Le Vent de la Chine Numéro 7 (2022)

du 21 au 27 février 2022

Editorial : L’heure du bilan pour les JO d’hiver
L’heure du bilan pour les JO d’hiver

Après seize jours d’exploits sportifs, les Jeux d’hiver de Pékin ont finalement touché à leur fin le 20 février. A peine terminés, la Chine s’est empressée de les présenter comme un grand succès, avec les félicitations du comité international olympique (CIO). Les infrastructures étaient prêtes à temps. Le boycott diplomatique a été contré par la présence de près de trente dirigeants étrangers pour la cérémonie d’ouverture. L’opinion internationale est restée focalisée sur les menaces d’invasion de l’Ukraine par la Russie et le dopage de certains de ses athlètes. L’affaire Peng Shuai n’a pas dérapé. Les sportifs étrangers n’ont pas osé prendre position sur des sujets sensibles comme Hong Kong ou le Xinjiang (présenté comme le berceau historique du ski). La Covid-19 est restée confinée dans sa « bulle ». Le public chinois a répondu présent avec 600 millions de spectacteurs. La mascotte olympique s’arrache. Le ciel est resté bleu, et il a même neigé de vrais flocons ! Cerise sur le gâteau : contre toute-attente, la « team China » a réalisé la meilleure performance de son histoire avec 15 médailles dont 9 d’or (short-track, ski freestyle, patinage artistique…) lors de ces Jeux à domicile. La Chine termine donc à la troisième place du classement par médailles d’or devant… les Etats-Unis. C’est loin devant les 9 médailles récoltées il y a quatre ans à Pyeongchang (16ème place). 

Toutefois, ces Jeux ont également connu leur lot de controverses. Il y a d’abord eu celle liée au fait que ces Jeux d’hiver aient été dépendants à 100% de la neige artificielle, contre 90% à Pyeongchang en 2018 et 80% à Sotchi en 2014. La question de la naturalisation d’athlètes étrangers sans qu’ils soient contraints d’abandonner leur nationalité d’origine à l’inverse du citoyen lambda, a suscité de nombreux débats. Le paysage « dystopique » du site olympique de Shougang, qui a accueilli les épreuves de « big air », n’a pas fait l’unanimité parmi les spectateurs étrangers qui n’ont pas associé ses hauts fourneaux à la fin d’une ère industrielle dans la capitale chinoise. La disqualification de deux espoirs sud-coréens lors d’une épreuve de patinage de vitesse remportée par un athlète chinois, est venue tendre un peu plus les relations entre la Corée du Sud et la Chine, sur fond d’accusations d’appropriation culturelle. Surtout, la vidéo d’une femme atteinte de troubles mentaux, probablement victime d’un trafic d’épouses, retrouvée une chaine en métal autour du cou dans une cahute d’un village du Jiangsu, a suscité l’indignation des internautes et est venue ternir l’éclat des Jeux.

Une question subsiste : à combien s’est élevée la facture de ces JO ? Officiellement, elle serait de 3,9 milliards de $, dépassant de peu les 3 milliards que Pékin s’était fixé initialement*. Cela en ferait des Jeux d’hiver les moins onéreux des deux dernières décennies. Mais est-ce réellement le cas ?

Certes, environ 60% des sites olympiques de 2022 ont été hérités des JO d’été de 2008. C’est le cas de l’emblématique « Nid d’oiseau » qui a accueilli les cérémonies d’ouverture et de clôture des Jeux, ou encore du « Cube d’eau » transformé en « Cube de glace » pour accueillir les épreuves de curling. Parmi les quelques édifices construits spécialement pour les Jeux d’hiver, figurent « le Ruban de glace », un anneau couvert de 12 000 places dédié au patinage de vitesse (235 millions de $), et un centre national pour le ski de fond à Yanqing (100 millions de $). Au total, Pékin avait prévu un budget de 1,5 milliard de $. Le Financial Times rapporte que la ville aurait en fait dépensé le double.

