Le Vent de la Chine Numéro 12

du 6 au 12 avril 2008

Editorial : Crise du Tibet : Pékin veut tourner la page…

Depuis le 14/03, l’insurrection tibétaine n’en finit pas de rebondir, suscitant une tension inouïe. A Garze (Sichuan), la troupe tire sur la foule (4/04), suite à une inspection tendue au monastère de Donggu: 8 morts, qui s’ajoutent aux 22 officiellement dénombrés à Lhassa. D’autres troubles éclatent au Xinjiang,  par des Ouighours solidaires des Tibétains: à Hotan, (23-24/03), des émeutes se soldent par 70 arrestations. A Gulja (Nord-Est), 25 sont arrêtés et 3 bombes récupérées le 28/03, 10 jours après qu’une autre ait sauté à Urumqi (non confirmé)…

Sur l’origine de tous ces troubles à Lhassa, planent bien des mystères, tel au début des émeutes, le retrait de la police du centre-ville, abandonné aux pillards 3 jours durant. Quels débats, quelles décisions furent prises alors, au Bureau Politique -ou en dehors ?

Les dégâts sont déjà considérables, aggravés par l’angoisse d’une société Han locale qui réclame la fermeté, au moment même où il faudrait faire preuve de retenue. Les arrestations massives se multiplient.  111 suspects furent relâchés, 50 légèrement punis. Plus de 1000 personnes sont arrêtées, dont 6 « leaders ». Pékin espère avoir expédié tous ces procès à étapes forcées, pour sortir du cauchemar et rouvrir Lhassa au tourisme, au 1er mai. Mais comment le faire, alors qu’une liste de 79 «ennemis publics» est affichée au Toit du monde, avec 20.000¥ promis pour la délation de chacun…

Manifestement, au sein du Parti (PCC), deux tendances cohabitent. Celle qui veut imposer l’ordre, et celle qui tente de rétablir l’image du pays et écarter tout nuage noir sur les Jeux Olympiques. Ces derniers, les modérés, n’ont pas la partie facile. En conduisant d’urgence à Lhassa quelques diplomates et journalistes étrangers, ils n’ont pu éviter de nouvelles protestations de lamas ayant déjoué la vigilance policière. Trahissant son désarroi, ce mouvement s’adresse à de grandes agences de relations publiques entre Londres et New York, pour mettre tous les moyens, et compenser au plus vite le dégât d’image : car déjà, au moins deux lamas se sont suicidés, aux monastères de Kirti (27/03) et Guomang, augmentant le risque de boycott de la cérémonie d’ouverture des Jeux Olympiques.

Car à l’étranger, les images dramatiques de Lhassa et d’ailleurs réveillent critiques, vieilles peurs et rancunes. Le 1er ministre polonais D. Tusk déclare forfait pour le 1er jour des Jeux. En France, N. Sarkozy –sous la pression d’une opinion à blanc- déclare le boycott «envisageable» et les 27, très divisés, «y réfléchissent». D’ores et déjà, ces événements ont permis au Dalai Lama d’obtenir une situation dont il ne pouvait pas même rêver jusqu’alors : une (probable) rencontre à Bruxelles, avec les 27 ministres des affaires étrangères.

En face, l’appareil déploie une faconde violente contre le Prélat, « patte du chat des forces internationales anti-chinoises », « loup froqué », menteur ou hypocrite.

Mais la surprise vient de Vientiane (Laos) le 29/3 : Wen Jiabao le 1er ministre appelle le Dalai au dialogue, sans insultes ni accusations, et presque sans condition. Comme s’il était convaincu que l’avenir des JO, voire même des bonnes relations avec l’Ouest, passait par ce dialogue avec le Dalai-Lama, si longtemps refusé. La question étant de savoir, s’il n’est pas déjà trop tard, au vu des forces en train d’exploser,en Chine et en dehors!

 

 

 


Temps fort : Le mandat limité de Ma Ying-jeou

Après l’élection de Ma Ying-jeou, candidat du parti nationaliste KMT, comme Président de Taiwan (22/03) avec 58% des votes, l’apaisement avec la Chine s’accélère, comme jamais durant les 8 ans de règne du DDP indépendantiste (Parti démocratique du progrès). Cette population d’affaires, riche et éduquée, sait qu’elle pourra mieux travailler avec sa « soeur » continentale, affranchie du climat de suspicion réciproque. Anticipant l’embellie, la Bourse de Taipei caracole, enregistrant sur le trimestre, une rarissime hausse de 0,8%.

