Le Vent de la Chine Numéro 19-20 (2021)

du 23 mai au 6 juin 2021

Editorial : Les écoles privées dans le collimateur
Les écoles privées dans le collimateur

Le Conseil d’État vient de jeter un pavé dans la mare le 14 mai en publiant une nouvelle réglementation qui s’appliquera aux écoles privées dès la prochaine rentrée scolaire. Officiellement, il s’agit de promouvoir l’ouverture de nouveaux établissements (crèches et maternelles notamment, qui font cruellement défaut) tout en domptant une industrie des cours particuliers qui prospère grâce à la pression qui pèse sur les épaules des enfants chinois dès leur plus jeune âge. Alors que le nombre de naissances est au plus bas depuis soixante ans, il s’agit de donner davantage envie aux couples chinois de procréer en faisant baisser les coûts de scolarité et en augmentant l’offre éducative. À cette annonce, les groupes de soutien scolaire comme New Oriental Education, TAL et Chuanglian Education ont vu leurs cours en bourse plonger jusqu’à 20%… 

Derrière ces intentions louables, c’est une reprise en main idéologique de l’ensemble du secteur éducatif privé, qui se profile, ressemblant fortement à celle opérée auprès des universités, où l’enseignement du marxisme a été remis au goût du jour, et auprès des ONG étrangères en 2015, dont tout financement venu de l’étranger a été rendu illégal.

« Les écoles privées doivent préserver le leadership du Parti », précise la directive. Désormais, les cellules du Parti devront renforcer leur supervision au sein des écoles, et les membres des conseils d’établissement devront être de nationalité chinoise. Surtout, le texte interdit aux entités étrangères de détenir ou de contrôler tout école élémentaire ou collège, et d’avoir recours à des manuels étrangers. Les professeurs étrangers y compris – devront se soumettre à une formation idéologique d’une vingtaine d’heures afin « d’empêcher les éléments néfastes de nuire à la souveraineté du pays et à ses intérêts ». Une décision en majorité saluée par les internautes : « les autorités auraient dû décréter cela il y a longtemps ! Des professeurs non qualifiés et immoraux ne devraient pas être autorisés à poursuivre des carrières lucratives en Chine alors que nos propres enseignants sont mal payés », écrivait l’un d’entre eux. Si la directive ne précise pas si les écoles internationales étrangères seront concernées, il ne fait aucun doute que son objectif est de renforcer le contrôle du Parti sur tous les aspects de la société.

Dans la foulée, le ministère de l’Éducation a pris en grippe le 18 mai ces entreprises privées qui ont « trompé le public » en mettant sur pied des centres de formation qu’ils ont baptisé « universités ou instituts » sans autorisation.

Le message est notamment destiné à l’université Hupan (湖畔大学) à Hangzhou. Fondée en 2015 et présidée par le roi du e-commerce Jack Ma, l’institution a retiré le terme « d’université » de son appellation (cf photo), n’ayant jamais été officiellement reconnue par le ministère de l’Éducation. Réputée plus sélective qu’Harvard ou Stanford, l’école de management n’acceptait jusqu’à présent que 40 élèves-entrepreneurs par an, triés sur le volet parmi 4000 candidats. Si Jack Ma la voyait déjà vivre 300 ans, la rumeur voudrait que les autorités aient forcé la pépinière à talents à suspendre ses admissions de première année fin mars. À travers Hupan, c’est une attaque directe contre Jack Ma, l’ancien prof d’anglais étant bien mal en cour à Zhongnanhai depuis qu’il a ouvertement défié les régulateurs en octobre 2020. Cette imprudence lui a déjà coûté l’annulation de l’entrée en bourse de son bras financier Ant, et une amende record dans l’histoire antitrust chinoise… Les critiques ont salué cette décision, arguant que l’établissement n’était qu’un club de privilégiés qui se servait de la notoriété de ses fondateurs – Jack Ma mais aussi Liu Chuanzhi le patron de Lenovo, Guo Guangchang celui de Fosun et Shi Yuzhu, de Giant Interactive – pour attirer des célébrités et des fils de l’élite rouge… Or, pas question pour Pékin de laisser quiconque – et surtout pas Jack Ma – accroître son influence et « répandre sa pensée ». Seule celle de Xi Jinping doit prévaloir.