Ces calculs ne comprennent pas de nombreux projets d’infrastructures, comme le train à grande vitesse entre Pékin et Zhangjiakou (1 milliard de $) ou encore l’autoroute adjacente (5,6 milliards de $). L’argument de Pékin et CIO est, qu’avec ou sans ces JO, ces projets auraient été construits d’une manière ou d’une autre et vont contribuer au développement économique de la région.

C’est sans compter sur le coût sanitaire de ces Jeux, durant lesquels des dizaines de milliers de tests ont été réalisés chaque jour. A titre de comparaison, Tokyo avait dépensé 2,8 milliards de $ en matière de prévention sanitaire.

Selon le média américain Insider, le total des dépenses se rapprocherait plutôt des 38,5 milliards de $, soit dix fois plus que le montant dévoilé par Pékin. En comparaison, Sotchi avait investi plus de 50 milliards de $, dont la moitié en dépenses d’infrastructures. Mais pour le prestige international de la Chine, rien n’est trop beau, rien n’est trop cher.

* Pour mémoire, Pékin avait dépensé 6,8 milliards de $ pour ses Jeux d’été en 2008. Là encore, c’était sans compter les dizaines de milliards nécessaires à la construction de stades, de lignes de métro et du terminal 3 de l’aéroport.


Hong Kong : Le dilemme sanitaire hongkongais
Le dilemme sanitaire hongkongais

Il y a encore quelques semaines, Hong Kong affichait un bilan sanitaire à faire pâlir bon nombre de grandes villes internationales. La stratégie « zéro Covid » importée de Chine continentale avait fait ses preuves et l’administration de Carrie Lam espérait convaincre Pékin de rouvrir la frontière.

C’était sans compter sur une redoutable 5ème vague qui s’est abattue sur la région administrative spéciale (RAS) fin décembre et dont la sévérité a été accentuée par les célébrations du Nouvel An lunaire. La cheffe de l’exécutif parle de « raz de marée » : au 17 février, près de 12 000 cas ont été recensés. Les experts, eux, prédisent 28 000 infections par jour d’ici mars. Au total, 250 000 Hongkongais pourraient contracter le virus durant les prochaines semaines, selon des chercheurs de CityU.

Cette croissance « exponentielle » du nombre de contaminations et l’obligation de mise en quarantaine de tous les cas positifs mettent le système de santé hongkongais à rude épreuve : les hôpitaux sont en manque de lits, les centres de quarantaine affichent un taux d’occupation de près de 100% et les laboratoires de dépistage sont dépassés par l’ampleur de la tâche (leur capacité est seulement de 100 000 tests par jour).

À la frontière avec Shenzhen, des centaines de personnes se pressent chaque jour pour espérer trouver refuge sur le continent, sauf que de ce côté-là aussi, les « hôtels » de quarantaine affichent complet. Les premiers « fugitifs » (dont deux cas positifs) ont déjà été arrêtés à Zhuhai.

Cet engorgement du système de soins a poussé l’administration à faire marche arrière sur certaines de ses mesures sanitaires. Jusqu’à présent, tous les cas confirmés étaient hospitalisés. Dorénavant, les cas asymptomatiques et légers sont envoyés dans les centres de quarantaine « officiels » qui accueillaient hier les cas contacts, renvoyés chez eux pour s’isoler. Les voyageurs étrangers, eux, voient leur quarantaine dans des hôtels désignés réduite à deux semaines au lieu de trois : un ajustement lié à la période d’incubation réduite d’Omicron, se justifient les autorités locales.

Pékin surveille de près la situation à Hong Kong et n’a aucun intérêt à laisser les choses déraper, particulièrement depuis que la RAS est censée être « gouvernée par des patriotes » et qu’elle devrait élire son prochain chef de l’exécutif le 8 mai, après un report de six semaines.

Chose rare, le Président Xi Jinping a transmis ses instructions, sans qu’elles soient reprises par les médias de Chine continentale, de crainte que l’opinion publique ne se dresse contre Hong Kong. « L’administration hongkongaise doit sincèrement assumer ses responsabilités et faire du contrôle épidémique sa priorité (…) les autorités doivent prendre toutes les mesures nécessaires pour protéger la population et assurer la stabilité sociale de la RAS », a mis en garde le 1er Secrétaire du Parti, visiblement agacé par le manque de préparation du gouvernement hongkongais. Après Wuhan, c’est la seconde fois que Xi Jinping envoie personnellement ses consignes.