On a aussi constaté, au passage, le rejet de 2 référendums soumis par Chen Shui-bian, le Président sortant : seuls 36% des citoyens ont voté, alors que 78% étaient là pour s’exprimer aux présidentielles. C’est un indice de la maturation de l’esprit citoyen : une société soudée, pragmatique, a choisi la meilleure voie pour sa prospérité. Assurée de son autonomie « de facto », elle convient de reporter le règlement de la question qui fâche, celle « de jure » à (beaucoup) plus tard !

Avant de ceindre son écharpe de Président le 20/05, Ma a rappelé sa priorité : normaliser  avec Pékin, au plan économique. Dès juillet, business et tourisme auront leurs charters directs de week-end, entre 7 villes des 2 rivages. Avant décembre, Ma espère voir la convertibilité entre le NT$ et le ¥, et faire sauter le verrou qui empêche les compagnies de l’île d’investir en Chine plus de 40% de leurs actifs nets. L’étape suivante étant l’accord de libre échange, qu’il appelle « marché commun trans-maritime », entre le 1er investisseur en Chine, et le 1er client de Taiwan.

 En Chine, Wen Jiabao n’a pas attendu le scrutin pour rappeler en mars qu’avec Taibei, hormis l’indépendance, tout était négociable. Le 31/03, il dut se retenir d’inviter le futur Président en Chine -ce dernier ayant déjà fait savoir qu’il n’était pas pressé de franchir le détroit. Wen Jiabao lui proposa un «grand débat» sur les «liaisons directes» -air, mer, PTT-, ainsi que sur un «traité de paix » pour enterrer formellement la guerre civile des années 30-50…

On peut donc parler d’un effet «table rase» après ces élections, et d’un new deal possible. Sans toutefois sombrer dans la naïveté : Ma Ying-jeou a déjà proclamé que durant son mandat, il n’entamerait pas de palabres de réunification. Les Taïwanais veulent paix et prospérité, pas soumission. Souhaité par tous, le désenclavement économique sera aisé et logique. Mais pour le politique, rien n’a changé. Le 22/03, il s’est quand même trouvé 5,5M de citoyens à voter pour un DDP mis KO par son obstination et sa corruption, mais qui garde son fort pouvoir de mobilisation. D’ailleurs, Washington s’apprête à inviter le futur président à une visite, dont la Chine rejette le principe : avec Pékin, la « lune de miel » pourrait être courte !

 

 


Pol : Riz : Pékin dépanne Hong Kong et Macao

Mékong : un désenclavement à risques

Sur un bassin du Mékong grand comme 5 fois la France (2,57M km², 320M d’âmes), six pays (Chine, Thaïlande, Birmanie, Vietnam, Laos, Cambodge) veulent dépasser un passé de guerres et de pauvreté.

A Vientiane, les 30-31/03, les 1ers ministre tenaient le 3ème Sommet de la sous-région du Grand Mékong (après Phnom Penh-2002,  Kunming-2005). Ils inaugurèrent la route n°3, reliant sur 220km le Yunnan au nord-Thaïlandais, via le Laos, avant-dernier segment de l’axe Singapour-Pékin, en attendant un pont du Mékong, d’ici 2011. Si cette route et quelques autres vont accélérer le progrès dans les pays les plus pauvres, elles permettent aussi à la Chine d’élargir son hinterland, parc à matières 1ères (bois, caoutchouc, hydroélectricité), et marché de ses produits finis. Elle paie donc un tiers (30M$) de la route n°3, quoique presque toute hors de son sol, une part appréciable du pont déjà cité, et des tronçons encore manquants au chemin de fer Singapour-Pékin (ouverture prévue en 2011).

Le Sommet jeta également les bases du réseau de fibre optique commun. Les observateurs cependant alertent sur le risque d’une autoroute des pirates, mettant en coupe réglée un Laos trop pauvre pour se défendre, et lui léguant en échange la drogue et le sida. Seule prévention possible, selon les observateurs : un projet commun entre les six pays, de développement durable pour le bassin du Mékong (avec des lois, coopérations policières, juridiques, etc !