Monde de l'entreprise : Démissions en série dans la tech
Démissions en série dans la tech

Après Jack Ma, le fondateur d’Alibaba, Colin Huang, patron de Pinduoduo et Simon Hu, le directeur général de Ant, c’est au tour de Zhang Yiming, le PDG de ByteDance, de rendre son tablier.

Ces démissions en série interviennent dans un contexte de reprise en main généralisée du secteur de la tech, le gendarme de la concurrence ayant déjà ouvert une enquête sur le champion de livraison de repas Meituan, frappé Alibaba d’une amende record, et en préparerait une à l’encontre de Tencent. ByteDance lui aussi, a été sommé de revoir ses pratiques commerciales au regard de la nouvelle loi anti-monopole.

Avançant un désir de prendre davantage de recul pour explorer de nouvelles stratégies à long terme, de travailler à la responsabilité sociale de l’entreprise (signalant que les objectifs de l’entreprise seront alignés sur ceux du gouvernement) et de se familiariser avec les dernières technologies (sa passion), Zhang Yiming se libère de ses fonctions managériales auxquelles il prétendait être mauvais, tout en restant président du groupe. Zhang détiendrait 20 à 30% de ByteDance et contrôlerait plus de 50% de droits de vote.

Le milliardaire de 39 ans, cinquième fortune du pays, va céder sa place d’ici la fin de l’année à son ancien cochambrier à l’université de Nankai (Tianjin) et cofondateur méconnu de ByteDance, Liang Rubo, actuellement directeur des ressources humaines.

Ce passage de témoin intervient à un moment crucial pour la seule « hectocorne » au monde (une start-up dont la valorisation dépasse les 100 milliards de $). En effet, l’entreprise fondée en 2012 a bâti son succès sur son application de courtes vidéos (Douyin en Chine et TikTok à l’international) et son agrégateur d’actualité Jinri Toutiao. Aujourd’hui elle veut étendre son empire au paiement en ligne (Douyin Pay), au streaming musical (Lesso), aux jeux vidéo, à la messagerie et au e-commerce, venant ainsi marcher sur les plates-bandes des géants Tencent et Alibaba.

Pour financer de telles ambitions, ByteDance préparerait depuis des mois son entrée en bourse, à Hong Kong ou à New York. Ce serait pour cette mission « boursière » que ByteDance aurait recruté Shouzi Chew, l’ancien directeur financier de Xiaomi qui avait introduit le fabricant de smartphones en bourse de Hong Kong, après le départ de Kevin Mayer l’ex-directeur général de TikTok en août 2020. L’ancien de chez Disney aurait été poussé au départ par le climat politique extrêmement tendu avec les États-Unis. À l’époque, l’application fétiche de la jeunesse (bannie en Inde) était menacée d’interdiction aux USA par l’administration Trump qui la suspectait d’espionnage pour le compte de Pékin. La Maison-Blanche espérait contraindre ByteDance à céder ses opérations américaines à Oracle et Walmart. Un projet de vente forcée « mis en pause » par Joe Biden, à en croire le « Wall Street Journal ». De son côté, ByteDance aurait toutes les peines du monde à proposer une nouvelle structure satisfaisante aux yeux de Pékin et de Washington, dans laquelle DouYin et TikTok seraient séparées, étant donné que les deux applications partagent le même algorithme…

Avec autant d’ambitions et de défis d’avenir, comment interpréter cette démission surprise de son fondateur ? Certains observateurs y voient un choix purement stratégique pour l’entreprise qui fait face à un ralentissement de la croissance de ses activités en Chine et qui est désireuse de se réinventer.