Il faut lire entre les lignes : l’administration de Carrie Lam n’a pas su prendre les mesures qui s’imposaient et cela risque de nuire aux intérêts de la ville, de susciter le mécontentement de la population, et d’affecter le développement économique de la nation en retardant la réouverture de la frontière et donc le projet d’intégration de la région de la « Grande Baie ».

Jusqu’à hier, le gouvernement hongkongais excluait une mise en quarantaine de la ville entière ; une méthode régulièrement employée dans les villes chinoises, mais jugée inadaptée à la RAS et ses capacités actuelles. Cependant, les autorités locales envisageraient désormais un dépistage obligatoire de ses 7,5 millions d’habitants sur deux semaines début mars. Une stratégie jamais employée en Chine sur un foyer épidémique de cette taille.

Xi Jinping a également appelé à une mobilisation « de toutes les forces et de toutes les ressources » pour venir en aide à Hong Kong. C’est ainsi que la RAS a obtenu 100 millions de kits de dépistage, l’envoi d’experts et de personnel médical, et de l’assistance dans la construction d’un hôpital « temporaire » semblable à ceux qu’on avait vus à Wuhan début 2020.

Face à de telles pressions, il n’est pas question pour les autorités hongkongaises de dévier de la stratégie « zéro Covid ». « Déposer les armes face au virus n’est pas une option », a d’ailleurs affirmé Carrie Lam, tout en renouvelant ses excuses à la population pour cette flambée épidémique et les interminables files d’attente.

Cependant, l’impopulaire cheffe de l’exécutif sait pertinemment que maintenir cette approche sanitaire face à Omicron va nécessiter beaucoup plus d’efforts et de sacrifices de la part des habitants…

En attendant, Hong Kong se retrouve prise en étau entre la « tolérance zéro » imposée par Pékin et l’approche qui consiste à « cohabiter avec le virus », pratiquée ailleurs dans le monde. De nombreux habitants blâment d’ailleurs cet « entre-deux » comme la cause de cette 5ème vague, tout comme certains politiques pro-Prékin qui dénoncent les méthodes trop « occidentales » du gouvernement local.

Conséquence : Hong Kong ne peut pleinement bénéficier des avantages de l’une ou de l’autre des stratégies, puisqu’elle n’arrive ni à répondre aux exigences sanitaires de Pékin depuis deux ans, ni n’ose se « rouvrir » sur l’étranger. Elle reste donc isolée de la Chine et du reste du monde.

Or, pour la première place financière d’Asie, cette situation équivaut à une lente asphyxie économique. Début février, Fitch Ratings a revu à la baisse ses prévisions de croissance pour le territoire en 2022 de 3% à 1,5% : une performance parmi les plus faibles des 120 économies mondiales ciblées par l’agence de notation.

D’après un rapport de la Chambre de Commerce Européenne à Hong Kong, il faudrait attendre 2024 pour observer une évolution de la politique sanitaire à Hong Kong, ce qui correspondrait à l’introduction en Chine d’un vaccin à ARN messager. D’ici là, l’ex-colonie britannique pourrait assister au plus large exode des expatriés que la ville aie jamais connu, et avec eux, les multinationales qui la chérissaient tant.


Immobilier : Hôtel(s) à saisir !
Hôtel(s) à saisir !

Vous souhaitez réaliser un placement immobilier ? Vous avez 2,25 milliards de yuans à investir ? Devenez sans plus attendre le nouveau propriétaire de cet hôtel hors du commun , l’Intercontinental Wonderland, situé à 30km au sud-ouest de l’aéroport de Hongqiao à Shanghai.

Inauguré en novembre 2018 et conçu par la multinationale britannique d’ingénierie Atkins, l’édifice a été construit dans une ancienne carrière profonde de 88 mètres et a été nommé parmi les 10 merveilles architecturales du monde, avec deux étages immergés et deux autres au-dessus du niveau du sol.

