le petit fer à cheval des accusés au tribunal intermédiaire, entourée de deux membres imperturbables et benêts de la police judiciaire, sous une série de chefs d’accusation allant du faux en écriture à l’arnaque, en passant par la carambouille et le vol à l’étalage.

Et chaque fois, elle ressortit la tête haute et les mains libres, en démontrant qu’elle était mère en devenir, non assujettie à la détention pénitentiaire, au nom de la loi en vigueur.

Naturellement, la presse fit ses choux gras de cette affaire si étrange, réclamant un ajustement de cette loi pour en faire disparaître le vide juridique. Le cas était en effet du jamais vu en Chine populaire. Un nombre inouï de délits commerciaux et financiers avait été commis en toute impunité, avec le sourire même – que Zeng Duozi avait éblouissant et ravageur ! Sur les 14 occurrences de grossesses judiciaires de Zeng Duozi, « au moins 13 » avaient été validées comme authentiques.

Zeng Duozi n’est d’ailleurs pas la seule indélicate à exploiter sans vergogne cette faille dans la loi, puisqu’en février 2021, la Cour Suprême admettait être au courant du grand nombre de femmes échappant au châtiment en se laissant délibérément féconder par quelque innocent.

Et comment, me demanderez-vous, toute cette aventure s’est-elle terminée après plus d’une décennie ? De manière la plus imprévisible, par une défaillance physique de la coupable, notre héroïne !

Lors de sa dernière comparution en 2015, tandis qu’elle se prévalait pour la 14ème fois d’une condition de mère en puissance, le gynécologue, après l’avoir examinée, contredit la resquilleuse et la déclara non porteuse, probablement stérile même !

Car révoltée qu’elle était contre le système et sa société entière, elle avait fait pratiquer ses avortements à la file, et cette agression sauvage sur son corps avait eu raison de son cycle reproductif. C’était la revanche de la nature, la punition ultime pour avoir triché plus qu’avec les hommes !

Zeng Duozi dut donc cette fois enfin voir se matérialiser l’objet de ses cauchemars, et prendre sa valisette pour le pénitencier. Lorsqu’elle sera libérée, dans plusieurs années, il lui restera néanmoins une compensation pas si mince : les millions de yuans qu’elle a détournés et planqués tout au long de sa carrière, qui lui assureront une fin de vie hors du besoin.

Au fond, son audace aura permis à Zeng Duozi de passer ses années à l’abri de la morale et des convenances, selon l’adage, « vivre dans l’ivresse, et mourir dans un rêve » – 醉生梦死 (zuì shēng mèng sǐ) !


Rendez-vous : Semaines du 18 octobre au 21 novembre
Semaines du 18 octobre au 21 novembre

19-21 octobre, Yantai : CHINA INTERNATIONAL NUCLEAR POWER INDUSTRY EXPO, Salon chinois international de l’industrie nucléaire.

19-21 octobre, Shanghai : CDS – CHINA DENTAL SHOW 2021, Salon professionnel de l’industrie dentaire.

19-21 octobre, ShenzhenC-TOUCH & DISPLAY SHENZHEN 2021, Salon international des écrans tactiles et de la chaîne de fabrication des smartphones.

20-22 octobre, ShenzhenNEPCON SOUTH CHINA 2021, Salon international des matériaux et équipements pour semi-conducteurs. 

21-24 octobre, Ningbo: NINGBO INTERNATIONAL FASHION FAIR, Salon professionnel international de la mode en Chine.

23-24 octobre, Pékin ; 27 octobre, Canton ; 30 octobre, Shanghai : CHINA EDUCATION EXPO 2021, Salon international de l’éducation et des formations supérieures.

23-25 octobre, Shenzhen: CHINA SMART CARD AND RFID TECHNOLOGIES, Salon international sur les technologies et applications de la carte à puce et à la RFID et à ses applications dans les produits et services.

27-29 octobre, Pékin : CHINA INTERNATIONAL GREEN FOOD & ORGANIC FOOD EXHIBITION – BEIJING 2021, Salon de l’alimentation biologique.

28-30 octobre, Shenzhen : INTERWINE CHINA, Salon chinois international du vin, de la bière, et des procédés, technologies et équipements pour les boissons.

28-30 octobre, Shenzhen : LEAP EXPO, LEAP Expo est une exposition industrielle axée sur la fabrication électronique, l’automatisation industrielle et l’industrie laser.

2-4 novembre, Shanghai : CEF – CHINA ELECTRONIC FAIR, Salon chinois de l’électronique. 

5-10 novembre, Shanghai : CIIE, CHINA INTERNATIONAL IMPORT EXPO, 4ème édition de la foire aux importations de Shanghai.

5-7 novembre, Chengdu : INTERNATIONAL TOURISM EXPO 2021, 9ème salon international du tourisme

8 novembre, Bruxelle: Conférence par Eric MEYER, et dédicace de son dernier ouvrage, la BD “Robinson à Pékin »

9-11 novembre, Shanghai : PROWINE CHINA, Salon international du vin et des spiritueux en Chine.

17-19 novembre, Canton : PHARMCHINA 2021, Salon international de l’industrie pharmaceutique.

17-21 novembre, Shenzhen : CHINA HI-TECH FAIR, Salon international des ordinateurs et des télécommunications, des applications et services logiciels, de l’électronique grand public, et pour l’automobile.

18-20 novembre, Canton : POWER EXPO 2021, Salon international des équipements et technologies de l’énergie en Asie-Pacifique.