Riz : Pékin dépanne Hong Kong et Macao

  La pénurie cyclique alimentaire qui affecte la planète depuis l’an dernier s’est élargie en Chine, sous l’effet des tempêtes de janvier qui détruisirent 10Mha de rizières.

La semaine passée, l’effet s’en ressentit entre Hong Kong et Macao, où furent constatés des achats de panique et l’affolement des prix du riz, les plus hauts en 20 ans. De mars à avril, le cours mondial a bondi de 31% à 760$/t, le double du début de l’année. Combinée aux autres produits alimentaires, la crise provoque à Hong Kong une inflation record de 6,3%. Aussi Wen Jiabao, revenant de Vientiane, passa par HK (31/03) pour rassurer, promettant aux deux RAS de les fournir, en puisant dans ses 40 à 50Mt de réserves.

L’an dernier, la Chine au seuil d’autosuffisance, produisait 186Mt. Tout ceci met toutefois Pékin devant une décision difficile : ne pas (trop) augmenter les prix, afin de contenir l’inflation du panier de la ménagère, mais ne pas les geler non plus, ce qui découragerait le paysan de produire plus, alors que ses autres frais, eux, montent inexorablement. L’ordre vient d’être donné aux offices des grains d’augmenter le prix mini de 9% à 1700¥/t, tout en haussant les subventions aux producteurs, visant une inflation de 4,8% dans l’année : but probablement irréaliste, alors que la croissance pour 2008, selon la Banque Mondiale, atteindra tout de même 9,4%.

Une grève inédite – celle de l’atterrissage

   Au fil des ans, la Chine voit s’aggraver son déficit en pilotes, dont les écoles, avec 600 à 800 élèves formés par an, ne suivent pas la demande vertigineuse. Or depuis toujours, ses compagnies paient moins qu’ailleurs – sauf  les pilotes étrangers qu’elles sont obligées de recruter à prix d’or. Tout ceci fait désordre, réunissant les conditions d’un conflit social exceptionnel.

Chez CEYA, la filiale yunnanaise de China Eastern, la contestation vient de prendre un tour rarissime : les 31/03 et 1/04, tous ses pilotes, depuis Kunming allèrent à destination vers 17 villes telles  Simao ou Lijiang, firent deux tours en l’air, puis ramenèrent leurs 1500 passagers (au moins) au point de départ. Ils prétextèrent le mauvais temps -mais les autres vols eux, se posaient sans encombre. Quoique cynique, leur calcul était logique: payés à l’heure, ils recevaient bien moins que leurs collègues des routes internationales, tout en étant taxés davantage, et interdits de passer sous d’autres pavillons. Réunie d’urgence, la tutelle CAAC menaça de révoquer (à vie) leurs licences -tout en priant China Eastern de s’ accorder avec les grévistes, ce que faute d’avoir fait 4 jours plus tard, cette dernière CEYA dut rappeler d’anciens pilotes passés dans les bureaux. La crise dépasse, de loin, la compagnie régionale: le 14/03,  Shanghai Airlines constata l’«indisponibilité de maladie» de 40 pilotes, tandis que le 28/03, 11 hommes de East Star Air, transporteur wuhanais, se mettaient au vert…

Au Nigeria toujours, la course à l’or noir

   La Chine poursuit son OPA sur l’Afrique « noire », entendez celle de l’or noir, et augmente la donne.

Au Nigeria, selon Shamsuddeen Usman, ministre des finances, Sinosure, l’agence chinoise de garantie du crédit-export, viendrait d’octroyer à son pays «40 à 50MM$» de facilités sur 3 ans, afin d’encourager des groupes chinois à investir dans des projets ferroviaires, de télécom (ZTE) ou d’énergie (CNOOC).

Avec 2,1M de baril/jour, le Nigeria est le 1er producteur du continent. L’offre a été formulée en mars, lors du passage d’une délégation industrielle chinoise. Le financement serait remboursé en pétrole. Les deux pays, à ce stade, ont entamé les négociations. Dès le 31/03, Abuja annonçait la signature de plusieurs accords de prêts portant sur plus de 8,6MM$, à long terme et à bas taux.