D’après China Business News, son propriétaire, le promoteur immobilier Shimao, souhaiterait s’en séparer – une rumeur réfutée par l’intéressé. Cependant, fin janvier, le groupe a déjà cédé son hôtel Hyatt on the Bund au groupe Shanghai Real Estate, détenu par la municipalité, pour un montant de 4,5 milliards de yuans (708 millions de $).

Et cela ne sera pas la dernière transaction du genre : Shimao envisage de vendre 36 de ses propriétés d’une valeur de 77 milliards de yuans (12,2 milliards de $), dont 9 rien qu’à Shanghai. Parmi celles-là, la Shanghai Shimao Tower, qui abrite le siège régional du groupe, le Shimao International Plaza et le complexe résidentiel de Pucheng. Le parc « indoor » des Schtroumpfs, qui a ouvert ses portes en mai 2020, devrait être épargné…

Après s’être acquitté de ses dettes, le promoteur hongkongais pourrait ainsi récupérer 23, 6 milliards de yuans de liquidités. Fin décembre, le groupe a fait défaut sur une échéance de 645 millions de yuans (101 millions de $), ce qui a conduit l’agence de notation S&P à rétrograder sa note à BB+. Le passif total du promoteur s’éléverait à 4700 miliards de yuans.

Ces cessions en série sont la conséquence directe des « trois lignes rouges » imposées par l’État en 2020 pour limiter le taux d’endettement galopant des promoteurs. Si Evergrande en est la victime la plus médiatisée, d’autres promoteurs moins connus, tels que Shimao, sont également à la peine et cherchent à se délester rapidement de leurs actifs. Mais si les cessions se multiplient ces dernières semaines, c’est parce que l’Etat a promis d’assouplir l’accès au crédit pour les promoteurs « bons élèves ».

Dans la plupart des cas, les repreneurs sont des conglomérats publics, appelés à la rescousse par l’État pour stabiliser le marché immobilier, rassurer les investisseurs et renforcer son contrôle sur ce secteur qui représente un quart de l’économie chinoise. Cette « nationalisation » du secteur immobilier est la réponse apportée par l’État à une crise qu’il a lui-même provoquée.

Mais il y a tellement d’actifs dévalorisés sur le marché, les mastodontes d’Etat pourront-ils tout absorber ? Actuellement, parmi les 30 premiers promoteurs du pays, les actifs détenus par les firmes publiques, généralement moins endettées que leurs concurrents du privé, représentent 6200 milliards de yuans, soit seulement 48% de ceux des développeurs privés. Pékin a-t-il vu trop gros ?


Histoire : Les Chinois auraient inventé… le ski !
Les Chinois auraient inventé… le ski !

Après la boussole, la poudre à canon, le papier… Voilà que la Chine affirme avoir inventé le ski il y a 10 000 ans. Mieux, elle profite des Jeux olympiques d’hiver pour présenter le Xinjiang à la fois comme le berceau et l’avenir de cette discipline.

Pour étayer ses dires, la Chine s’appuie sur des peintures retrouvées sous un surplomb rocheux à quelque 3 000 mètres d’altitude, à proximité des frontières avec la Mongolie, la Russie et le Kazakhstan, près de la ville d’Altay (Xinjiang). On y distingue dix silhouettes humaines accompagnées d’animaux, peut-être des yaks ou des élans. Cette scène représenterait des chasseurs traquant leurs proies sur des skis.

Historiquement, les skieurs locaux n’étaient pas des Chinois de l’ethnie Han ou même des Ouïghours mais plutôt des Mongols, des Touvains et des Kazakhs. À l’époque, les skis étaient fabriqués avec des planches d’épicéa, courbées au feu et recouvertes de crin de cheval, avec de la ficelle en guise de fixations (cf photo). Un artisanat qui perdure jusqu’à aujourd’hui.

Jusqu’à présent, seuls des chercheurs chinois ont conclu que ces pictogrammes étaient vieux de 10 000 ans, en se basant sur d’autres formes d’art rupestre. Cela signifierait que les skis ont précédé de plusieurs milliers d’années la civilisation chinoise elle-même, ainsi que ses inventions les plus marquantes comme le papier (105 après J.-C.), la poudre à canon (142 après J.-C.) et la boussole (220 avant J.-C.).