D’autres l’interprètent plutôt comme une volonté de se prémunir d’une mauvaise publicité : en effet, l’introduction en bourse de ByteDance ferait de Zhang Yiming, l’homme le plus riche de Chine (plus de 100 milliards de $, selon Hurun), et donc une cible de taille pour Pékin qui chercher à renforcer son contrôle non seulement sur la tech, mais sur tout le secteur privé. Et l’opinion publique, habilement manipulée par Pékin, peut rapidement changer contre les ultras riches. Jack Ma en sait quelque chose : hier idolâtré par le pays entier, il est devenu du jour au lendemain un « capitaliste cupide ».

Zhang Yiming a bien compris que les personnalités de la tech un peu trop charismatiques sont désormais considérées comme une menace pour Pékin, inquiet de leur ambition personnelle ou de leur capacité à influencer l’agenda politique grâce à leur notoriété. La fermeture annoncée de l’école de management de Jack Ma en est un excellent exemple… En se mettant en retrait, Zhang Yiming espère donc que son entreprise sera épargnée. Il se pourrait bien ne pas être le dernier de la liste : Pony Ma (Tencent), Su Hua et Chen Yixiao (Kuaishou), Chen Rui (Bilibili), Liu Qiangdong (JD.com) Wang Xing (Meituan) et Robin Li (Baidu) pourraient bien être tentés de s’effacer à leur tour…


Technologies & Internet : Quand la Chine se met à l’art crypto
Quand la Chine se met à l’art crypto

Troisième marché mondial de l’art contemporain et leader dans le minage de cryptomonnaies, la Chine se prend de passion pour les œuvres d’art sous forme de jetons cryptographiques.

Apparue il y a déjà plusieurs années, cette technologie consiste à authentifier et sécuriser des actifs (GIF, albums musicaux, cartes à collectionner, figurines, images, vidéos…) numériques et/ou réels, grâce à la « blockchain ». Alors qu’un bitcoin est égal à n’importe quel autre bitcoin, ces tokens « non-fongibles » (NFT) sont uniques au monde. Ils peuvent être mis aux enchères sur des plateformes spécialisées et leur valeur fluctue en fonction de la demande. Si un artiste souhaite vendre l’une de ses réalisations, il doit créer un NFT qui certifiera la propriété de l’œuvre, mais également son authenticité, empêchant de facto les faux ou le téléchargement illégal. L’identité des acheteurs successifs et leurs prix de vente antérieurs sont ensuite enregistrés sur le registre de la blockchain et consultables par tous à tout moment. Et grâce à un « contrat intelligent » intégré au token, l’artiste peut définir le montant de la commission qu’il percevra à chaque revente du NFT, ou encore la durée du prêt à une galerie (virtuelle)…  

En Chine, les NFT se sont faire connaître dès 2018, portés par l’engouement mondial autour des CryptoKitties, ces chatons numériques créés toutes les 15 minutes, et des CryptoPunks, 10 000 petits personnages de 24 pixels générées par des algorithmes. Pourtant, les NFT n’ont pas connu un succès fulgurant dans l’Empire du Milieu à l’époque, freinés par le ban de Pékin à l’encontre des plateformes d’échanges de cryptomonnaies, qualifiées d’actifs très spéculatifs, et leur utilisation par des établissements financiers – une interdiction réitérée par trois fédérations bancaires le 18 mai, alors que l’avenir des activités de minage de bitcoin dans le pays pourrait être menacé.  

Malgré cela, les NFT connaissent aujourd’hui un regain d’intérêt dans les cercles d’initiés en Chine, stimulés par la hausse du cours du bitcoin ces derniers mois, avant qu’il ne décroche mi-mai… Lors du Nouvel An chinois, une paire de baskets virtuelles de la marque de luxe RTFKT Studios a été vendue 28 000 $ sur la plateforme chinoise Treasureland.

