Le Vent de la Chine Numéro 24

du 5 au 11 juillet 2009

Editorial : Avec la récession, la délinquance s’envole

Le portrait qui suit est celui des Fleurs du mal, vues par la presse cette semaine en Chine. Il évoque une explosion de la criminalité sous le double effet de la récession, et de problèmes anciens : passage d’une économie d’Etat à une société de consommation, d’une société rurale à une urbaine (en 20 ans, quand l’Europe en a disposé de cent) le tout, sans disposer de l’outil de la concertation sociale, de l’association du citoyen aux affaires de la cité :

[1] Lancement (29/06) d’une campagne contre la «tumeur sociale maligne», prostitution estimée à « 250.000 filles ». Le chiffre pêche par forte sous-évaluation. En 2000, un chercheur singapourien estimait les travailleuses sexuelles locales à… 20M, et 100.000 à Pékin. L’activité a explosé suite à la croissance des métiers du voyage, à l’enrichissement, à l’expression croissante d’une demande en plaisir, au déséquilibre de la balance des sexes (résultat de 20 ans d’avortement sélectif) qui condamne aujourd’hui des millions de jeunes hommes au célibat. NB : l’action s’arrête au 30/09, veille de la fête nationale.

[2] Adoptée le 27/06, une loi révisée des statistiques tente de corriger une fraude à grande échelle. Dans les provinces, les cadres gonflent leurs chiffres (+4% pour le PIB de 2004), forcent les administrés à faire de même. La loi veut responsabiliser pénalement les auteurs des chiffres et tracer les données (système de signatures, d’archivage).

[3] Le 26/06, jour mondial anti-drogue. 20 trafiquants furent exécutés pour l’exemple. La Chine compte 1,13M de toxicos, mais s’en reconnaît jusqu’au décuple, non avoués. Les opiacés chutent, chassés par les drogues synthétiques (la dernière étant la kétamine), +48% de janvier à mai (+5251 cas). L’an dernier, plus de 50.000 criminels ont été condamnés, dont 17.000 entre 5 ans de prison et la mort. Cette année, 14.282 cas jugés en 5 mois induisent une hausse de 12%. Avec 190.000 malades souvent très jeunes, Canton maintient sa 1ère position. Enfin, on reconnaît une tendance nette à l’internationalisation : de plus en plus d’étrangers (africains, vietnamiens) sont arrêtés.

[4] A Pékin, Procter & Gamble, le géant des produits ménagers a réussi après 9 ans à faire casser la marque Hushibao qui contrefaisait son propre shampoing Hushubao.

[5] A Yangjiang (Canton), Tête de marteau et Qin l’épicé, chefs de bandes, passaient en procès pour extorsion et crimes en tout genre. Ils risquent la peine de mort.

[6] Jusqu’à 50.000 nord-coréennes attirées vers ou ayant fui vers la Chine, s’y retrouvent vendues aux maisons closes ou à des paysans, comme épouses-esclaves. Elles auraient jusqu’à 20.000 enfants non désirés. Nul(le) ne se plaignant, leur drame reste encore ignoré.

[7] Enfin, le 29/06, les ministères de la culture et des finances bannissent l’usage de la monnaie virtuelle de jeu, hors de leur domaine. En 2008, jusqu’à 13MM¥ de cette monnaie de singe avaient été émis à l’usage de 55M de joueurs, qui s’en servaient souvent comme monnaie réelle, hors de toute loi et net de taxes et impôts.

Le 1/10 sera le 60ème anniversaire de la R.P. Chine, fête nationale. La série de raids, de campagnes montre la détermination de l’Etat à conjurer ces démons. Mais dans tout cela, rien de curatif ni de long terme. Le tour de vis ne vise pas à tuer le vice. Mais simplement à préserver le décorum et la bonne image du pays -jusqu’à la fête.

 

 


A la loupe : Le prix mondial du minerai de fer, malade de la Chine

Depuis le 1er juillet, le mécanisme de fixation du prix global du minerai de fer agonise. Le 1er acheteur, la Chine, et le 2d vendeur Rio Tinto liés par des contrats à long terme, n’ont pu s’entendre sur le prix de l’année. La CISA (China Iron and Steel Association), lobby des aciéries chinoises, voulait une baisse de plus que 40%, mieux que Corée et Japon qui avaient obtenu 28 à 33%.