Cependant, trois archéologues australiens et chinois ont mis en doute cette datation. Après analyse du site rupestre d’Altay en 2015, ils ont estimé que les peintures auraient plus probablement entre 4 000 à 5 250 ans. « Il se pourrait bien que la pratique du ski se soit répandue rapidement dans une région englobant le nord de la Scandinavie, la Russie, le nord du Xinjiang et la Mongolie il y a environ 5 000 ans », indique le document.

À ce jour, le plus vieux ski jamais découvert date de 2 500 ans avant J.-C. et a été retrouvé dans une tourbière suédoise. Des dessins plus explicites de skieurs munis de bâtons apparaissent sur des pétroglyphes (des gravures rupestres) datant d’environ 5 000 ans près du village russe de Zalavruga, à l’est de la frontière finlandaise.

Une autre possibilité formulée par les archéologues est que le ski soit apparu indépendamment dans différentes régions à la même époque.

Quoique la théorie qui entoure les origines chinoises du ski fasse toujours débat, cela n’empêche pas les médias chinois de la considérer comme admise à l’international et de qualifier la préfecture d’Altay comme le « berceau du ski ».

C’est d’ailleurs la région d’origine de la skieuse de fond ouïghoure Dilnigar Ilhamjan, choisie comme dernière porteuse de la flamme olympique lors de la cérémonie d’ouverture des JO de Pékin. Une « provocation » aux yeux de nombreux observateurs étrangers alors que le gouvernement chinois est accusé par les États-Unis et plusieurs autres pays occidentaux de mener un génocide à l’encontre de cette minorité musulmane. Des accusations que Pékin rejette en bloc.

Cette polémique autour des droits de l’Homme au Xinjiang n’empêche pas les autorités locales de promouvoir le développement des sports d’hiver dans la région et de comparer le relief de ses montagnes à celui des Rocheuses et sa neige poudreuse à celle d’Hokkaido (Japon). Son enneigement de novembre jusqu’à mai et ses températures clémentes auraient attiré près de 35 millions de touristes en 2021 (+59%) pour des revenus touristiques s’élevant à 26,3 milliards de yuans (+87%). Au total, le Xinjiang recenserait 72 stations de ski. Celles du « Dongbei » au nord-est du pays n’ont qu’à bien se tenir.


A lire, à voir, à écouter : « H6 », miroir de la santé chinoise
« H6 », miroir de la santé chinoise

« H6 » pour « hôpital populaire n°6 »Avec sensibilité et honnêteté, la réalisatrice Ye Ye va promener sa caméra à travers les salles et couloirs de cet établissement shanghaien pour en restituer l’atmosphère de bouillonnement permanent, la tension et l’angoisse, mais aussi la bonne humeur ambiante, la pression de ces milliers de patients qui se pressent devant les guichets, les laboratoires et les cabinets de consultation. Ils ont parfois parcouru des centaines de kilomètres dans l’espoir d’être auscultés, soulagés et guéris. Face à ce tsunami permanent de pathologies et de corps accidentés, le personnel à bout de souffle parvient miraculeusement à recevoir tout le monde, grâce à une forte dose d’improvisation. 

Dans H6, la jeune réalisatrice née en Chine, mais émigrée en France en 2001, pointe sa caméra sur deux membres du personnel de l’hôpital, quatre patients et leurs familles, afin de cerner leurs personnalités et suivre une tranche de leur vie. 

Parmi les soignants, la première est un personnage universel des hôpitaux chinois, mais absent de ceux d’ailleurs : une auxiliaire, et qui se substitue à l’infirmière ou à la famille, pour tous les soins non médicaux tels que la toilette, l’alimentation ou la veille, pour un coût à la famille qui s’avère tout sauf anodin : 350 yuans (50 euros) par jour. Personnage affectueux, truculent, mais d’une moralité parfois douteuse, cette nounou d’hôpital se voit au cours du reportage accusée par une parente de malade d’avoir facturé deux nuitées imaginaires : accusation très violente, probablement justifiée, au point qu’elle rend immédiatement le trop-perçu, dans l’espoir d’échapper à la dénonciation. 