/dernière minute/ dernière minute/ dernière minute/

Total, le pétrolier français, cède 1,6% de ses parts à CIC (China Investment Corporation), le fonds souverain chinois, pour 1,8MM². « Achat au fil de l’eau » pense cet observateur averti : opération opportuniste, destinée à profiter du bas cours actuel (46,5² contre 64² début 2007) pour réaliser des gains. Peu de chance, à ce stade, de convertir l’achat en positionnement stratégique sur le 4ème pétrolier mondial.

 

 


Argent : Acier – Laiwu au Shandong, pas à Mittal!

Acier—Laiwu au Shandong, pas à Mittal !

  Dès février 2006, Mittal, le géant sidérurgiste indien tentait d’acheter 38% de Laiwu pour environ 200M².

L’aventure finissait en fracas 13 mois plus tard : Pékin refusait de céder ce « joyau » à l’étranger. Déjà possesseur de 30% de Valin (Hunan), Mittal en novembre 2007, obtenait encore 73% de Oriental Steel, le groupe privé, mais échouait auprès du mongol Baotou. Laiwu cependant, n’en reste pas là : le 26/03, ce 8ème aciériste national fusionne avec Jinan, l’autre sidérurgie du Shandong (n°9), pour créer Shandong Steel, n°2 national et n°7 mondial, avec 23,8Mt, juste derrière Baosteel le Shanghaïen. L’un et l’autre vont fermer leurs unités polluantes et construire un nouveau mastodonte à Rizhao, d’une capacité colossale de 20Mt/an.

Cette fusion s’inscrit dans une vague pilotée depuis Pékin, destinée à concentrer en une dizaine de groupes 50% des capacités, tout en produisant moins cher et plus propre. Ainsi, Shougang quitte la capitale et s’allie avec Tangshan sur un projet de 27Mt à Caofeidian, port en eaux profondes. Avec de tels projets, et malgré un ralentissement dû aux fermetures de centaines d’unités obsolètes (et à l’envolée des prix du minerai, +65%), l’acier chinois progressera encore cette année, assurant 38% de la production mondiale, puis 44,5% en 2013.

 

La 3G chinoise, à la rescousse de China Telecom ?

  Autrefois monopole du téléphone chinois, China Telecom (CT) vient de perdre 13% de ses profits en 2007 (23,7MM¥), et 37% au 4eme trimestre.

Raison : le report du public vers le sans fil, apanage de China Mobile (CM, 370M d’abonnés, le poids lourd des télécoms chinois). China Telecom vient de perdre 2,7M de clients – il lui en reste 220M.

Pour colmater l’hémorragie, il investit dans de nouveaux produits, telle la TV-internet (IPTV), qu’il va développer en rachetant Beijing Telecom pour 793M$ – à temps pour les Jeux Olympiques. En même temps, au 01/04, naît le 1er réseau expérimental 3G, sous la bannière de … China Mobile. Un noyau limité aux huit futures villes olympiques, à 60.000 portables et 15.000 ordinateurs, avec un prix d’appel à 0,4¥/minute, pour la durée des tests. Tous ces abonnements sont insuffisants à la demande -d’autant qu’un tiers restera hors commerce. Ce système naît avec fort retard sur le reste du monde, car la Chine a insisté pour fonctionner avec son propre standard TD-SCDMA —afin de garder ses chances d’être leader mondial, et éviter de payer les royalties. Tout ceci concerne China Telecom qui, selon la rumeur, héritera d’un des deux autres standards, l’européen WCDMA ou l’américain CDMA 2000, plus fiables. Après refonte, imminente, de tous les groupes publics composant le paysage des télécoms, trois groupes polyvalents émergeront, dont China Telecom, enfin à armes égales.

 

 

 


A la loupe : Le Qingming, vieille fête remise en vogue

Le 清明Qingming, festival de la lumière pure, ce 4/04, équivaut à notre Toussaint. Dédié aux ancêtres, on leur rend alors visite pour nettoyer leur sépulture, danser et chanter, pique-niquer et boire à leur santé sans oublier de leur faire les offrandes consacrées toutes en papier -fleurs, monnaie, ordinateur, voiture-, qu’on brûle pour leur transmettre et volatilisées en énergie.

Mais en Chine, la visite aux décédés n’est pas que austère : c’est aussi le moment de montrer sa dextérité au cerf-volant (aux motifs animaliers, de préférence), et de faire la cour à la demoiselle de ses pensées. On va aussi fouetter la stèle avec des rameaux de saule en bourgeons, pour écarter les esprits : en un mot, c’est la fête des morts, et de la vie.