Les Chinois espéraient jouer sur les mois d’effondrement des marchés «spot» (libres), qui leur avaient permis de rentrer 100Mt de minerai, assez pour 3 à 4 mois d’activité : ils se disaient « pas pressés de conclure ». Mais voilà qu’arrive la date du 1/07, où faute de tout accord, les aciéries chinoises devront acheter au prix du marché libre, remonté de 15% depuis avril… Et c’est alors qu’on découvre le pot-aux-roses. C’est la Chine elle-même, qui a sauvé Rio, de sa propre tentative d’en prendre le contrôle minoritaire. Le groupe public chinois Chinalco avait offert 19MM$ pour renflouer Rio en échange de 20% de ses parts. Mais la CISA, par ses achats massifs spéculatifs de minerai de fer, a permis à l’action Rio de remonter, tripler, et lui a ainsi offert une alternative (l’alliance avec l’autre minéralier BHP-Billiton, et une nouvelle émission en bourse…), lui permettant de rejeter Chinalco… Du coup, la Chine rate l’occasion de posséder, comme Corée et Japon, des parts dans les mines du monde, et de se rembourser, en profit d’actionnaire, une partie des coûts de ses achats de minerai…

Conséquence, en dernière minute, toute honte bue, la CISA baissait à moitié pavillon, acceptant de passer sous la barre des 40% de baisse, tout en laissant entendre qu’elle pourrait, en septembre, avaler les 33% si âprement refusés jusqu’alors. Calculant qu’elle peut vivre jusqu’à l’été sur ses réserves en minerai, elle compte mettre le délai à profit pour voir si le marché mondial va ou non reprendre. Petite fissure dans la grosse machine chinoise : la CISA avertit ses aciéries que celles tentées de s’entendre secrètement d’ici là avec les fournisseurs sur des livraisons à « prix-Japon » seront punies. Allusion aux dizaines de petits fondeurs privés qui rêvent d’avoir enfin directement accès aux prix « à long terme », jusqu’à présent réservés aux gros. Les géants chinois leur revendent à lourd profit ce minerai, usage que l’on dit plus lucratif que la sidérurgie elle-même !

Un des leçons de cette affaire : la Chine apparaît être la cause de l’envolée des prix du minerai de fer ces années, par la concurrence que se livrent ses centaines d’aciéries, par ailleurs en surproduction (jusqu’à 100Mt). Face à trois vendeurs contrôlant 70% de l’offre globale, la lutte n’est pas égale. L’Etat tente d’accélérer la concentration, chose hasardeuse, vu la protection de ces fonderies par leurs provinces, et des millions d’emplois qui en dépendent. L’élément neuf ici, est que la source de matière 1ère, hors frontière, qui va contraindre la Chine sidérurgique à faire le ménage dans sa maison, ce que l’administration n’a pour l’instant pas pu faire !

 

 


Joint-venture : Cardin bazarde en chemin

L’infatigable Pierre Cardin prêt à passer la main…

L’été dernier pourtant, il ouvrait un restaurant dans Solana, le quartier branché de Chaoyang, 25 ans après avoir lancé son Maxim’s, roi des tables françaises de Pékin. Mais l’âge, que voulez vous… A 87 ans, le génial couturier veut tout vendre (500 licences, hors celle du groupe qui revendique 1MM²). Cardin commence par la Chine, «parce qu’elle veut acheter» : à remettre, 32 licences mode (homme, femme, enfant) et accessoires (malleterie). Au prix demandé, 200M², on se bat pour l’avoir. Les candidats les plus sérieux semblent être Aokang (Wenzhou), 1er chausseur de l’empire, Babei (Zhejiang, costumier pour enfants) et Jiansheng, l’agent cantonais, qui aurait l’avantage.

Les repreneurs auront deux soucis à se faire, dit le milieu chinois. D’abord le nombre excessif d’agents rend un succès plus aléatoire. Et il y a surtout la question d’image : qui, face au public chinois, aura assez d’envergure, l’ego assez mégalomane, pour remplir une telle ombre ?

 

 


A la loupe : Conjoncture : une Chine Dr Jekyll et Mr Hyde

Toujours plus, l’économie chinoise nous offre deux visages opposés, optimiste ou inquiet. Lequel aura le mot de la fin? Les experts en perdent leur latin !