Le second soignant est un chiropracteur qui va servir de médecin de second choix aux patients incapables d’assumer les coûts d’une médecine à l’occidentale. Cet homme maigrelet et jovial, au profil insolite, apparaît en plein jogging burlesque à travers les courées du H6, s’échauffant avant le travail. Les patients l’attendent, longue file de membres cassés qu’il va étirer un à un pour rabouter les os, réduire la fracture, avant de poser le plâtre sur le malheureux patient à demi évanoui sous la douleur. Et quand l’un d’eux demande si son traitement musclé va le guérir, sa réponse n’a rien de rassurant : « on peut toujours réparer un bol cassé, mais il ne sera plus jamais comme avant ». 

Face à ce panorama pittoresque du personnel, le sens du choix (peut-être inconscient) de la réalisatrice apparaît clairement : cet hôpital, tout en faisant le maximum pour le bien-être de ses patients, n’est pas à la hauteur des travaux d’Hercule que représente la cohorte de ses patients. 

C’est ainsi que ce film documentaire se fait le miroir sans fard de la santé chinoise. Malgré des moyens très insuffisants, ce qui frappe en définitive, est l’immense dignité de cette société. Pas un seul être, même sous la pire souffrance, ne va s’épancher en gémissements et en cris. Pas un seul membre du clan ne va abandonner l’autre à sa misère. C’est la fidélité dans le malheur, la compassion jamais prise en défaut et toujours, la résilience, l’énergie vitale prête à se reprendre pour préparer la suite de la vie. 

Par Éric Meyer

H6 a été présenté au Festival de Cannes en 2021 et est distribué dans quelques salles en France par Nour Films depuis le 2 février.

Visionnez la bande-annonce ici et retrouvez les séances près de chez vous (en France) ici !


Chiffres de la semaine : « 429 demandes refusées, 69 540 brevets, 200 millions de travailleurs ‘flexibles’ »
« 429 demandes refusées, 69 540 brevets, 200 millions de travailleurs ‘flexibles’ »

429 : c’est le nombre de demande de dépôts de marques en lien avec les Jeux Olympiques d’hiver que les autorités chinoises ont refusé. 43 ont été invalidées, dont une au nom de la populaire mascotte olympique « Bing Dwen Dwen » et une autre prénommée « Gu Ailing », du nom de la célèbre athlète sino-américaine qui a remporté trois médailles en snowboard et ski freestyle lors de ces JO de Pékin (deux d’or et une d’argent).

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69 540 : c’est le nombre de demandes de brevets déposées par la Chine auprès de l’Organisation mondiale de la propriété intellectuelle (OMPI) en 2021. Ce chiffre est en hausse de 0,9% par rapport à 2020, ce qui correspond également au taux d’augmentation moyen à l’international. Pour la troisième année consécutive, la Chine arrive en tête des demandes d’enregistrement, devant les Etats-Unis (59 570). En 2019, l’écart séparant les deux premières puissances mondiales était d’environ 1000 demandes internationales, il s’élève désormais à environ 10 000.

Pour la cinquième fois, le géant chinois des télécommunications Huawei se place en tête du classement par entreprise avec 6952 demandes. Au total, 19 universités chinoises figurent au classement des 50 universités qui enregistrent le plus de brevets au monde. C’est quatre établissements de plus qu’en 2020. L’université du Zhejiang se classe à la seconde place (306) tandis que celle de Tsinghua à Pékin arrive au pied du podium (201).

Cependant, selon l’indice mondial de l’innovation qui évalue le rapport entre les économies mondiales et leurs résultats en matière d’innovation, la Chine se classe seulement 12ème, derrière la France et devant le Japon. Sur le podium, la Suisse arrive n°1, suivie de la Suède, puis des Etats-Unis. 

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200 millions : c’est le nombre d’employés “flexibles” recensés en Chine fin 2021. Ce terme désigne le travail intérimaire, à mi-temps, à la demande (livreur, chauffeur de VTC…) et l’auto-entrepreneuriat. Parmi eux, 16% de jeunes diplômés, qui ont de plus en plus de mal à trouver un emploi. Le secteur du live-streaming lui, a attiré 1,6 million de personnes – c’est trois fois plus qu’en 2020.