Cette année, le Qingming importe plus qu’en d’autre temps: il vient de devenir l’une des 3 nouvelles dates fériées du pays et offre trois jours pour vaquer à ses souvenirs et à soi-même.

L’idée en revient à Chen Jing, professeur d’art à l’université de Nankin qui constata en 2006, dans un train, que ses voyageurs s’en allant célébrer la fête, étaient tous vieux—les jeunes étaient restés chez eux à travailler. Dans le wagon, Chen mit alors aux voix sa proposition de réclamer l’officialisation de la fête : il obtint l’unanimité, transmit la requête au Conseil d’Etat, qui l’agréa…

Ce dernier, dans sa décision, n’a pas en tête que la défense des traditions. Il s’agit pour lui de passer à un type de congés plus moderne, ne profitant pas qu’au tiroir-caisse mais permettant au citoyen de se retrouver. Tout en évitant, comme par le passé, d’immenses congestions des transports publics. Cela n’empêche ce week-end, selon les sondages, d’attendre 7millions de personnes dans les cimetières de Shanghai, et 5 millions dans ceux de Pékin.

Mais ne réinvente pas le Qingming qui veut. Ce n’est pas que la dalle de marbre qu’il faut épousseter, mais aussi le sens de la tradition. D’année en année, la Chine redécouvre ses religions (bouddhisme, taoïsme, christianisme, islam). Via sa presse, l’Etat voudrait la réorienter vers un vague culte des parents « révolutionnaires » et des vertus « patriotiques », ce qui ne risque pas, et de loin, de combler les aspirations spirituelles de la base.

Dernier aspect, sur lequel la presse ne s’étend pas : le coût de l’inhumation est prohibitif. A Pékin – Fangshan, l’enterrement (sur liste d’attente) atteint 10.000², pour 20 ans (2m²), autant pour la crémation (à Babaoshan). Le coût est dû à la rareté du sol en cette partie de Chine la plus peuplée du monde, mais aussi à une organisation résolument anachronique : les pompes funèbres sont un métier public, les mairies en possèdent plus de 80%. En 2004, elles rapportaient 110M² de profits au bas mot : l’Etat n’insiste pas pour lâcher trop vite le monopole de sa funèbre manne !

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 


A la loupe : Pékin, à l’heure du ‘grand nettoyage de printemps’

A 4 mois des Jeux, la capitale est enserrée dans une contradic-tion entre 2 impératifs irréconciliables.  Une lourde machine poursuit le grand nettoyage social, pour accueillir le monde durant 15 jours dans une apparence de liberté (même l’internet, sur demande du Comité International Olympique, devrait être relâché). Mais ‚ il faut aussi, plus que jamais, agir en douceur pour calmer les esprits après les émeutes de Lhassa. La reprise en main va dans tous les sens, à commencer par celui, le plus présentable, de la lutte contre la corruption!

 – Le procès de Chen Liangyu s’est tenu à huis clos (25-26/03), à Tianjin et non à Shanghai : pour éviter à l’ex-Secrétaire du Parti de recevoir dans son ancien fief un «régime de faveur», voire pour l’empêcher d’éclabousser d’autres dignitaires tels Huang Ju (décédé) ou Jiang Zemin. Depuis 2006, Chen était accusé d’un détournement de 340M², des fonds de pension municipaux. Mais l’office statistique a entre-temps rectifié, rajoutant un « 0 » pour porter le délit au décuple. Le verdict est encore inconnu. Parmi d’autres corrompus châtiés, figurent Zhou Liangluo, ex-maire de Haidian, condamné à mort (28/03) avec sursis ; deux guichetiers de la banque de l’agriculture à Handan (Hebei), exécutés le 1/04, pour vol de 4,5M² ; les cadres de Liuzhou (Guangxi) subissent aussi un feu roulant de critiques, pour avoir détourné des terrains privés, et se bâtir des villas avec vue imprenable sur rivière.

– Autre cible, les déviants.  [1] Les dissidents : tel Yang Chunlin,  auteur d’une pétition anti-olympique, condamné (24-03) à 5 ans, ou Hu Jia, militant chrétien des droits de l’homme, condamné à 3 ans et demi pour «sédition» (3/04), verdict certain d’exacerber la critique à l’étranger : les USA se disent « consternés », et l’Union Européenne réclame sa libération.