La pandémie est également venue donner un coup de fouet aux NFT : privés d’exposition dans les galeries traditionnelles, plusieurs artistes se sont tournés vers le monde digital pour trouver de nouvelles sources de revenus.

Fin mars, la première exposition de Chine consacrée à l’art crypto s’est tenue à l’UCCA à Pékin (cf photo), puis à JingArt à Shanghai. Lancée à l’initiative de Block Create Art (BCA) pour promouvoir les NFT auprès d’un public plus large, elle a regroupé des œuvres d’artistes internationaux comme Beeple, qui vient de vendre aux enchères chez Christie’s l’un de ses collages numériques de 5000 images pour la somme record de 69 millions de $, mais aussi d’une dizaine d’artistes chinois, dont Dabeiyuzhou basé à Xiamen qui explore les thèmes de la philosophie bouddhiste, de la beauté et de la mort à travers des modélisations 3D.

La première galerie virtuelle de 21 œuvres NFT a également été mise en ligne fin mars, intégrant une image de « China Tracy » (cf photo), avatar numérique de l’artiste multimédia Cao Fei, qui expose à UCCA jusqu’au 6 juin. Signe de l’engouement chinois pour les NFT, des centaines de groupes de discussion ont fleuri sur WeChat, tandis que Weibo regorge de vidéos explicatives en mandarin vues des millions de fois.

Pourtant, les acheteurs eux ne sont pas légions… Le marché est encore limité aux collectionneurs avertis et aux membres des cercles cryptos qui ont fait fortune grâce au boom du bitcoin et consorts, espérant gagner encore plus en misant sur les NFT à long terme. C’est cet aspect spéculatif des NFT qui fait des sceptiques, persuadés que la bulle ne va pas tarder à éclater.

Bulle spéculative ou non, ces jetons artistiques représentent aussi une bulle de liberté pour les artistes, puisque le virtuel leur permet de s’exprimer plus librement, sur des thèmes parfois tabous en Chine. C’est ainsi qu’une ville digitale imaginée dans un « metaverse » (un univers mélangeant virtuel et réel) a pour objectif de « créer une nouvelle Chine ». Prénommée « Dragon City », elle est gouvernée par une coopérative dont les membres élisent leur leader… Ce monde parallèle, un brin utopique, n’est pour l’instant pas soumis à la censure du gouvernement. Et cette opportunité-là – tant qu’elle dure – n’a probablement pas de prix…


Société : Pas de divorce pour la Saint-Valentin
Pas de divorce pour la Saint-Valentin

Considéré comme un jour auspicieux pour les mariages, le 20 mai est l’une des trois Saint-Valentins fêtées en Chine (avec le 14 février, et la fête de Qixi, le 7ème jour du 7ème mois du calendrier lunaire), la prononciation des chiffres 520 (五二零, wǔ èr líng) étant phonétiquement similaire à celle des mots « je t’aime » (我爱你, wǒ ài nǐ).

Anticipant une hausse des mariages ce jour-là, deux municipalités dans le Hunan et le Guizhou ont annoncé la fermeture de leurs bureaux des divorces afin de mobiliser tout leur personnel pour unir les couples désireux de se passer la bague au doigt. Cette décision a suscité la colère du public, qui a accusé les autorités de priver les citoyens de leur droit au divorce. « Pourquoi fermer le bureau des divorces au lieu de rallonger les heures d’ouverture du bureau des mariages ? », questionnait un internaute. « Dans ce cas, le bureau des mariages devrait également fermer le jour de la fête des célibataires, le 11 novembre », ironisait un autre. Face à la pression de l’opinion, les autorités ont finalement fait marche arrière…

La veille, le ministère des Affaires civiles avait annoncé que le nombre de divorces est tombé à son plus bas niveau historique, avec une chute de 70% au premier trimestre 2021 : 296 000 séparations contre 1,05 million en 2020. La faute au nouveau Code civil qui impose depuis le 1er janvier un délai de réflexion obligatoire de 30 à 60 jours (en cas de consentement mutuel) avant de pouvoir divorcer. Pour cela, les futurs ex-époux doivent prendre deux fois rendez-vous avec l’administration, et si l’un des deux est absent, la demande de divorce est automatiquement annulée. L’entrée en vigueur de cette règle avait conduit à un rebond des divorces en fin d’année 2020 (+13%).