Ces données reflètent les changements structurels opérés au sein de l’économie chinoise avec le développement de « l’économie de plateforme » et un marché de l’emploi moins dynamique qu’auparavant. Les médias d’Etat voient en cette nouvelle forme d’emploi une parade aux licenciements massifs dans de nombreux secteurs (tech, éducation, jeux vidéo, immobilier…). Les internautes, eux, y voient un nouveau terme pour désigner les chômeurs…


Vocabulaire de la semaine : « 100 millions, budget, construction, Hong Kong, virus, coexister, propriétés »
« 100 millions, budget, construction, Hong Kong, virus, coexister, propriétés »
  1. Approximativement, environ : 大约 ; dàyuē (HSK 4)
  2. 100 millions : 亿 ; yì (HSK 3)
  3. Budget : 预算 ; yùsuàn (HSK 5)
  4. Chiffre : 数字; shùzì (HSK4)
  5. Comprendre, inclure : 包括 ; bāokuò (HSK5)
  6. Compétition : 比赛 ; bǐsài (HSK 3)
  7. Construire, batir : 建设 ; jiànshè (HSK 5)
  8. Projet : 项目 ; xiàngmù (HSK 5)

中国设定了大约30亿美元的预算,这个数字包括了比赛场馆的建设,但不包括10亿美元的高铁线路和50亿美元的高速公路等项目。

Zhōngguó shè dìngle dàyuē 30 yì měiyuán de yùsuàn, zhège shùzì bāokuò le bǐsài chǎngguǎn de jiànshè, dàn bù bāokuò 10 yì měiyuán de gāotiě xiànlù hé 50 yì měiyuán de gāosù gōnglù děng xiàngmù.

« La Chine s’est fixé un budget d’environ 3 milliards de $, un chiffre qui comprend la construction de sites de compétition mais exclut des projets tels qu’une ligne ferroviaire à grande vitesse de 1 milliard de $ et une autoroute de 5 milliards de $ ».

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  1. Quel ce soit : 无论 ; wúlùn (HSK 4)
  2. Hong Kong : 香港 ; xiānggǎng
  3. Société : 社会 ; shèhuì (HSK 4)
  4. Penser, croire, considérer : 认为 ; rènwéi (HSK 3)
  5. Abandonner, renoncer, cesser : 放弃 ; fàngqì (HSK 4)
  6. Persévérer, persister, insister : 坚持 ; jiānchí (HSK 4)
  7. Virus : 病毒 ; bìngdú (HSK 5)
  8. Coexister : 共存 ; gòngcún

无论在港府还在香港社会层面,都有很多人认为,香港应该放弃之前坚持的“动态清零”措施,向西方的“与病毒共存”学习。

Wúlùn zài gǎng fǔ hái zài xiānggǎng shèhuì céngmiàn, dōu yǒu hěnduō rén rènwéi, xiānggǎng yīnggāi fàngqì zhīqián jiānchí de “dòngtài qīng líng” cuòshī, xiàng xīfāng de “yǔ bìngdú gòngcún” xuéxí.

« Que ce soit au sein du gouvernement hongkongais ou de la société, nombreux sont ceux qui pensent que Hong Kong devrait abandonner la politique de « zéro Covid dynamique » sur laquelle elle insistait auparavant et tirer les leçons occidentales de la « coexistence avec le virus » ».

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  1. Publier, rendre public : 公开 ; gōngkāi (HSK 5)
  2. Actif immobilier, propriété : 资产 ; zīchǎn (HSK 6)
  3. Traiter, s’occuper de : 处置 ; chǔzhì (HSK 6)
  4. Annonce : 公告 ; gōnggào (HSK 6)

自去年12月以来,世茂集团已公开披露多宗资产处置公告

Zì qùnián 12 yuè yǐlái, shìmào jítuán yǐ gōngkāi pīlù duō zōng zīchǎn chǔzhì gōnggào.

« Depuis décembre de l’année dernière, le groupe Shimao a rendu public un certain nombre d’annonces de cession d’actifs ».