Espoir : le PMI, index des achats des patrons, monte depuis 4 mois, à 53,2 en juin. La production industrielle monte de 8,9% en juin. En mai les 72 principales aciéries font 1,26MM de profit, après 4 mois de coupes sombres (janv-mai : -97,2% de profit du secteur), et Fushan, leader du charbon à coke, hausse de 14% ses tarifs (30/06) sous l’effet de leurs demandes. De janvier à mai, les « électriciens » font 14,6% de profits de plus qu’en même période de 2008 (à 230MM¥). Les ventes auto poursuivent en juin leur chevauchée fantastique à +47% et 829.000 voitures. L’étranger s’arrache à sa léthargie (nouvelle usine Goodrich d’aéronautique à Tianjin). L’Etat édicte sa 2de hausse du carburant, de 11% au 30/06 à 5,71¥, après +8% au 1/06, pour protéger son raffineur Sinopec de la hausse mondiale (70$/baril), pour éduquer le consommateur à l’épargne, et pour casser la déflation. Tous ces chiffres inspirent le choeur des optimistes à chanter l’hymne de la Chine atteignant cette année son chiffre magique de +8% de hausse: la Banque populaire de Chine (son Prsdt Zhou Xiaochuan), l’économiste Fang Gang, JP Morgan, CLSA

Visage d’inquiétude : quoique gâtées par le stimulus de 400MM², les Entreprises d’Etat ont vu depuis janvier leurs profits chuter de 41,5% (à 246MM¥), et les industries, de 22,9%. L’économiste Ha Jiming voit en 2010 l’inflation grimper de 5% sous l’effet du «crédit fou». L’investissement direct étranger poursuit sa chute depuis 8 mois (en mai -17,8%). Les réalisations des invests d’Etat n’apparaissent pas, ce qui laisse Andy Xie croire que bonne part de ces investissements, ont été dans le stockage spéculatif de matières 1ères. L’effet immédiat en est une remontée excessive des cours, intenable pour l’économie globale fragilisée. En 2010, Xie en attend une double rechute, en l’absence de marché pour les absorber, et sous la disparition de la manne du stimulus. Ceci explique les méthodes hasardeuses de Pékin pour sauver ses usines sans marché: le plan «acheter chinois», la hausse de 70% en bourse de Shanghai (autre destination populaire, mais stérile des crédits du stimulus), et la chute des importations de 25% depuis novembre. Ces chiffres prouvent que la Chine ne prend pas sa part de la crise mondiale, et l’exposent par retour de flamme, à une avalanche de plaintes antidumping annoncées, entre autres, par la chambre de commerce européenne.

Dernier risque et non le moindre : celui des banques, affligées de 4,2 trillions $ de dettes d’entreprises publiques. Cet encours devrait monter de 30% dans l’année, dans un marché où les firmes privées sont anesthésiées, et où la spéculation domine…

 

 


Argent : Irak – la CNPC, pied dans la porte ?

En 2005, Cnooc (China National Off-shore Oil Corp) ratait le rachat d’Unocal, 7ème pétrolier mondial (17 MM$): le Congrès américain avait mis son veto.

Au tour de Sinopec de tenter sa chance, offrant 7,3MM$ pour Addax (Suisse), un des plus gros indépendants en Afrique de l’Ouest et au Moyen-Orient (136.500b/j). Au nord du pays, Addax pompe le pétrole et paie les redevances aux rebelles, passant outre la colère de Bagdad. Sur la série d’appels d’offre qui vient de se conclure, Sinopec vient d’échouer, mais reste peut-être candidat à une licence en Irak : s’il réussit, et s’il remporte aussi Addax, les experts croient que Bagdad lui demandera de choisir…

De son côté la CNPC, la compagnie nationale pétrolière, n°1 chinois, a décroché avec BP la licence d’exploitation du site de Rumalia, sous conditions dures: ils toucheront 2$/baril, la moitié de ce qu’ils espéraient. Deal draconien, qu’ils acceptent comme « ticket d’entrée » dans une région dont ils étaient depuis longtemps exclus. Mais l’Irak, en visant si haut, décourage et recule le moment du retour à pleine exploitation : il paie pour ses divisions, sa déchirure ethnique. Mais ce genre de terrain instable est bon pour les firmes chinoises, prêtes à prendre plus de risques: pour la CNPC, ce contrat est un pied dans la porte!