[2] Les gays sont harcelés, dit Wan Yanhai, activiste de la prévention du sida. Une campagne est en cours contre leurs clubs et établissements de Pékin voire Shanghai : fermeture de leurs cercles, ratissage des points de rencontre (parc Dongdan, etc), coups de filet sur les travailleurs du sexe, fichage, visite à domicile etc. ƒ la nuit du 5/03, une 40aine d’ados en partie français, sont « ramassés » au bar « Pure Girl », testés, les dealers (étrangers) tabassés – au moins un jeune, retenu le Week-end !

– Interdiction réitérée pour la cartographie-internet, et toute mise en ligne d’information géographique sensible. Objectif d’ici les JO, selon Min Yiren, n°2 du bureau des cartes : fermer la quasi- totalité des 10 000 sites diffusant des cartes « non approuvées ».

– La liste complète serait évidemment bien plus longue. Rappelons pour mémoire, la suppression du 27/03 au 17/10 des visas à entrées multiples, et une limitation du séjour semble – il à une durée max. d’un mois pour visas d’affaires ou tourisme. A fin apparente de contrôler les allées et venues des étrangers pendant cette période sensible.

 

 


Joint-venture : Total, investissement public chinois

En Chine, la lutte anti-piratage a le vent en poupe

Loin d’être anodine, la contrefaçon à travers le monde, porterait sur 600MM$ et 5 à 9% des échanges globaux. Or, selon l’OCDE, 80% de ces faux produits viennent de Chine : c’est ce qui fait la fortune d’International Risk (IR), filiale hongkongaise de l’Américain FTI Consulting, spécialisée dans la protection des marques et de la propriété intellectuelle contre ce risque, à partir de sa base de Hong Kong. Le 21/02, IR, fondée par Steve Vickers, un ancien de la police de Sa Majesté à Hong Kong, a racheté Thompson Market Services (TMS), PME de 75 permanents (et quelques 10aines d’intermittents. Synergie intéressante: IR fait plutôt dans le conseil et l’enquête, TMS assure aussi les saisies de biens contrefaits. En contact étroit avec les instances publiques chinoises, elle a déjà coordonné  plus de 2300 descentes et fait condamner 130 faussaires. En absorbant TMS, IR reprend aussi sa base shanghaïenne et sa couverture sur plus de 20 villes chinoises.

Total, investissement public chinois

Total, le pétrolier français, cède 1,6% de ses parts à CIC (China Investment Corporation), le fonds souverain chinois, pour 1,8MM². «Achat au fil de l’eau» pense cet observateur averti : opération opportuniste, destinée à profiter du bas cours actuel (46,5² contre 64² début 2007) pour réaliser des gains. Peu de chance, à ce stade, de convertir l’achat en positionnement stratégique sur le 4ème pétrolier mondial.

 

 

 

 


JO : Jour J-123

ª La combinaison de nage LZR Racer de Speedo, dans laquelle le français Alain Bernard vient de battre 3 records du monde à Eindhoven, fait sourciller l’entraîneur chinois : son équipe sponsorisée par Nike, n’a pas droit à la tenue magique. Mais très classe, des nageurs médaillables, tel Wu Peng se disent au dessus de cela :c’est l’entraînement et non l’habit, qui fait le champion”…

ª Suite aux dernières violences policières, la torche olympique voit son parcours mondial perturbé (cf photo p4) : à Delhi le 17/04, sa route serait écourtée du tiers, à 3km ; à Londres, Fu Ying, l’ambassadrice chinoise pourrait renoncer à la porter ; à Paris, le 7 avril, le maire B. Delanoë veut déployer une banderole…

ª A qui reviendra l’honneur d’allumer le chaudron de l’ouverture des Jeux le 8/08 ? Yao Ming, la star du basket, semble favori. Mais ayant reçu de Hu Jintao le 1er relais de la torche, Liu Xiang (l’or du 110m haie à Athènes) est un sérieux outsider. Voire les légendes Luo Xuejuan (nageuse), ou Deng Yaping (pongiste).

ª Ni pénis de cerf, ni sang de tortue pour les athlètes chinois, pour fluidiser le sang ou “renforcer les jambes”. Désormais, le risque d’effet dopant de ces remèdes traditionnels est trop élevé. Seule exception : Yao Ming, pied cassé,  prendra un traitement herbal post-opératoire. Les autres se rabattront sur l’acupuncture.