Alors que la Chine fait face à une crise démographique qui pourrait impacter sa croissance économique, ce plongeon des divorces est considéré comme un succès par les autorités qui accusent les ruptures impulsives d’être l’une des causes de la natalité en berne du pays…

Les internautes eux, n’interprètent pas cette chute des divorces de la même façon, persuadés que ces séparations sont simplement retardées par la complexité des procédures administratives et par le manque de créneaux horaires disponibles, surtout dans les grandes villes. « L’annonce devrait plutôt être : 70% des couples n’ont pas pu divorcer », écrivait un internaute. « Personne ne peut changer d’avis sur son partenaire en un mois », s’indignait une aspirante au divorce.

Quoique de nombreux pays ont déjà introduit des restrictions aux divorces, cette période de délibération avant le divorce a été perçue par les citoyens chinois comme une intrusion du gouvernement dans leur vie privée, marqués par trois décennies de planning familial extrêmement strict. Aujourd’hui, les couples chinois ne sont plus prêts à suivre les consignes conjugales du Parti, et ce temps de latence imposé va probablement leur donner une raison de plus pour ne pas se marier, et ne pas avoir d’enfant… C’est sans compter sur le nombre de mariages qui ne cesse de dégringoler depuis 2013 :  seulement 8,13 millions d’unions ont été célébrées en 2020.


Podcast : 16ème épisode des «Chroniques d’Eric» : Une Saint-Valentin hors contrôle
16ème épisode des «Chroniques d’Eric» : Une Saint-Valentin hors contrôle
Venez écouter le 16ème épisode des « Chroniques d’Eric », journaliste en Chine de 1987 à 2019 et fondateur du Vent de la Chine.
 
Dans cet épisode, on découvrira les malheurs d’un jeune marié, qui s’avère incapable dans sa vie d’adulte de renoncer aux incroyables privilèges de son enfance de « petit empereur » (小皇帝) et de fils unique.
 
On y entendra aussi la passion de la Chine pour les jeux d’argent, et le rapport tout à fait inattendu pour l’esprit occidental, entre l’homme de la rue qui voit sa société comme une seule grande famille, et le policier dit « au service du peuple » (为人民服务).
 
Suivez dès à présent les « Chroniques d’Eric » via le flux RSS ou sur Apple Podcast !
 
 


Portrait : Yuan Longping, « père du riz hybride », décède à l’âge de 91 ans
Yuan Longping, « père du riz hybride », décède à l’âge de 91 ans

Né dans la capitale chinoise en 1930, Yuan Longping (袁隆平) n’a eu de cesse de trouver une solution pour mettre son pays à l’abri de la faim, profondément marqué par la famine du Grand Bond en avant sous Mao (1959-1961).

Cet agronome jeta son dévolu sur le riz, aliment de base dans le sud de la Chine. Au tournant des années 1970, il mit au point un riz hybride au rendement accru qui permit de nourrir des dizaines de millions de personnes.

Cette trouvaille fut le point de départ de plusieurs décennies de recherche, ce qui lui valut le surnom de « père du riz hybride » et une renommée à l’internationale. En 2004, Yuan Longping remporta le Prix mondial de l’alimentation de l’ONU.

«J’ai toujours eu deux rêves : le premier est de me rafraîchir à l’ombre d’un plant de riz aussi grand qu’un sorgho, aux franges aussi longues qu’un balai et aux grains aussi gros que des cacahuètes ; le second est de couvrir le monde entier de riz hybride », aurait-il déclaré en 2016. 