 

 


Temps fort : ‘Digue verte’ : le repli raisonnable

«La voix de la raison» : ainsi fut applaudie la suspension par le MIIT (tutelle des industries de l’électronique) de l’ordre d’installer au 01/07, dans tous les ordinateurs neufs « Digue verte », logiciel supposé protéger les enfants de la pornographie.

Depuis mai l’injonction faisait l’unanimité contre elle. Celle des parents, car Digue verte bloquait des images innocentes mais laissait passer des scènes de pornographie «hard». Celle des industriels, car le logiciel «plantait», et ouvrait aux hackers les portes des PC privés. Celle des jeunes, principaux surfeurs virtuels, qui s’estiment inutilement brimés. Celle de l’UE et surtout des USA qui écrivaient au 1er ministre et se plaignaient à l’OMC, l’Organisation mondiale du commerce, dénonçant l’obstacle à la libre circulation des biens : cela faisait beaucoup!

Contre toute attente donc, le MIIT (Ministère des Industries et des technologies de l’Information) a fait marche arrière. Beau joueur, il admettait certaines critiques des industriels -tout en insistant pour dire que son logiciel ne réduit pas la liberté d’opinion, ne viole les règles internationales et n’a pas été sélectionné selon un processus arbitraire, avec impasse sur toute concertation populaire.

Peu usuel, ce demi-tour provoqua une euphorie naïve parmi les rangs des internautes civiques, certains d’avoir été à l’origine du revirement: « cela prouve que la pression sociale ne peut être ignorée, que l’opinion a un impact », trompetait Zhou Ye l’avocat pékinois tandis que Wen Yun-chao, éditeur du site Netease arborait une face satisfaite, parlant d’une « petite victoire pour les forces de la justice ».

Plus crédible, mais un rien suffisant, Ed Black, Président d’une association industrielle US voyait dans cette «victoire» la preuve que «quand les officiels américains s’en mêlent, ils obtiennent des résultats ».

Enfin, l’Etat a choisi l’apaisement, admettant s’être engagé dans une voie délicate et même, que les critiques n’avaient pas tous les torts. C’est un geste symbolique important. Le pouvoir démontre sa capacité de pragmatisme, et de « repli stratégique ». Les défenseurs de la liberté de l’internet, après avoir bien profité d’un soutien privé ou public de régions du monde, sortent de l’épreuve renforcés: un (petit) pas vient d’être franchi, vers la maturité d’une jeune nation industrielle.

Reste la question : pourquoi l’Etat s’est-il lancé dans cette galère, avec pour tout viatique un logiciel mal ficelé, peut-être piraté? Nous devons associer son initiative à l’arrivée du 60. anniversaire de la R.P. Chine, et au besoin de réaliser d’ici là des progrès dans la réalisation de la «société spirituelle socialiste» (精神文明建设 jingshen wenming jianshe), chère au chef de l’Etat. La sincérité du projet ne fait aucun doute, pas plus que sa popularité au sein de la société. La pornographie de l’internet est vécue par l’Etat comme étrangère, tant sur sa production, que sur sa diffusion: l’autre campagne à son sujet, contre Google, en est l’indice. Dans ces conditions, il ne faut pas s’étonner si dès maintenant, le MIIT nous prépare à une seconde tentative pour relancer Digue verte, peut-être dès septembre.

Ce qui pose la question, s’il s’y résout, des alternatives : Quid d’un choix laissé aux parents (ou aux constructeurs des ordinateurs), du modèle de logiciel anti-porno? Quid d’une campagne étendue aux portails nationaux, comme Baidu ? Il nous semble qu’à suivre la voie de la concertation et de l’égalité de traitement, il ne pourrait que ressortir gagnant, en efficacité au moins.

 

 


Petit Peuple : Longshan : la fermière romancière

En Chine, les fermiers et les livres, ça fait souvent deux. Mais pas toujours. Dans ce monde rural se cachent des traditions littéraires splendides, comme en ces villages centenaires autour du mont Huangshan (Anhui) aux demeures luxueuses et pleines de goût raffiné, aux statuettes polychromes et balcons de bois délicatement sculptés, témoins d’une civilisation éduquée, enrichie par le commerce du thé et de la soie. Ces villages entretenaient souvent une école, qui préparait leurs jeunes les plus doués au concours impérial. On lisait beaucoup, dans ces milieux : durant les longues soirées d’hiver, les paysans vivaient parmi les livres, voire les écrivaient.