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  1. Plateforme : 平台 ; píngtái
  2. Partager : 共享 ; gòngxiǎng (HSK 4)
  3. Economie : 经济 ; jīngjì (HSK 4)
  4. Développer, développement : 发展 ; fāzhǎn (HSK 4)
  5. Alimenter, nourrir, donner naissance à : 孕育 ; yùnyù (HSK 6)
  6. Abondant : 丰富 ; fēngfù (HSK 4)
  7. Emploi : 就业 ; jiùyè (HSK 6)
  8. Flexible : 灵活 ; flexible ; línghuó (HSK 5)

平台经济、共享经济蓬勃发展,孕育出丰富就业方式。中国灵活就业者已达2亿人。

Píngtái jīngjì, gòngxiǎng jīngjì péngbó fāzhǎn, yùnyù chū fēngfù de jiùyè fāngshì. Zhōngguó línghuó jiùyè zhě yǐ dá 2 yì rén.

« L’économie de plateforme et l’économie du partage sont en plein essor, donnant naissance à une multitude de types d’emplois. Le nombre de ‘travailleurs flexibles’ en Chine a atteint les 200 millions. ».

 


Rendez-vous : Semaines du 21 février au 3 avril 2022
Semaines du 21 février au 3 avril 2022

21-23 février, Shanghai : SIOF – CHINA (SHANGHAI) INTERNATIONAL OPTICS FAIR 2022.

23-25 février, Shanghai : CHINA LICENSING EXPO 2022.

3-5 mars, Canton : SIAF GUANGZHOU 2022, Salon international pour l’automatisation des procédés, EN LIGNE

4 au 13 mars : Jeux Paralympiques d’hiver à Pékin. Sur invitation seulement.

6-8 mars, Shanghai : CAFEEX SHANGHAI 2022, Salon international du thé, du café et des boissons.

8-11 mars, Jinan : JINAN INTERNATIONAL INDUSTRIAL AUTOMATION 2022, Salon international des technologies d’automation industrielle et de contrôle.

9-12 mars, Tianjin : CIEX 2022, Salon international de l’automation, de la robotique et de la machine-outil.

10-13 mars, Zhengzhou : CCEME – ZHENGZHOU 2022, Salon international des équipements de fabrication.

11-13 mars, Wenzhou : WIE – INDUSTRY EXPO WENZHOU 2022, Foire industrielle internationale de Wenzhou.

17-19 mars, Shanghai : CHINASHOP – CHINA RETAIL TRADE FAIR 2022, Salon dédié aux technologies de pointe et aux nouvelles solutions pour le commerce de détail.

19 mars, Pékin : CIEET 2022, Salon chinois international de l’éducation, EN LIGNE

20-23 mars, Chengdu : VINITALY CHINA – CHENGDU 2022, Salon des vins et des spiritueux italiens en Chine.

25-28 mars, Qingdao : QINGDAO INTERNATIONAL METAL WORKING EXPO 2022, Salon international de l’industrie du métal.

26 mars, Shanghai ; 27 mars, Canton : CIEET 2022, Salon international de l’éducation.

28-31 mars, Shanghai : EXPO FINEFOOD, Salon international de l’agro-alimentaire destiné à l’industrie hôtelière.

28 mars-1 avril, Shanghai : HDE – ECOBUILD CHINA 2022, Salon de la construction et du bâtiment durable.

30 mars-1 avril, Shenzhen : LICENSING CHINA 2022, Salon international des licences et des produits sous licence de Shenzhen.

30 mars-2 avril, Shenzhen : ITES EXHIBITION (SIMM) 2022, ITES China est le grand salon des technologies et d’équipements de fabrication de pointe dans le sud de la Chine.

31 mars-2 avril, Canton : CHINA LAB 2022, Salon international et conférence sur les appareils de laboratoire et d’analyse en Chine.

7-10 avril, Shanghai : CMEF – CHINA MEDICAL EQUIPMENT FAIR 2022, Salon chinois international des équipements médicaux.

9-11 avril, Shenzhen : CEF – CHINA ELECTRONIC FAIR, Salon chinois de l’électronique.