Personnalité appréciée du grand public, un mème internet avait été créé à son effigie : « la plus grosse erreur que j’ai faite est de vous avoir trop bien nourri » (我这辈子最大的错误是不该让你们吃太饱). Ce à quoi le véritable Yuan répondit : « la jeune génération n’a aucune idée de ce que l’on peut ressentir lorsque l’on n’a rien à manger ».

Non-membre du Parti, il reçut la Médaille de la République en 2019, à l’occasion du 70ème anniversaire de la RPC.

Hospitalisé depuis début avril, « grand-père Yuan » est décédé le 22 mai 2021 à l’âge de 91 ans. La nouvelle a ému le pays entier : une foule s’est réunie devant son centre de recherche à Changsha (Hunan), et les hommages ont afflué sur les réseaux sociaux, en une rare mobilisation spontanée. Xinhua a même proposé de mettre le drapeau national en berne pour honorer sa mémoire. Le Président Xi Jinping en personne a transmis ses condoléances à la famille de Yuan Longping, saluant sa contribution à la sécurité alimentaire du pays : « notre plus belle commémoration est d’apprendre de lui », a affirmé le leader. Pourtant, les déclarations les plus remuantes de Yuan ont été supprimées de la toile…

(Le même jour est également décédé Wu Mengchao (吴孟超), 99 ans, général de l’APL et expert en chirurgie hépatique).


Chiffres de la semaine : 15 millions administrées en une seule journée, 292 mètres de haut…
15 millions administrées en une seule journée, 292 mètres de haut…

¤ 15 millions, c’est le nombre de doses de vaccins administrées le lundi 17 mai en Chine. Un record ! 48h plus tard, la Chine avait dépassé les 450 millions de doses injectées.

L’évolution de l’effort vaccinal est remarquable : il a fallu 25 jours pour atteindre les 200 millions de doses administrées, 16 jours pour arriver à 300 millions, mais seulement 9 jours pour atteindre le cap des 400 millions. A ce rythme, l’objectif d’atteindre un taux de vaccination de 40% (560 millions de personnes) d’ici fin juin devrait être réalisable.

¤ 292 mètres, c’est la hauteur du SEG Plaza à Shenzhen où des secousses ont été ressenties le 18 mai sur l’heure du déjeuner. Ces tremblements ont provoqué l’évacuation complète du gratte-ciel de 79 étages, construit en 2000, et entrainé des scènes de panique dans les rues adjacentes. Alors qu’aucun séisme n’a été enregistré dans la région, certains experts suspectent un phénomène de « résonnance ». L’enquête est en cours.

¤ 1,19 milliards de $, c’est la perte opérationnelle enregistrée par Alibaba lors du premier trimestre 2021 – une première depuis 2014 ! Ce résultat négatif est lié à l’amende de 2,8 milliards de $ annoncée par les autorités anti-trust début avril.

¤ 11,01 millions c’est la baisse enregistrée en 10 ans de la population combinée des 3 provinces du Dongbei (Heilongjiang, Jilin, Liaoning). La région est affectée par une fuite des jeunes actifs vers le Sud et par une natalité en berne.

¤ 30% du temps d’enseignement, c’est la durée maximum préconisée par le ministère de l’Education devant les écrans, pour lutter contre la myopie des élèves.


Petit Peuple : Liling (Hunan) : Maldonne sur l’héritier
Liling (Hunan) : Maldonne sur l’héritier

Le 5 janvier 2021, Tang Lijia, opticien à Lijing, Hunan, se rendit à l’hôpital populaire n°3 avec Fu Erling sa femme archiviste, et Tang Xiyun leur fillette de 3 ans, pour un test ADN. Silencieux, Tang portait une mine sévère tandis que Fu, impassible comme si rien de tout cela ne la concernait, consolait sa fillette pleurant à chaudes larmes.  C’était la conclusion de trois douloureuses années – Tang accusait sans cesse sa femme d’avoir conçu l’enfant hors du lit conjugal.