A Longshan, dans le Shanxi, Zhao Wenfang, paysanne de 43 ans, rejoint cette tradition et accède cet été à la célébrité, après avoir écrit un roman, pour ses enfants. Rien que par son prénom (qui signifie «Parfum raffiné»), Wenfang semblait vouée à une carrière littéraire. En plus, deux incidents dans sa jeunesse, vinrent exacerber cette vocation, en l’éloignant d’abord de l’univers de la langue écrite, puis en éveillant chez elle un désir de se battre.

Il y eut d’abord la fermeture des écoles durant la Révolution culturelle : de 5 à 10 ans, elle rata les 1ères années d’apprentissage et ensuite, le collège qui venait de rouvrir, était d’un trop bas niveau pour pouvoir lui permettre de combler ses terribles lacunes. Aussi Wenfang, n’ayant jamais étudié le mandarin, a honte du sabir provincial auquel elle est réduite. Il y eut ensuite, à 17 ans, l’infection oculaire qu’elle contracta en sa 1ère année de lycée, la forçant à le quitter pour retourner aux champs : un vrai crève-coeur.

Sa revanche, elle la trouva 24 ans plus tard, en 2007. Depuis longtemps mariée, elle avait deux enfants de 16 et 11 ans. Le mari étant souvent en route, laissant les enfants à eux-mêmes, ceux-ci avaient de plus en plus de mal avec leurs études. Pour la mère, il n’était pas question de laisser faire ! Elle inventa alors un concours d’études, voir qui des 3 saurait le mieux ses leçons, elle-même suivait et apprenait les deux programmes à la fois. A ce rythme, Wenfang rattrapa vite ses lacunes en culture, et vit se réveiller en elle ses envies d’écrire: elle composa une nouvelle, «Fleur de pêcher», qui trouva tout de suite sa place dans les colonnes de Danhui, le magazine local. Impressionnés, les enfants se défonçaient dorénavant, faisaient des prodiges en classe.

L’appétit vient en mangeant : Wenfang entama «Lune et de soleil sur Lu Jia Wan», roman de son village, de ses voisins décrits dans leur décor, narrant leurs drames et leurs bonheurs. Pour autant, Wenfang n’oubliait pas ses enfants. Sans cesse, elle leur lisait les pages nouvelles, en discutait avec eux des chapitres, les interpellait, reprenait leurs suggestions.

Ainsi le livre prit toujours plus de relief, et ses enfants plus de goût d’étudier. Les deux projets sont liés : que la mère réussisse son passage dans le monde des lettres et ses mômes, leur entrée à l’université !

Le 19 mai dernier, ayant couché sur papier plus de 100.000 caractères, elle a écrit le mot «fin», puis s’est rendue (telle Perrette avec son pot au lait) à la ville de Shanglui, porter son texte à monsieur Mi Yuan, l’attaché littéraire du Bureau des créations artistiques. L’homme de l’art le lu. Quand elle est repassée, il lui a témoigné son enthousiasme. Il avait déjà alerté le journal local, et annoté le manuscrit, lui laissant des centaines de corrections à faire, tout en la conseillant pour le choix de l’éditeur.

Mais pour ces devoirs à la maison, Wenfang devra attendre : en ce moment, c’est le temps de la récolte, des grands travaux des champs, qu’il faut boucler avant les trombes de l’été. Cette femme petite et râblée, au teint toujours briqué par le soleil intense, passe ses journées dans les parcelles à récolter à la faux. Tout en liant ses bottes, elle pense à son livre et se dit qu’elle «ne lâche la plume que pour la charrue» (笔耕不辍, gēng bù chuò).

Entre les deux, elle voit le lien : ses lignes de mots succèdent à ses sillons de blé, l’un et l’autre voués à germer, donner place au livre, aux enfants, à la vie !

 

 


Rendez-vous : A Pékin, le Salon des énergies renouvelables et des éoliennes

8-10 juillet, Pékin : Salon des énergies renouvelables et éoliennes

8-11 juillet, Shanghai : Salon de l’industrie du papier

8-10 juillet, Shanghai : EP China, Salon de la production et de la distribution d’énergie

8-11 juillet, Canton : Salon du bâtiment, de la décoration, et du revêtement de sol

9-11 juillet, Shenzhen : Intertextile—Salon du textile