 

 


Petit Peuple : A Yangzhou, un homme-oiseau

Un des plaisirs immuables de Chine est le 口技kouji, art de reproduire les bruits. Aux esprits chagrins, l’innocente distraction apparaîtra superficielle, bavarde. Mais la critique de mauvaise foi, préfère ignorer, en cette imitation un nombre de savoir-faire et vertus qui mériteraient d’être universels.

Car la technique requiert une oreille rare. Présente sur toutes les bandes passantes, elle doit décomposer tous les tons, rythmes et silences des moineaux, le braiement de l’âne, le grincement du plancher, le cri enroué du robinet rouillé, l’essoufflement de la locomotive en côte : toute la vie sur Terre ! Et pour reproduire ce cocktail de décibels, l’artiste doit jouer de ses ongles et doigts, de sa langue et ses dents, du larynx, de la glotte, du diaphragme et bien sur des cordes vocales, afin de chuinter, siffler, souffler ou craquer, et recréer tout un orchestre avec son seul corps.  

L’existence du kouji est attestée dès l’an -298 avant JC, (époque Chou). « Meng Changjun franchit le col de Hangu», texte mythique, trahit la raison d’être de cette technique : gagner son pain, en amusant le riche. Puis au fil des  siècles, comme le théâtre d’ombre ou le conte de rue, l’humble art populaire fit son chemin vers la cour impériale, et connut ses génies et théoriciens.

Parmi eux, de notre temps, compte Sun Haibo. Natif de Yangzhou (Jiangsu, également berceau de l’ex-président Jiang Zemin), jamais Sun n’oubliera ce jour ensoleillé, ces quelques minutes qui à l’âge de 8 ans, déterminèrent sa vocation. Au bord d’un canal, courant derrière sa balle, il tomba en arrêt sur une barque où poussant sur ses rames, un vieillard imitait pour lui-même les cris et roucoulades de tous les oiseaux de la création. Sa virtuosité était telle que l’enfant en resta muet d’admiration. Courant après l’esquif, le rattrapant hors d’haleine, il pria le maître de lui transmettre ses dons. Ce dernier refusa. Sun insista, supplia. Le vieux finit par se laisser convaincre, mais imposa ses conditions : Sun fut son disciple, esclave de ses préceptes et caprices, jour et nuit, des années durant.

Sous l’effort, il lui advint de s’évanouir, le souffle court, tandis que saignaient ses lèvres où perçaient les ampoules. Dans les parcs, copier les oiseaux en cages lui valurent l’insulte des maîtres, craignant que leurs bestioles ne se taisent à jamais. Les copains l ‘abreuvèrent de lazzis, et les voisins de cris.

Mais la passion l’habitait. Dans les rues, ses récitals lui valurent bientôt un triomphe. Dès l’adolescence, assez de commandes tapissaient son carnet, pour des mariages, anniversaires -voire funérailles : il avait son gagne-pain ! Puis sur le réseau de China Mobile, ses imitations furent téléchargées sur les portables de milliers de fans, d’Urumqi à Shenzhen, de Qingdao à Simao (Yunnan)… 

Sur un point, notre « roi des oiseaux » aurait pu s’inquiéter : l’indifférence de la mode, la froideur des filles, que ses trilles peinent à conquérir.

Mais Sun n’en a cure : sa for-ce est ailleurs, attraction secrète qui attire les disciples, et lui permet de retransmettre le feu qu’on lui légua : l’art de recréer le monde avec précision visionnaire (料事如神, liao shi ru shen). Car tout Chinois le sait, la langue de la nature, est la seule à ne jamais mentir !

 

 


Rendez-vous : A Pékin, les Salons du pétrole, gaz offshore et pétrochimie

7-9 avril, Pékin : Salons EXPEC / CIO OE / CIPPE : pétrole gaz

7-9 avril, Pékin : AGRI China

8-11 avril, Shanghai : NEPCON, équipements électroniques

9-11 avril, Shanghai : Salon de la création d’événements

10-12 avril, Shanghai : Salon int’l des tubes et tuyaux

10-13 avril, Pékin : China GLASS

10-13 avril, Shanghai : Boat Show

11-13 avril, Hainan, BOAO Forum