Quand les résultats tombèrent quinze jours plus tard, ils confirmèrent ses soupçons : la fillette portait l’héritage génétique de la mère, mais non celui du père. La conclusion s’imposait, faisant soudain, en soulevant la robe, apparaître la queue du renard  (狐狸尾巴, húlí wěibā) : Tang n’était pas le père biologique. Dans leur appartement mal tenu et négligé du fait des années de désunion sur fond de soupçons, les époux entamèrent une querelle homérique où le mari ressortit les vieilles accusations, cette fois avec une violence exacerbée puisque le doute n’était plus permis. Coups, cris et pleurs furent échangés jusqu’à tard dans la nuit, les voisins collant l’oreille aux murs afin de ne rien perdre du grand déballage. Tang hurlait de ne plus supporter quolibets et lazzis au travail, et des mots de « lǜmàozi » (绿帽子, « chapeau vert ») murmurés dans son dos avec toujours moins de retenue – ce terme désignant en argot chinois les maris trompés. C’était insupportable, il n’avait pas mérité cette trahison. Lui-même s’était toujours abstenu d’aller voir ailleurs, quoique les collègues le lui eussent parfois conseillé, les soirs au bar après le travail, même si les occasions n’aient pas manqué, de femmes lui proposant de devenir son amante. Bref tout était fini, à présent une seule option leur restait ouverte, le divorce. Mais dans leur cas, le bureau des divorces ne suffirait plus – il faudrait passer par le tribunal. Car sa femme était d’accord pour qu’il parte, mais non pour lui céder la moitié de l’appartement qui avait été à 100% payé par ses parents mais avait été enregistré à leurs deux noms. Tang lui, revendiquait cette moitié du bien, pour prix de l’atteinte à son image sociale, et de sa dignité blessée.

Le lendemain donc, le mari se présenta au tribunal populaire intermédiaire, faisant valoir l’injustice qui lui était faite, de devoir supporter les frais d’éducation d’une enfant dont il venait d’apprendre qu’elle était d’un autre. Il prétendait donc à ses 50% de propriété sur le logis, et à être affranchi de toute responsabilité sur Xiyun, financière notamment. Plusieurs visites furent nécessaires, du mari et de la femme – séparément- pour permettre au juge d’enregistrer les témoignages et les exigences respectives. Quatre mois plus tard, il les reconvoqua, début mai 2021, et son verdict les prit tous deux par surprise : pour l’instant, il refusait purement et simplement la rupture. Après tout, les conjoints avaient huit ans de vie commune, un enfant, un beau lieu de vie et chacun un métier : tout pour être heureux. Surtout, la nouvelle loi sur le divorce imposait désormais 30 jours de réflexion pour réparer leur relation, au nom de la stabilité sociale, de l’harmonie familiale, et de l’avenir de leur fillette en grand besoin du cocon protecteur des deux parents.

Immédiatement, le mari fit appel, mais en vain. Et pour cause, face au juge, Fu avait changé toute la donne, en avançant une vision de leur vie passée qui infirmait totalement celle de Tang, celle d’une épouse infidèle lui ayant fait un enfant « dans le dos », puis ayant tenté de lui cacher son origine extraconjugale. Fu avait carrément accusé son mari d’amnésie et de duplicité. Pointant l’attention du magistrat sur leur importante différence d’âge, 44 printemps pour lui contre seulement 30 chez elle, elle lui avait révélé qu’avant de l’épouser en 2013, il avait dû briser un  1er mariage, après dix ans d’union, parce que le couple était resté stérile – un détail qu’il avait d’ailleurs omis de lui avouer à l’époque. Une fois en couple, ils avaient tenté de concevoir, et tout essayé – en vain- durant 8 ans. Jusqu’à ce jour de 2018 où c’était lui qui l’avait implorée d’aller voir ailleurs, d’« emprunter du sperme extérieur » (selon son expression) afin de porter enfin leur démarche à fruition. C’était donc sur sa supplique à lui qu’elle avait alors essayé, « rien qu’une fois », avec inquiétude, et seulement pour sauver le couple. Et quand elle était tombée enceinte extrêmement vite (quelques semaines) après cela, elle s’était même demandé si tout compte fait, l’enfant n’était pas de lui, son mari.

À présent, quoiqu’elle lui fut restée fidèle, il voulait la quitter. C’était très injuste, mais elle ne voulait pas s’y opposer : ses soupçons maladifs rongeaient le quotidien du couple, le rendait insupportable. Il valait mieux en rester là : à son âge, elle pouvait refaire sa vie. Par contre, céder à cet ingrat la moitié de l’appartement payé par ses parents, ce serait un comble… Parfaitement injustifié ! Elle avait confiance dans la justice de son pays pour protéger ses intérêts. Elle réclamait même une pension alimentaire, afin de pouvoir faire face aux frais d’éducation de leur enfant voulu et conçu ensemble.

Face à ces versions si divergentes, le juge resta perplexe. Laquelle des deux histoires était la bonne ? Fu était elle une dissimulatrice jouant de son mari, ou bien était-ce Tang qui cachait une jalousie congénitale ? Il reste à l’homme de loi un mois pour se faire son opinion… De l’avis général, ce mariage n’a aucune chance d’être sauvé – tout ce qui restera à faire, sera de statuer sur l’appartement et la pension. Et la nouvelle loi, conclut Wu Jiezhen, avocat à Canton, ne fera rien de bon :  de mémoire d’homme de robe, tout ce que les conjoints font durant les 30 jours de délai imposé, est d’affûter leurs arguments pour obtenir une part maximale du patrimoine, et donc, renforcer un litige qui avant la loi, aurait pu être épuré à l’amiable !


Rendez-vous : Semaines du 24 mai au 27 juin
Semaines du 24 mai au 27 juin

27-31 mai, Canton : TEA EXPO GUANGZHOUSalon du thé

28-31 mai, Shanghai : INTERNATIONAL TEA TRADE (SPRING) EXPO, Salon international du commerce du thé

2-4 juin, Shanghai : AQUATECH CHINA,Salon international des eaux de process, de l’eau potable et des eaux usées

3-5 juin, Canton : INTERWINE CHINA, Salon chinois international du vin, de la bière, et des procédés, technologies et équipements pour les boissons

8-10 juin, Shanghai : FOOD INGREDIENTS CHINA, Salon des additifs et ingrédients alimentaires 

8-10 juin, Pékin : CIPPE, Salon chinois international des technologies et équipeme6nts pétroliers et pétrochimiques

8-10 juin, Pékin : CHINA MARITIME BEIJING, Salon international des technologies et équipements d’ingénierie offshore

10-12 juin, Canton : INTERNATIONAL TRAVEL FAIR, Salon international du tourisme

12-16 juin, Shanghai : ITMA Asia & CITME, Salon des textiles, fils, tissus et industries connexes

12-20 juin, Chongqing : AUTO CHONGQING 2022, Salon international de l’industrie automobile en Chine

22-24 juin, Shanghai : FSHOW 2021, Salon international des engrais de Chine

22-24 juin, Shanghai : CAC, Salon international chinois de l’agrochimie et de la protection des cultures

23-25 juin, Shanghai : HNC, Salon international des équipements et appareils de soins de santé, des thérapies de soins de la vie

24-26 juin, Canton : CINHOE, Salon international de l’alimentation et des produits issus de l’agriculture biologiques

25-27 juin, Pékin : LPS BEIJING, Salon de l’immobilier en Chine